Alfred de Musset |
Ainsi donc, quoi qu'on dise, elle ne tarit pas, La source immortelle et féconde Que le coursier divin fit jaillir sous ses pas; Elle existe toujours, cette sève du monde, Elle coule, et les dieux sont encore ici-bas 1 A quoi nous servent donc tant de luttes frivoles, Tant d'efforts toujours vains et toujours renaissants? Un chaos si pompeux d'inutiles paroles, Et tant de marteaux impuissants Frappant les anciennes idoles ? Discourons sur les arts, faisons les connaisseurs; Nous aurons beau changer d'erreurs Comme un libertin de maîtresse, Les lilas au printemps seront toujours en fleurs, Et les arts immortels rajeuniront sans cesse. Discutons nos travers, nos rêves et nos goûts, Comparons à loisir le moderne et l'antique, Et ferraillons sous ces drapeaux jaloux 1 Quand nous serons au bout de notre rhétorique, Deux enfants nés d'hier en sauront plus que nous. ô jeunes cours remplis d'antique poésie, Soyez les bienvenus, enfants chéris des dieux! Vous avez le même âge et le même génie. La douce clarté soit bénie Que vous ramene2 dans nos yeux! Allez que le bonheur vous suive I Ce n'est pas du hasard un caprice inconstant Qui vous fit naître au même instant. Votre mère ici-bas, c'est la Muse attentive Qui sur le feu sacré veille éternellement. Obéissez sans crainte au dieu qui vous inspire. Ignorez, s'il se peut, que nous parlons de vous. Ces plaintes, ces accords, ces pleurs, ce doux sourire, Tous vos trésors, donnez-les-nous : Chantez, enfants, laissez-nous dire. |
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Alfred de Musset (1810 - 1857) |
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