André Velter |
Il y a dans les fibres du corps une houle en sommeil. Il y a dans le souffle une foule qui s'est tue. Il y a au fond des os de la poussière de feu. Il y a au creux des bras un dieu mort et une fille. Il y a tout contre l'oil un totem qui tremble. Il y a autour des reins une sueur d'épopée. Il y a dessus les dents un vieil or qui fait mal. Il y a noué au front un linceul couvert de boue. Et le tambour de la peau. Et le tocsin des tempes. Et les cris peuplés de peur. Et les nuits saturées d'aboiements et de rires. Et le sang qui bat comme un soleil. Serge Pey a renoué sa transe. Serge Pey a dévalé toutes les ruines du temps. Serge Pey a dressé des bâtons de parole pour prendre appui sur la terre qui vacille, sur la terre qui enclôt, qui emporte, qui disperse, sur la terre qui résonne du bruit sourd de l'exil. D'où vient ce chant d'innocences et de muscles noués ? D'où vient cette présence hantée ? Un petit homme debout qui ravive ses secrets, mène un galop vertical, déchaîne l'ombre étroite de midi, enrôle l'ombre froide de minuit, entre dans la forge d'un orage de braises, danse avec son manteau d'écorces et de mots, piétine la vaste clairière où tant de sources ont fui. Serge Pey est celui qui invoque, celui qui recrée des prières de silex et de pluie, celui qui secoue l'arbre aux fruits rouges, celui qui capte aussi bien la rumeur des abeilles que l'haleine des loups. Il a pour l'inconnue une vue plus violente. Il a pour l'écoute une voix plus physique. Il a pour l'oracle une offrande plus sauvage. Il est le guetteur et la proie, le labyrinthe et l'envol, l'origine et la roue voilée des âges. Serge Pey creuse un puits de lumière. Serge Pey suit un chemin d'extase au cour du réel et des choses. Serge Pey est fureur fraternelle, énergie exacte et pure, force d'instants chargés d'éternité. II y a des cercles sur le sol. Il y a des noms qui montent de l'oubli. Il y a l'ivresse des épaules et des cuisses. Il y a la fumée d'un vieil incendie. Il y a le pain au goût de famine. II y a l'échange du dehors, du dedans. Il y a le signe sans cesse renaissant. Et un soleil qui bat comme du sang. |
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André Velter (1945 - ?) |
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Portrait de André Velter | |||||||||
BibliographieAndré Velter est un grand poète français. Directeur de la collection Poésie/Gallimard, ses chroniques littéraires dans Le Monde s'attachent surtout à l'Orient. Toute son ouvre poétique est vouée au souffle, à la révolte, à l'amour sauvage, à la jubilation physique et mentale. Résolument attaché à la voix haute , il tente d'inventer une oralité nouvelle, créant régulièrement avec comédiens et musi |
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