André Breton |
Je regarde la Bête pendant qu'elle se lèche Pour mieux se confondre avec tout ce qui l'entoure Ses yeux couleur de houle A Pimproviste sont la mare tirant à elle le linge sale les détritus Celle qui arrête toujours l'homme La mare avec sa petite place de l'Opéra dans le ventre Car la phosphorescence est la clé des yeux de la Bête Qui se lèche Et sa langue Dardée on ne sait à l'avance jamais vers où Est un carrefour de fournaises D'en dessous je contemple son palais Fait de lampes dans des sacs Et sous la voûte bleu de roi D'arceaux dédorés en perspective l'un dans l'autre Pendant que court le souffle fait de la généralisation à l'infini de celui de ces misérables le torse nu qui se produisent sur la place publique avalant des torches à pétrole dans une aigre pluie de sous Les pustules de la Bête resplendissent de ces hécatombes de jeunes gens dont se gorge le Nombre Les flancs protégés par les miroitantes écailles que sont les armées Bombées dont chacune tourne à la perfection sur sa charnière Bien qu'elles dépendent les unes des autres non moins que les coqs qui s'insultent à l'aurore de fumier à fumier On touche au défaut de la conscience pourtant certains persistent à soutenir que le jour va naître La porte j'ai voulu dire la Bête se lèche sous l'aile Et l'on voit est-ce de rire se convulser des filous au fond d'une taverne Ce mirage dont on avait fait la bonté se raisonne C'est un gisement de mercure Cela pourrait bien se laper d'un seul coup J'ai cru que la Bête se tournait vers moi j'ai revu la saleté de l'éclair Qu'elle est blanche dans ses membranes dans le délié de ses bois de bouleaux où s'organise le guet Dans les cordages de ses vaisseaux a la proue desquels plonge une femme que les fatigues de l'amour ont parée d'un loup vert Fausse alerte la Bête garde ses griffes en couronne érectile autour des seins J'essaie de ne pas trop chanceler quand elle bouge la queue Qui est à la fois le carrosse biseauté et le coup de fouet Dans l'odeur suffocante de cicindèle De sa litière souillée de sang noir et d'or vers la lune elle aiguise une de ses cornes à l'arbre enthousiaste du grief En se lovant avec des langueurs effrayantes Flattée La Bête se lèche le sexe je n'ai rien dit |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
André Breton (1896 - 1966) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de André Breton | |||||||||
La vie et l'ouvre d'andré bretonAndré Breton est né le 18 février 1896, à Tinchebray (Orne). En 1913, alors qu'il suit les cours du P.C.B. à Paris, il rencontre Paul Valéry, qui restera pour lui l'auteur de Monsieur Teste. Affecté en 1916 au service de santé à Nantes, il y trouve un étrange patient, Jacques Vaché, dont l'humour et le détachement singuliers le fascinent, comme à la même époque le fascinent la poésie de Rimbaud (e Essais, études et témoignages |
|||||||||