Charles Duits |
J'ai toujours cru inadmissible la restriction que cherchent à imposer à la neige ceux qui se chargent de porter au monde sa parole Parce que je sais que le cri de ce sel c'est le talisman de la montagne Et qu'un jour l'homme s'épanouira pour devenir l'intelligence de la terre Oui même l'homme avec ses cataractes c'est-à-dire celui qui se soucie si peu des nébuleuses dont les franges bouchent encore les barbacanes nuageuses du monde. Et du soleil pour la dernière fois peut-être vaticinant sur le verre étamé de son tripode maritime Rien ne me paraît plus admirable que cette gravure toute brune représentant plusieurs jeunes filles flottant les pieds nus dans un espace splendide au centre de la terre Depuis je perçois au ciel les anges Ils ne sont que de vastes vers avec dans l'éprouvette de leurs ventres des boules d'azur Ils ne sont que des tubes translucides qui ondaient en se lovant par pointes et phalanges Et autour d'Aldébaran les goules ces sacs rouges palpitent lentement autour de leurs sept cours pareils à des cadrans tachés de rouille Mais entre toutes ces étoiles Le vaste vampire blanc qui flotte sur l'Atlantique pour boire l'eau de la mer et la projeter dans l'espace se suspend aux ailes de l'équation sous les mêmes auspices que ces deux Peaux-Rouges aux visages d'obsidienne aux paupières rongées par les climats qui se tiennent au bord du désert pour contempler les phantasmes du néant Parce que je sais que toujours le verre brûlant grandit dans son repaire de montagnes Mais bien que je sois souvent tenté au milieu des jardins suspendus de Babylone Réunis comme en un souffle d'extase par le reflet sournois et amer de l'agate Qui s'éloigne sans cesse entre les mains des femmes Bien que je sois souvent tenté donc d'éteindre les rires de ce monde parmi les hippocampes délicieux à fleur d'eau se révélant dans les cercles concentriques de la belle-de-jour (volubilis imaginaire enroulé avec grâce autour d'un poignet si net) Bien que parfois le grand personnage innommable signe des étoiles noires et sceau inamovible du lacéra-teur bufaniforme promette de relâcher son contrôle et de permettre à quiconque de justifier le diadème aux pierreries d'encre par lequel il s'est imposé aux vendeurs d'antimoine Préposés aux portes des palais en jaquettes pivert Je laisserai couler par le sablier de verre la buée qui se ramasse si souvent aux vitres de ces villes D'ailleurs l'argus à queue de nacre plane au-dessus des nêlombos Ses pattes flétries sous les coups répétés de leur parfum Qui sait je pense qu'il est parent du soleil Puisqu'il s'échappe si facilement des nasses où se terre le dernier narval sélénite parmi toutes les noc- tules vigilantes la tête en bas l'aile gauche déjà à moitié dépliée Pour éparpiller ainsi qu'un arrosoir magnétique sur le gazon le museau spectral du mandrill Et c'est ainsi dit-on Que fleurit le pied-de-loup dont la poudre sait si bien simuler l'éclair |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Charles Duits (1925 - 1991) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Charles Duits | |||||||||