Edouard Glissant |
MONSTRES Il y a des monstres qui sont très bons, Qui s'assoient contre vous les yeux clos de tendresse Et sur votre poignet Posent leur patte velue. Un soir - Où tout sera pourpre dans l'univers, Où les roches reprendront leurs trajectoires de folles, Ils se réveilleront. FACE Pays de rocaille, pays de broussaille - rocs Agacés de sécheresse. Terre Comme une gorge irritée Demandant du lait, Femme sans mâle, colline Comme une fourmilière ébouillantée, Terre sans ventre, musique de cuivre : Face De juge. Du bouton de la porte aux flots hargneux de l'océan, Du métal de l'horloge aux juments des prairies, Ils ont besoin. Ils ne diront jamais de quoi, Mais ils demandent Avec l'amour mauvais des pauvres qu'on assiste. Il ne suffira pas de les mouiller de larmes Et de jurer qu'on est comme eux. Il ne suffira pas De se presser contre eux avec des lèvres bonnes Et de sourire. C'est davantage qu'ils veulent pour les mener à bien Où la vengeance est superflue. Des milliers d'yeux jaunes luisent dans la forêt. Me réclament le sang. Que je ferme un instant les yeux, Ils s'abattront sur moi, Ils me dissoudront dans l'humus Où depuis toujours Je sens mon odeur. |
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Edouard Glissant (1928 - 2011) |
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Portrait de Edouard Glissant | |||||||||
Biographie / OuvresMort le 3 février 2011 à l'âge de 82 ans, Edouard Glissant était bien plus qu'un grand écrivain, auteur notamment de La Lézarde (Prix Renaudot 1958), Le Sel noir, L'Intention politique, La Case du commandeur, Pays rêvé, pays réel, Tout-monde. Il était surtout l'inventeur et théoricien, à la pensée parfois assez complexe, d'au autre monde qu'il appelait le Tout-monde, nourri des écrits et des lutte |
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