Claude Roy |
De quelles paresseuses larmes de quelle saison monotone pourpre et dorée (la pluie s'obstine froide aux clairières rouillées) de quelle escale et de quelle île au loin dans l'archipel Automne as-tu rêvé ma claire as-tu rêvé et dérivé Quelle maison de mousse et de forêts mouillées quel feu pensif dans l'âtre qui rosit les mains tendues quelle lumière sage et de quelle lampe si tard allumée au dehors quelle prison de pluie si nombreuse que nul n'ose encore parler Ou bien la treille grise et roussie l'oiseau nommé Présage couleur d'opale et de tacite et les jardins d'enfance striés de cigales et d'abeilles et quelle marchant pieds nus la vague extrême et lasse sur quelle plage chavirant sous quel soleil Je me souviens encore de cette timidité soudaine du ciel devenu neige longue lisse lente latente chute beaux flocons étourdis l'air d'à peine toucher les branches Dis-moi est-ce l'hiver pâle qui allège nos pas très sourds sur les tapis du temps est-ce la neige dis Quels murmures quels boogies de train taptapant sur la voie au rythme entêté et soyeux des grands express quels ports et quelles voix enrouées d'ailleurs dans les gares au matin annonçant une ville inconnue Encore un ciel Est-ce celui de chaux vive et de lavande adolescente d'autrefois Est-ce celui qui nous a réunis est-ce cette brume à l'aurore qui laisse un peu jaunir à l'horizon le tout petit matin Il faut partir Ah laisse laisse encore un moment notre sommeil ensemble et notre bercement de chevaux marchant l'amble Laisse encore un moment nos corps se souvenir. |
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Claude Roy (1915 - ?) |
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Portrait de Claude Roy | |||||||||