Emile Verhaeren |
L'hiver, quand on fermait, A grand bruit lourd, les lourds volets, Et que la lampe s'allumait Dans la cuisine basse, Des pas se mettaient à sonner, des pas, des pas, Au long du mur, sur le trottoir d'en face. Tous les enfants étaient rentrés, Rompant leurs jeux enchevêtrés ; Le village semblait un amas d'ombres Autour de son clocher, D'où les cloches déjà laissaient tomber, Une à une, les heures sombres Et les craintes sans nombre : Paquets de peur, au fond du cour, Et malgré moi, je m'asseyais tout contre Les lourds volets et j'écoutais et redoutais Ces pas, toujours ces pas, Qui s'en allaient à la rencontre De je ne savais quoi d'obscur et de triste, là-bas. Je connaissais celui de la servante, Celui de l'échevin, celui du lanternier, Celui de l'âpre et grimaçante mendiante Qui remportait des blaireaux morts, en son panier ; Celui du colporteur, celui du messager, Et ceux de Pieter Hoste et de son père Dont la maison, près du calvaire, Portait un aigle d'or à son pignon léger. Je les connaissais tous : ceux que scandait la canne De l'horloger, ou bien les béquilles de Wanne La dévote, qui priait tant que c'était trop, Et ceux du vieux sonneur, humeur de brocs, Et tous, et tous - mais les autres, les autres ? Il en était qui s'en venaient - savait-on d'où ? - Monotones, comme un débit de patenôtres, Ou bien furtifs, comme les pas d'un fou, Ou bien pesants d'une marche si lasse Qu'ils semblaient traîner l'espace Et le temps infini aux clous de leurs souliers. |
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Emile Verhaeren (1855 - 1916) |
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Portrait de Emile Verhaeren | |||||||||
Biographie / OuvresEmile Verhaeren est né à Saint-Amand le 21 mai 1855. Fils d'une famille commerçante aisée, il appartient à la classe bourgeoise de ce village sur l'Escaut. Au sein de la famille, la langue véhiculaire est le français, mais avec ses camarades de classe de l'école communale et les habitants de Saint-Amand, il recourt au dialecte local. A onze ans, Verhaeren se voit envoyé au pensionn BibliographieChronologie |
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