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Emile Verhaeren



Les promeneuses - Poéme


Poéme / Poémes d'Emile Verhaeren





Au long de promenoirs qui s'ouvrent sur la nuit -
Balcons de fleurs, rampes de flammes -
Des femmes en deuil de leur âme
Entrecroisent leurs pas sans bruit.



Le travail de la ville et s'épuise et s'endort :
Une atmosphère éclatante et chimique
Etend au loin ses effluves sur l'or
Myriadaire d'un grand décor panoramique.



Comme des clous, le gaz fixe ses diamants

Autour de coupoles illuminées ;

Des colonnes passionnées

Tordent de la douleur au firmament.

Sur les places, des buissons de flambeaux

Versent du soufre ou du mercure ;

Tel coin de monument qui se mire dans l'eau

Semble un torse qui bouge en une armure.



La ville est colossale et luit comme une mer
De phares merveilleux et d'ondes électriques,
Et ses mille chemins de bars et de boutiques
Aboutissent, soudain, aux promenoirs de fer,
Où ces femmes - opale et nacre,
Satin nocturne et cheveux roux -



Avec en main des fleurs de macre,
A longs pas clairs, foulent des tapis

Ce sont de très lentes marcheuses solennelles
Qui se croisent, sous les minuits inquiétants,



Et se savent - depuis quels temps ?__

Douloureuses et mutuelles.



En pleurs encor d'un trop grand deuiL
Tels yeux obstinés et hagards
Dans un nouveau destin ont rivé leurs regards
Comme des clous dans un cercueil.



Telle bouche vers telle autre s'en est allée,
Comme deux fleurs se rencontrent sur l'eau.
Tel front semble un bandeau
Sur une pensée aveuglée.



Telle attitude est pareille toujours .
Dans tel cerveau rien ne tressaille,
Quoique le cour, où le vice travaille
Batte âprement ses tocsins sourds.



J'en sais dont les robes funèbres
Voilent de pâles souliers d'or
Et dont un serpent d'argent mord
Les longues tresses de ténèbres.

Des houx rouges de leur tourment
D'autres ont fait leurs diadèmes ;



J'en vois : des veuves d'elles-mêmes
Qui se pleurent, comme un amant.



Quand leurs rêves, la nuit, s'esseulent
Et qu'elles tiennent dans la main
Le sort banal d'un être humain,
Elles savent ce qu'elles veulent.



Si leur peine devait finir un jour,
Elles en seraient plus tristes peut-être,
Qu'elles ne sont inconsolables d'être
Celles du taciturne amour.



Au long de promenoirs qui dominent la nuit,
De lentes femmes,
En deuil immense de leur âme,
Entrecroisent leurs pas sans bruit.



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Emile Verhaeren
(1855 - 1916)
 
  Emile Verhaeren - Portrait  
 
Portrait de Emile Verhaeren

Biographie / Ouvres

Emile Verhaeren est né à Saint-Amand le 21 mai 1855. Fils d'une famille commerçante aisée, il appartient à la classe bourgeoise de ce village sur l'Escaut. Au sein de la famille, la langue véhiculaire est le français, mais avec ses camarades de classe de l'école communale et les habitants de Saint-Amand, il recourt au dialecte local.

A onze ans, Verhaeren se voit envoyé au pensionn

Bibliographie


Chronologie


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