Denis Diderot |
La décision prise par d'Alembert en janvier 1758 d'abandonner définitivement l'Encyclopédie entraîna plus d'une année de tergiversations et d'irrésolution et ouvrit une période de crise prolongée. Deleyre écrivit à Rousseau le 25 janvier, alors qu'il faisait un froid très vif : « Voilà l'Encyclopédie enclouée. Elle ne va pas plus que les moulins à eau n'allaient les jours passés ' ». Le Journal encyclopédique du 1er février mentionne que « les vexations de toute espèce ont finalement obligé M. d'Alembert à renoncer absolument, et sans retour, à l'ouvrage 2 ». Les libraires eux-mêmes firent savoir au public, dans une brochure de huit pages, que l'ouvrage était interrompu : cet opuscule imprimé chez Le Breton et portant le titre clair de « Mémoire des libraires associés à {'Encyclopédie sur les motifs de la suspension actuelle de cet ouvrage » dut paraître tôt dans l'année, car il était cité longuement dans le Mercure de France d'avril. Une bonne partie de ce pamphlet était destinée à flatter d'Alembert pour le faire revenir sur sa décision ; cette manoeuvre dut être couronnée de succès puisque Diderot informait Voltaire, en juin, que d'Alembert avait consenti à reprendre la partie mathémathique de l'ouvrage 3. Le 26 février encore, d'Alembert avait écrit à Voltaire : « Je persiste dans ma résolution de ne plus travailler à l'Encyclopédie ». Pourtant on le voit bientôt faire le contraire de ce qu'il avait précédemment annoncé et adopter une politique diamétralement opposée à ce qu'avait conseillé Voltaire '. Il est vrai qu'il hésita beaucoup, au grand dam de ses biographes dont beaucoup, fixant sa désertion en 1759 au lieu de 1758, semblent ignorer combien cette crise, dans l'édition de l'Encyclopédie, avait été prolongée et confuse. D'Alembert annonçait à voix haute qu'il se démettait, puis il revenait à moitié sur cette décision, puis se démettait à nouveau et, en février et en avril 1759, pensait encore continuer. L'appel des libraires à d'Alembert irritait fort Diderot. Une lettre qu'il écrivit un an plus tard à Sophie Volland en apporte la preuve. A cette date, d'Alembert, qui avait renoncé même à la partie mathématique de l'Encyclopédie, revit Diderot pour la première fois depuis plusieurs mois et lui demanda plutôt maladroitement d'être à nouveau rémunéré par les libraires. Le fait est qu'il était dans la gêne. Il vivait des pensions, très modestes, que lui servaient les gouvernements prussien et français et encore n'étaient-elles pas versées à cause des difficultés financières entraînées par la guerre de Sept Ans. Ce fut l'occasion pour Diderot de faire un vrai sermon à d'Alembert. Quand celui-ci déclara que s'il revenait, il n'écrirait plus de préfaces, Diderot répliqua : « Vous en voudriez faire pour la suite, que vous n'en seriez pas le maître. - Et pourquoi cela ? - C'est que les précédentes nous ont attiré toutes les haines dont nous sommes chargés. Qui est-ce qui n'y est pas insulté ? » Faisant allusion à la déclaration publique qu'avaient faite les libraires dans la brochure de l'année précédente, Diderot ajoutait : « Cependant, vous quittez une entreprise à laquelle ils ont mis toute leur fortune ; une affaire de deux millions est une bagatelle qui ne mérite pas l'attention d'un philosophe comme vous. Vous débandez leurs travailleurs. Vous les jetez dans un monde d'embarras dont ils ne se tireront pas sitôt!. Vous ne voyez que la petite satisfaction de faire parler de vous un moment. Ils sont dans la nécessité de s'adresser au public ; il faut voir comment ils vous ménagent et me sacrifient». L'article de d'Alembert sur « Genève » n'eut pas pour seul effet d'engager Malesherbes à durcir la censure de 1' Encyclopédie ; il le força à réexaminer tout le problème des rapports de l'Encyclopédie avec le gouvernement. Le brouillon autographe de son mémoire d'avril 1758, aujourd'hui à la Bibliothèque nationale, révèle un fait saisissant. Dans cette lettre adressée à Bernis, alors membre du Conseil du Roi et bientôt ministre des Affaires étrangères, Malesherbes recommande pour l'Encyclopédie une politique de complète autonomie et de responsabilité personnelle. Sa lettre révèle aussi le statut de Diderot au regard des autorités. « Pour M. Diderot il a fait des fautes et il en a été puni sévèrement, mais ces fautes sont-elles irréparables ? les disgrâces qu'il a déjà éprouvées et celle qu'il éprouve encore puisque l'entrée des académies lui est interdite pour le moment présent ne sont-elles pas suffisantes ' ? » La réponse de Bernis fut affable mais fort réservée, et l'on ne sait pas si Malesherbes poussa plus loin son projet et si Diderot comprit que les académies lui étaient fermées *. On ignore quand fut prise une décision si pénible pour Diderot, mais il est clair que non seulement l'Académie française, mais encore l'Académie des sciences ne voulaient point de lui et il se peut que les académies de province qui, à l'époque, fleurissaient partout en France, connaissaient la désapprobation officielle qui pesait sur lui. Cela peut expliquer pourquoi il ne fut jamais membre d'une académie en France, aussi provinciale et obscure soit-elle. La décision prise par d'Alembert, au début de 1758, de ne plus être éditeur de l'Encyclopédie, amena la signature d'un nouveau contrat entre Diderot et les libraires, si l'on en juge par une des rares lettres de Diderot à Voltaire. Ce dernier, qui avait appelé Diderot lâche parce qu'il voulait poursuivre l'Encyclopédie, avait apparemment changé d'avis en juin 1758 et demandait si Diderot aimerait qu'il écrivît de nouveaux articles. « Si je veux de vos articles, Monsieur et cher maître ? écrit Diderot le 14 juin. Est-ce qu'il peut y avoir de doute à cela ? Est-ce qu'il ne faudrait pas faire le voyage de Genève et aller vous les demander à genoux, si on ne pouvait les obtenir qu'à ce prix. Choisissez ; écrivez Envoyez et envoyez souvent. Je n'ai pas pu accepter vos offres plus tôt; mon arrangement avec les libraires est à peine conclu. Nous avons fait ensemble un beau traité, comme celui du diable et du paysan de La Fontaine. Les feuilles sont pour moi ; le grain est pour eux. Mais au moins ces feuilles me seront assurées '. » Au début de l'été 1758, on reprit les préparatifs de la publication du volume VIII de l'Encyclopédie. Mais l'ouvrage se ressentait durement du retrait de d'Alembert : les libraires déclarèrent plusieurs années après que sa défection avait été la cause qu'aucun volume n'était sorti en 1758 l0. Cette fois, Grimm relut aussi les épreuves ; Diderot comme à l'accoutumée remplissait ses devoirs d'éditeur et préparait la publication de sa pièce. Le Père de famille ; l'orage qu'allait amener l'allusion de Rousseau au livre de l'Ecclésiaste n'avait pas encore éclaté ". Mais toute la sérénité dont Diderot put jouir pendant l'été 1758 fut mise en pièces par la publication à la fin de juillet du livre d'Helvétius, De l'Esprit. Cet ouvrage qui, en dépit de son titre, parlait plus des sources de l'action morale que de psychologie, avait d'abord paru si inoffensif qu'un censeur officiel l'avait approuvé et qu'il avait été publié avec permission tacite. Tout montre qu'Helvétius lui-même n'avait pas rêvé que son livre pût être l'objet d'une controverse, ce qui semble prouver qu'il n'avait pas un sens très aigu de la stratégie politique, car De l'Esprit mettait en grave danger la cause qu'il voulait servir. Pour les orthodoxes ce livre était le plus scandaleux et outrageant que le siècle ait encore vu imprimer et, de plus, ils soutenaient qu'il représentait exactement le point de vue des philosophes, particulièrement celui de Diderot et de l'Encyclopédie. Quoique Helvétius n'ait jamais écrit un seul article pour l'Encyclopédie, les deux ouvrages étaient assidûment jumelés par les critiques de l'un comme de l'autre. II s'agissait bel et bien de les associer dans la réprobation générale. En conséquence, Diderot se trouva plongé dans une atmosphère de tension croissante. Avant longtemps, la crise devait se terminer en désastre. Au lecteur du xxc siècle, De l'Esprit paraît plutôt banal et évoquait cette phrase immortelle du théâtre américain : « Pourquoi tous ces cris ? » Helvétius essayait simplement de fonder une science de la morale sur la base du comportement psychologique (behaviourismé) sans recourir à des sanctions transcendantes. Comme il le disait dans sa préface : « J'ai cru qu'on devait traiter la morale comme toutes les autres sciences, et faire une morale comme une physique expérimentale ». Sa doctrine nous paraît aujourd'hui simplifiée à l'excès, jusqu'à la platitude. En fait il était un prédécesseur de Jeremy Bentham et de la morale utilitaire fondée sur le calcul du plaisir et de la douleur a. Pour un moraliste de notre siècle, les affirmations d'Helvétius sur la nature morale de l'homme semblent vraies en soi, mais énoncées d'une façon simpliste et quelque peu déformée. Au moment de sa publication pourtant, les orthodoxes, les conservateurs et les esprits conventionnels furent profondément choqués par les doctrines d'Helvétius, car son système de morale était tout à fait indépendant de la volonté de Dieu et des commandements de la religion. Pas de sanctions de l'au-delà. L'égotisme devait être sa propre récompense. Car Helvétius présentait sa morale comme le paradoxe d'un égotisme exagéré ; pour lui, l'homme n'est vertueux, quand et s'il peut l'être, uniquement parce qu'il satisfait ainsi au mieux les exigences de son ego. La célèbre Mme du Deffand faisait remarquer que si le livre bouleversait tant de gens, c'est qu'Helvétius avait révélé ce qui était le secret de chacun. Helvétius ne se limitait pas à la morale et à la psychologie. Il se déchargeait de divers obiter dicta, surtout dans ses notes, aussi enflammées qu'hors de propos. Il désapprouvait le travail forcé sur les routes, déclarait que les sauvages étaient plus heureux que les paysans français, attaquait le clergé catholique pour son indifférence à l'intérêt général, se demandait si la coutume catholique de se débarrasser de ses filles en les forçant à prendre le voile n'était pas plus barbare que l'exposition des enfants pratiquée par les Chinois, vitupérait contre le luxe, soutenait (évoquant la croyance aux miracleS) que le témoignage devait être statistique et fondé sur le calcul des probabilités, faisait l'éloge de Julien l'Apostat, indiquait très clairement qu'il n'y avait pas de différence métaphysique réelle entre l'homme et l'animal, émettait des généralisations humanitaires du genre « qu'il n'arrive point de barrique de sucre en Europe qui ne soit teintée de sang humain " ». La lecture du livre d'Helvétius n'est pas un plaisir sans mélange, même pour ceux qui aiment collectionner les antiques. Il reflète fastidieusement son égotisme et son absence d'humour. Sa conception des mobiles humains est des plus étroites. Toute conduite est presque exclusivement motivée par l'estime de soi, la soif de la gloire, le désir des femmes, reflétant ainsi son auteur plus que l'homme en général ". De l'Esprit est prolixe. Il se répète sans fin. Il profite de l'extraordinaire complexité sémantique du mot « esprit » pour passer d'un terrain à l'autre. Parfois il parle de l'esprit (minD), quelquefois de l'intelligence (wiT) et quelquefois le mot prend le sens particulier que lui donnait Helvétius de « goût » et d'« adresse ». Bien que les métaphores et les comparaisons y abondent, l'effet est étonnamment peu intéressant, parce que les images sont banales et leur présentation prosaïque et terne. Diderot disait de ce livre : « Un auteur paradoxal ne doit jamais dire son mot, mais toujours ses preuves : il doit entrer furtivement dans l'âme de son lecteur, et non de vive force (...). Si tout ce que l'auteur a écrit eut été entassé pêle-mêle, qu'il n'y eût eu que dans l'esprit de l'auteur un ordre sourd, son livre eût été infiniment plus agréable, et, sans le paraître, infiniment plus dangereux». De l'Esprit fut publié le 27 juillet 1758. Le 10 août, le Conseil d'Etat en révoquait le privilège, suivi à son tour par les invectives de l'archevêque de Paris (22 novembrE) et du pape Clément XIII (31 janvier 1759) ,6. Le malheureux censeur, un des principaux fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, nommé Tercier, perdit son emploi pour avoir laissé passer le manuscrit, et Helvétius lui-même fut privé de sa position honorifique de maître d'hôtel de la Reine ". Il dut faire aussi des rétractations solennelles " Tout cela en aurait troublé d'autres, mais ne désarçonna nullement Helvétius. Il ne lui arriva pas grand-chose de plus. Comme disait le lucide Turgot, ce qu'avait fait Helvétius était « le plus propre à attirer sur soi l'éclat de la persécution qui ne fait pas grand mal à un homme riche, et à en faire tomber le poids réel (de son actE) sur beaucoup d'honnêtes gens de lettres, qui reçoivent le fouet qu'Helvétius avait mérité " ». La même observation fut faite précisément par Grimm, particulièrement alarmé par l'association qui se faisait dans l'esprit du public entre Helvétius et Diderot : « La philosophie se ressentira longtemps du soulèvement des esprits que cet auteur a causé presque universellement par son ouvrage (...). Pour perdre M. Diderot, on a publié partout qu'il était l'auteur de tous les morceaux qui avaient révolté dans l'ouvrage de M. Helvétius, quoique ce philosophe n'ait aucune liaison avec le dernier, et qu'ils ne se rencontrent pas deux fois par an ». Et il est vraiment presque certain que Diderot, en dépit de ce que déclara plus tard son ami Meister, n'eut rien à voir dans la composition du livre d'Helvétius. L'accusation que les encyclopédistes jugèrent la plus grave était qu'ils étaient étroitement unis dans une conspiration contre le gouvernement et la religion. On le répétait partout mais jamais de façon plus écrasante que lorsque le procureur général de France déclara solennellement en 1759 devant le tribunal le plus élevé du pays : « C'est avec douleur que nous sommes contraints de le dire, peut-on se dissimuler qu'il n'y ait un projet conçu, une société formée pour soutenir le matérialisme, pour détruire la religion, pour inspirer l'indépendance et nourrir la corruption des mours ». Ce n'était que reprendre et résumer les allégations de Palissot dans ses Petites lettres sur de grands philosophes , de l'abbé de Saint-Cyr, dans sa description des Cacouacs ; d'Abraham de Chau-meix dont les huit volumes des Préjugés légitimes contre l'Encyclopédie et essai de réfutation de ce Dictionnaire commencèrent de paraître en octobre 1758 ; de l'abbé de Saint-Cyr, dans son Catéchisme et décisions de cas de conscience, à l'usage des Cacouacs ". Cette prétendue conspiration devint un des mythes courants du parti opposé aux philosophes comme on peut le voir dans les Mémoires pour servir à l'histoire du jacobinisme de l'abbé de Barruel (1797-1798) *, Les philosophes répétèrent toujours avec insistance, et avec raison, que cette affirmation était inexacte. Grimm la niait, d'Alembert la niait, bien qu'il décidât évidemment qu'il était imprudent de publier le manuscrit qui contenait ce désaveu ". Les libraires eux-mêmes la niaient. Dans leur mémoire de 1758 où ils expliquaient les raisons de la suspension de l'Encyclopédie, ils écrivaient : « Il est de la plus exacte vérité que depuis douze ans et plus que l'Encyclopédie est commencée, ceux qui coopèrent à son exécution ne se sont pas assemblés une seule fois ; la plupart ne se connais -sent pas ; chacun travaille en son particulier sur le sujet qu'il a adopté ; il envoie ensuite son ouvrage à l'un des éditeurs, sans rapport ni communication avec les auteurs des autres parties * ». La nécessité même de faire une déclaration aussi catégorique laisse entrevoir combien dut être grave cette accusation constante de conspiration. Il faut pourtant reconnaître que l'Encyclopédie encourageait de tels soupçons, car elle déclarait sur la page de titre de chaque nouveau volume avoir été écrite par une société de gens de lettres ". Dans cette atmosphère de tension croissante et de crise menaçante, Diderot mettait la dernière main à sa pièce, Le Père de famille. Elle avait été longtemps en chantier. Il avait annoncé au public dans les Entretiens sur le Fils naturel que Le Père de Famille était en préparation. Cette annonce parut au début de février 1757 ". Mais les lettres de Deleyre à Rousseau montrent que Diderot travaillait encore beaucoup au Père de famille plus d'un an après M. En réalité, la pièce, accompagnée du discours De la poésie dramatique, ne fut publiée qu'au début de novembre 1758 }0. Une des raisons de ce long retard est que pendant un temps Diderot, dégoûté, avait abandonné sa pièce. Cela nous est révélé par une lettre du 29 novembre 1757, adressée à un confrère dramaturge, Antoine Le Bret, inquiet parce qu'on disait que l'intrigue de sa prochaine pièce. Le Faux généreux, était semblable à celle de Diderot. D'une main qui prouve la hâte et qui, proche de sa ferme mais délicate écriture coutumière, est relativement illisible, Diderot lui faisait savoir que le plan de sa pièce - dont Le Bret était évidemment informé - ne serait pas changé. « La première pièce m'avait donné tant de tracasseries que j'ai été vingt fois sur le point d'abandonner la seconde, et de jeter au feu ce que j'en avais fait. Mes amis m'en ont empêché. Je l'ai reprise. J'y ai un peu travaillé, mais si peu que ce n'est pas la peine de le dire. Je ne prévois pas qu'on puisse l'imprimer de deux mois ; l'impression en prendra bien un encore 31 ». La première de la pièce de Le Bret eut lieu le 18 janvier 1758, mais il se passa dix mois avant que la pièce de Diderot ne fût publiée. Diderot dédia sa pièce à un personnage de haut rang, une souveraine pas très considérable, il est vrai, mais enfin à une souveraine. Ce n'était pas dans sa manière habituelle. Peut-être le fit-il parce qu'il sentait sa position s'affaiblir et qu'il lui fallait pouvoir s'enorgueillir du soutien d'un auguste nom. Peut-être n'était-ce que l'influence de Grimm, homme qui se haussa par de grands efforts (comme quelqu'un l'a fait remarqueR) du rang de premier critique d'Europe à celui de diplomate de troisième ordre. La lettre de Diderot était adressée à Son Altesse Sérénissime la princesse de Nassau-Sarrebruck et se rapportait à l'éducation de ses enfants. Diderot ne rencontra pas cette princesse avant 1765 ". Il lui soumit sa dédicace par les bons offices de Grimm, peu avant le milieu de juin 1758, sans avoir, apparemment, abordé plus tôt ce sujet. La princesse l'accepta avec reconnaissance - elle n'était pas, après tout, une très grande souveraine - dans un chatoiement frémissant de la rhétorique gracieuse du xXVIII siècle ". La lettre dédicatoire de Diderot est, avant tout, une exhortation à la vertu et sent un peu la poussière d'une vitrine académique, quoique Voltaire la regardât comme un chef-d'ouvre d'éloquence ". Il est vrai que Diderot ne pouvait aborder un sujet sans y laisser l'empreinte de sa personnalité. Il ne fait point le flagorneur ni le lèche-bottes. Mettant dans la bouche de la princesse les sentiments qu'il professe et qui sont aussi, pense-t-il, ceux de cette dame, il dit : « Je veux qu'ils connaissent la misère, afin qu'ils y soient sensibles et qu'ils sachent par leur propre expérience qu'il y a autour d'eux, des hommes comme eux, peut-être plus essentiels qu'eux qui ont à peine de la paille pour se coucher et qui manquent de pain ». Du point de vue de Rousseau, l'homme est bon à l'état de nature, aussi est-il important, pour comprendre la position politique de Diderot, de savoir que dans cette lettre, il parle avec réserve de l'homme à l'état de nature et le traite de « brute et sauvage ». Il déclare que les hommes n'auraient aucun besoin d'être gouvernés, s'ils n'étaient pas méchants. Diderot pense que la princesse devrait apprendre à ses enfants « que la puissance ne donne pas la paix de l'âme et que le travail ne l'ôte pas. (...) Il n'y a d'habitude que vous puissiez contracter sans crainte pour l'avenir, que celle de la vertu. Tôt ou tard les autres sont importuns " ». Le manuscrit de l'épître dédicatoire contenait un passage que la princesse désirait vivement voir supprimé. On comprend aisément pourquoi. Diderot avait en effet mis dans sa bouche ces paroles qu'elle adressait à ses enfants : « Je me garderai bien de médire de la volupté (...). Son but est trop auguste et trop général. Je vous en parlerai comme si la nature m'entendait. Ne serait-elle pas en droit de répondre à celui qui médirait de la volupté : Taisez-vous, insensé ! croyez-vous que votre père se fût occupé de votre naissance, que votre mère eût exposé sa vie pour vous la donner, sans ce charme inexprimable que j'avais attaché à leurs embrassements. C'est le plaisir qui vous a tiré du néant " ». Même pour le xviir siècle, c'était aller un peu loin. En octobre 1758, Le Père de famille était sous presse et Diderot était extrêmement impatient de le voir paraître. Le docteur Lavirotte, régent de la Faculté de médecine, ami de Diderot et auteur de l'article « Docteur en médecine » de l'Encyclopédie, était le censeur délégué par Malesherbes J'. « Je voulais cependant envoyer l'un et l'autre (la pièce et le discours De la Poésie dramatiquE) à M. de Malesherbes, rapporte Lavirotte. Mais M. Diderot m'a tellement pressé, et il est si impatient de voir son ouvrage imprimé, qu'il l'a emporté sur-le-champ " ». Malesherbes informa assurément Lavirotte qu'il faudrait faire quelques changements dans la pièce et dans l'essai qui l'accompagnait avant qu'ils soient autorisés à paraître. Il écrivit au censeur que même dans un essai sur l'art dramatique Diderot ne pouvait apparemment écrire sans nommer le gouvernement et la religion en deux ou trois endroits ". Lavirotte, lui, ne pensait pas qu'il serait facile de convaincre Diderot de faire des corrections. « Je veux seulement vous prier d'observer que personne n'aura assez de crédit sur l'esprit de M. Diderot pour le déterminer à ces suppressions et à ces changements. Il ne s'y résoudra que par les ordres les plus absolus " ». Diderot fit quelques changements, mais à contrecour. « Voilà les cartons que vous avez exigés. Les choses qui vous offensaient ont été supprimées ; et celles qui vous paraissaient dures, adoucies " ». Mais Diderot essaya de sauver, de son crayon bleu, un passage du second acte où le père de famille se rappelle la prière qu'il a faite à la naissance de son fils. Malesherbes objecta qu'une référence à Dieu, dans la bouche de Diderot, paraîtrait hypocrite. « Comment voulez-vous qu'on m'accuse d'hypocrisie ? Je ne suis pas plus le Père de famille que le Commandeur ; et si l'on se souvient de moi quand on me lira, il faut que l'ouvrage soit bien mauvais ». Apparemment Diderot sut persuader Malesherbes de laisser le passage tel qu'il était : « Mon fils, il y aura bientôt vingt ans que je vous arrosai des premières larmes que vous m'ayez fait répandre. Mon cour s'épanouit en voyant en vous un ami que la nature me donnait. Je vous reçus entre mes bras du sein de votre mère ; et vous élevant vers le ciel, et mêlant ma voix à vos cris, je dis à Dieu : " O Dieu ! qui m'avez accordé cet enfant, si je manque aux soins que vous m'imposez en ce jour, ou s'il ne doit pas y répondre, ne regardez point à la joie de sa mère, reprenez-le . " » Cette querelle à propos d'une prière plongea Diderot dans un remarquable accès d'humeur. « J'ai vu l'homme hier au soir chez le marquis de Croismare, écrivait Lavirotte à Malesherbes vers le 19 octobre ; il était dans si un violent désespoir que nous craignions qu'il ne se jetât par la fenêtre " ». La lettre de Diderot à Malesherbes, datée du 20 octobre, porte les marques d'une puissante émotion : Cette prière est vraie. Elle est simple. Elle est pathétique. Elle est placée. C'est le sentiment de monsieur de Saint-Lambert. C'est celui de monsieur d'Argental. Celui-ci en a été touché, et le premier m'a dit qu'on n'imaginait point ces traits-là sans génie. Je conviens, Monsieur, que l'amitié qu'ils ont pour moi les a rendus excessifs dans leur éloge. Mais j'ai fait essai de ce morceau sur d'autres personnes. Ma femme est une bonne femme qui ne manque ni du sens ni de goût, et il lui a fait plaisir (...). Mais daignez considérer ma situation. Voyez que depuis dix ans, depuis trente, je bois l'amertume dans une coupe qui ne s'épuise point. J'ai souffert, je crois, tout ce qu'il plaît au sort de nous faire souffrir, et j'étais né d'une sensibilité peu commune. Le mal présent rappelle le mal passé. Le cour se gonfle. Le caractère s'aigrit ; et l'on dit et l'on fait des folies. Si cela m'est arrivé, je vous en demande mille pardons. Comme Diderot finissait sa lettre, son libraire lui apporta la nouvelle que Malesherbes avait nommé un nouveau censeur. Ce serait encore pis, écrivait Diderot, car le nouveau exigera de nouveaux changements, donc de nouveaux cartons, le tout aux frais de Diderot. « Monsieur, ayez la bonté de révoquer un ordre injurieux à un censeur que vous estimez, et qui va m'être ruineux (...). Monsieur, ne me ruinez pas. Ne me perdez pas * ». Pourtant Malesherbes envoya le livre non pas à un nouveau censeur mais à deux ". Les censeurs, cependant, devenaient très réservés, conscients des embarras qui accablaient l'infortuné censeur du livre d'Helvétius, d'une part, et de l'espèce d'intimidation dont les menaçaient les philosophes d'autre part. Un des censeurs désignés par Malesherbes se désista pour la première raison w. Le second, nommé Bonamy, écrivait Je 29 octobre : « Je dirai au libraire que j'ai eu l'honneur de vous renvoyer l'ouvrage comme étant au-dessus de mes forces et de mes lumières pour en porter mon jugement, ce que j'avoue être vrai. Mais comme je ne demande que paix et aise, et que je ne veux pas avoir d'affaire à démêler avec des gens qui s'imaginent avoir seuls en partage la raison humaine, j'ose me flatter que vous me tiendrez la parole que vous avez eu la bonté de me donner de ne point me compromettre avec eux, car je les appréhende autant que les théologiens ." ». Après toutes ces tracasseries, Malesherbes fut trop heureux de laisser paraître Le Père de famille sans autre changement. Malgré la censure, Diderot avait eu gain de cause. Peu de temps après, Diderot eut une autre aventure avec le directeur des publications. Cette affaire - l'affaire des dédicaces - était un vrai mystère et le reste encore dans une large mesure. Malesherbes en parle comme de l'affaire la plus contrariante et la plus fâcheuse qui ait eu lieu pendant tout le temps de son administration et le coupable aurait été à coup sûr puni avec sévérité si Malesherbes avait connu avec certitude l'auteur de la supercherie -'". Voici les faits : deux pièces de Goldoni, traduites anonymement par deux amis de Diderot, devaient paraître aussitôt après Le Père de famille. Il VeroAmico, la pièce que Diderot avait prétendument plagiée, avait été traduite par Forbonnais, qui avait écrit pour V Encyclopédie des articles admirés sur le commerce et les transactions commerciales. Il Padre difamiglia était traduit par Deleyre, le jeune journaliste qui, cette même année, s'était donné tant de mal pour réconcilier Diderot et Rousseau. Ces traductions généralement reliées en un seul volume - si on peut le trouver car il est très rare - soutenaient la comparaison avec le texte original. Elles étaient fidèles et d'un ton familier. Rien n'était supprimé, bien qu'assez souvent des phrases fussent ajoutées, particulièrement pour servir de transition entre les scènes. Aucun effort n'était fait pour altérer Il Vero Amico dans un sens favorable à Diderot. Quant au Padre di famiglia, il était tellement éloigné, sauf pour le titre, du Père de famille qu'il ne saurait être question d'emprunt. Ces pièces passaient pour avoir été imprimées à Avignon et se vendaient à Liège chez Etienne Bleichnarr. Il n'y avait pas d'Etienne Bleich-narr. Son nom veut dire en allemand : « pâle sot » ; ce n'était donc qu'un jeu de mots sur Palissot, le pire ennemi des encyclopédistes et l'auteur des Petites Lettres sur de grands philosophes. De plus, chacune des deux pièces portait en épigraphe une citation latine, longue et énig-matique, et une dédicace, l'une à la comtesse de ***, l'autre à la princesse de ***, d'un style fleuri, insinuant, ambigu, et probablement insultant ". Presque aussitôt après la parution, deux dames de haut rang envoyèrent une plainte à Malesherbes. Elles étaient bien connues comme ennemies des philosophes. La comtesse de La Marck, née Noailles, prétendait être désignée dans la dédicace du Véritable Ami ; la princesse de Robecq (fille du maréchal de Luxembourg, et qui avait été récemment la maîtresse du duc de ChoiseuL), par la dédicace de la traduction du Padre difamiglia. Selon le code du savoir-vivre au XVIIIe siècle, les allusions personnelles défavorables, même voilées ou insignifiantes, faites dans la presse ou sur scène étaient considérées comme un affront grave. C'était une des conséquences indirectes de la censure : chacun supposait que si de telles attaques étaient autorisées à paraître, c'est qu'elles étaient tacitement approuvées par le gouvernement. Toutes ces situations revenaient à une question d'apparence. Si quelqu'un perdait la face, on engageait le combat pour voir quel parti jouissait du plus grand crédit public dans son effort pour la retrouver. C'est pourquoi d'Alembert se montrait si sensible aux allusions faites dans la presse, alors qu'il aurait été plus sage, semble-t-il, de les ignorer. Dans le cas qui nous occupe, Malesherbes, se conformant à ce code social, prit grandement ombrage de l'incident des dédicaces, et entreprit des recherches précises pour découvrir qui les avait écrites et qui portait la responsabilité de leur publication. Malesherbes fut rapidement convaincu de l'innocence des traducteurs, Deleyre et Forbonnais. La piste suivante menait à Diderot, qui avait détenu pendant quelques jours le manuscrit des traductions, mais qui assurait avec insistance qu'ils ne comportaient aucune dédicace ni quand ils étaient parvenus entre ses mains ni quand ils en étaient sortis a. La comtesse de La Marck avait supposé que Diderot était le coupable. D'Hémery notait dans son journal qu'elle était dans une rage furieuse contre Diderotsî. Diderot alla la voir et s'arrangea, on ne sait comment, pour l'apaiser. Peut-être la « bouche d'or ». Pourtant il fallut probablement quelque chose de plus substantiel, car d'après le récit que Palissot fit à Voltaire, Mme de La Marck s'assura une confession signée de Diderot ". Puis par une lettre plaisante par sa graphie phonétique, elle informa Malesherbes qu'elle était satisfaite, et que Mme de Robecq et elle-même désiraient qu'il ne pousse pas l'affaire plus avant ". Malesherbes, dans sa réponse, fit valoir qu'outre une offense légale, des offenses morales avaient été commises : on avait tenté de le tromper lui, le magistrat responsable, et de désigner des innocents, Deleyre et Forbonnais, comme coupables. « Ainsi, Madame, je vous supplie de faire dire à ces auteurs des dédicaces, puisqu'ils se sont fait connaître de vous, qu'ils n'ont qu'à me faire aussi leur confession et je vous promets qu'ils n'éprouveront de ma part que la mésestime qu'entraîne nécessairement leur procédé. » Mais s'ils ne se confessaient point à lui, il remettrait les pièces entre les mains de M. le lieutenant général de police M. Là-dessus Forbonnais insista auprès de Malesherbes pour que quelqu'un reconnaisse publiquement et explicitement la responsabilité des traductions dans leur entier. Autrement, écrivait-il, lui et Deleyre seraient injustement soupçonnés d'être responsables des dédicaces. Si cela n'était pas fait, lui et Deleyre en appelleraient à la loi et l'affaire deviendrait un scandale public ". Forbonnais écrivait ensuite que des témoins avaient vu un laquais au service de Grimm laisser un exemplaire des traductions imprimées à la porte du logement de Forbonnais. La lettre de Forbonnais fit que Malesherbes écrivit à nouveau à la comtesse de La Marck : « C'est vous, Madame, qui avez mis Diderot à la raison, d'abord par crainte et ensuite par l'admiration et la reconnaissance que la noblesse de vos procédés lui ont inspirées. » Malesherbes expliquait les difficultés qu'il rencontrait avec Forbonnais et faisait entendre à la comtesse qu'elle était la seule personne qui pouvait lui donner satisfaction 58. Evidemment Malesherbes insinuait qu'elle devrait persuader Diderot de prendre publiquement la responsabilité de l'affaire. De toute façon, que ce fût Mme de La Marck ou Forbonnais qui l'ait persuadé, c'est ce que fit Diderot. Ce fut ce dernier qui transmit à Malesherbes copie d'une lettre dont Forbonnais avait fait le brouillon et que Diderot avait signée ". C'est ainsi que parut dans le numéro de novembre de L'Observateur littéraire, et le numéro de décembre du Mercure de France, la notice suivante : Des personnes mal informées. Monsieur, ayant répandu que la traduction imprimée du Père de famille de Goldoni avait été faite par M. Deleyre et celle du Véritable Ami par M. de Forbonnais, la connaissance que j'ai eue de ces deux traductions m'oblige de déclarer que celles qui paraissent sont très différentes ; et il est constaté que ni l'un ni l'autre n'a eu pan à l'édition de ces ouvrages. Je suis, etc. Diderot *5. Paris, 21 novembre 1758. On remarquera que Diderot, bien qu'il mette Deleyre et Forbonnais hors de cause, ne donne aucune indication sur le coupable. L'hostile Palissot assura Voltaire que c'était Diderot lui-même, mais Voltaire répliqua qu'il ne pouvait le croire". Grimm, commentant la lettre de Voltaire, dit à ses correspondants que d'Argental, poussant les recherches plus avant pour Voltaire, avait été informé par Mme de La Marck qu'ayant eu entre les mains la confession signée, elle l'avait immédiatement brûlée et que le secret mourrait avec elle a. Il y eut dans toute cette affaire un air de mystère qui persista jusqu'au bout. Malesherbes écrivait plus d'un an après au lieutenant général de police : « Cette affaire reste impunie par manque de preuve », ajoutant qu'il existait de fortes présomptions mais pas de certitude * En fait, le coupable était Grimm. Le calembour allemand sur le nom de Palissot, le laquais déposant un exemplaire des traductions à la porte de Forbonnais, le désignaient assez. Un bibliophile du xtxe siècle, A. A. Barbier, assurait que Grimm en était l'auteur, que Diderot avait pris la faute sur lui, que les grandes dames l'avaient bientôt appris et que l'affaire n'avait pas eu d'autres conséquences M. Mais tout cela demeura hypothétique jusqu'à la découverte et la publication récente d'une lettre de Diderot à Grimm, écrite plus de vingt ans après l'incident, qui ne permet plus de douter que Grimm fût l'auteur réel des dédicaces ". Pourquoi Diderot se chargea-t-il alors de la faute ? Ce fut peut-être une décision réellement héroïque. Pourtant dans ce cas très confus, on ne peut que spéculer sur ce qu'ont été ses motifs. L'une de ces raisons pouvait être que son ami Grimm, étant étranger, aurait pu subir un châtiment extrêmement sévère, tel que l'expulsion, ce qui pour Grimm, eût été un désastre, sur les plans professionnel et personnel. Nous aimerions croire que la conduite de Diderot fut simplement le résultat d'une générosité courageuse, mais compte tenu des pressions innombrables et variées qu'il dut subir, il est impossible de dire avec assurance pour quelle raison il agit ainsi. On doit encore poser une autre question, fort grave en vérité. A quel point était-il coupable, du point de vue de la probité dont il parlait sans cesse ? Deux hommes dont Diderot connaissait l'innocence et qui se considéraient comme ses amis étaient compromis, sans le savoir, dans cette intrigue. Diderot essaya-t-il de les faire paraître responsables d'avoir écrit les dédicaces ? Bien qu'il protégeât son ami Grimm, Diderot a pu commettre sous ce rapport une faute morale, car il est attesté que ce fut seulement sous la contrainte qu'il innocenta Forbonnais et Deleyre. C'était donc peut-être à cet incident que Deleyre pensait lorsqu'il disait, dans une lettre à Rousseau, qu'il avait découvert un faux sage parmi les philosophes et que ce faux sage l'avait dupé *. La conduite de Diderot fut certainement ambiguë - peut-être louable, peut-être coupable. Peut-être aussi - car c'était un homme enclin aux raisonnements subtils quand il s'agissait de cas de conscience - dévoilait-il ici que sa première éducation morale avait été faite par les jésuites qu'on accusait depuis longtemps d'être de fieffés sophistes en semblable matière *. Diderot a souvent montré dans ses écrits et dans ses lettres qu'il était conscient des ambiguïtés réelles et permanentes de la vie, dans l'action comme dans la pensée. Il écrivit sa pièce de théâtre la plus vivante sur ce thème. Le héros, Hardouin, est une image de Diderot tel qu'il se voyait lui-même, homme affable et obligeant qui, pour le meilleur des motifs, s'engage dans la conduite la plus douteuse et la plus ambiguë. Dans la scène finale, on pose la question qui donne son titre à la pièce, Est-il bon ? Est-il méchant ? et Diderot-Hardouin répond : « L'un après l'autre ». On peut poser la même question sur le rôle joué par Diderot dans l'affaire des dédicaces : Est-il bon ? Est-il méchant ? La réponse est peut-être la même. |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Denis Diderot (1713 - 1784) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Denis Diderot | |||||||||
Biographie / Ouvres |
|||||||||