Dominique Pagnier |
Du bordel rue Perdue, elle n'a gardé que la lampe rouge sous quoi hésitaient avant d'y entrer des clercs d'une propreté répugnante. Elle en a fait la veilleuse à la sorte d'oratoire qu'elle dresse sur sa table de toilette pour méditer le sacrement de son corps et la déchéance à quoi son penchant pour le sucre la mène depuis qu'elle s'est retirée des affaires. Aucun crâne ne relève sa beauté; seul un vieux crucifix lui fait envier sa maigreur. Chaque samedi vers minuit apparaît dans le miroir, pris de vin, menaçant et pas rasé, le Ressuscité qui veut la remettre au travail et qui lui réclame un supplément d'aromates pour couvrir son odeur de venaison. Quand le lendemain, par les vapeurs matinales, elle se hâte de lui porter ses économies, un jardinier lui dit de cesser de trembler. Dans la poche de son tablier de toile bleue, il cache ses mains sur quoi ont pris des greffons de rosiers mais son chapeau de paille percé par où passent les courants d'air prouve bien qu'il est l'authentique seigneur. Elle est alors figée dans une médaille violette avec au fond les monts d'Anti-Liban. |
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Dominique Pagnier (1951 - ?) |
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Portrait de Dominique Pagnier | |||||||||