Edouard Glissant |
La scie va dans le bois, Le bois est séparé Et c'est la scie ui a cné. Sur le toit d'ardoise Il y a le ciel. Le ciel est vague Et l'on s'y noie. On était tenté de toujours grandir Et les nuages nous conseillaient De les écraser, de les dépasser, D'aller dans le clair, dans le toujours clair. Les oiseaux dans la gorge Ont gardé leur constance Au printemps de plu3 tard. La petite truite, Grosse comme un canif, Ne trouve plus sa pierre Dans le grand ruisseau. * Tous les crustacés Qui ont tant de noms Et bien plus encore De couleurs, de formes, Ils ne savent pas Qu'il y a la mer. Ce qui ressemblait à la bien-aimée C'était la tige des blés tant pressés de mûrir Quand le soleil pensait déjà à s'incliner. Caressant les arbustes Au niveau de leur greffe Dont ils ne souffrent plus qu'en rêve. * Les boufs, les veaux, les vaches Ont besoin de dormir davantage que d'autres, Tant ils savent leur chair. Un fagot fait un lit Mais plutôt pour souffrir De tout ce qui n'a pas le goût D'un brin de bois. On ramasse une enfant qui grelottait le soir Dans la rue sans beauté plus rouge que ses doigts Et de l'avoir lavée On n'a plus rien à faire. Ce n'était pas Une aile d'oiseau. C'était une feuille Qui battait au vent. Seulement, Il n'y avait pas de vent Avoir vu Tout au fond De sa main, Dans l'étang, De petits hommes Qui remuaient. * Pour viatique on eût pris, De peur des galaxies, Un biscuit racorni Rogné par les souris. * La vitre vers le froid Tremblait pour la beauté Que le givre ferait sur elle Avant l'aurore. * Rien ne sert de bouder la lune Ou de rêver La tenir contre soi Pendant les nuits d'été. Elle est parfaite Et va. Il faudrait voir plus clair Pour voir tous les objets Gomme entre eux ils se voient. Un pré en pente, intelligent, Qui s'étonnait de mériter La gentillesse de l'aubépine. * Deux roses qui partaient, qui s'en retournaient. Qui étaient presque autant que mortes Et que le temps laissait S'accoler pour finir. * C'était un jour A la gloire de l'herbe. En ce temps-là, Il y avait vraiment Des violettes. Lune, Pour les rapts Et les recels. * Dans le moulin qui n'était pas utilisé, Où le silence avait défait Ce qui rouille et ce qui s'effrite, Il restait dans un sac juste assez de farine Pour y connaître la douceur entre les doigts. * S'il faut rendre compte Des beautés du monde, On n'oubliera pas Les moulins à vent Que le vent détraque Et qui nous oublient Pour le vent, l'aurore et la liberté. |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Edouard Glissant (1928 - 2011) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Edouard Glissant | |||||||||
Biographie / OuvresMort le 3 février 2011 à l'âge de 82 ans, Edouard Glissant était bien plus qu'un grand écrivain, auteur notamment de La Lézarde (Prix Renaudot 1958), Le Sel noir, L'Intention politique, La Case du commandeur, Pays rêvé, pays réel, Tout-monde. Il était surtout l'inventeur et théoricien, à la pensée parfois assez complexe, d'au autre monde qu'il appelait le Tout-monde, nourri des écrits et des lutte |
|||||||||