wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 
left_old_somall

Essais littéraire

right_old_somall

ANALYSE de «JEAN-CHRISTOPHE» Romain ROLLAND






Deux ans avant sa mort, en 1942, Romain Rolland, philosophe, romancier, mémorialiste, musicologue, pacifiste, humaniste et même communiste, témoin lucide de son temps, écrivait à un autre nom célèbre de la littérature française, Paul Claudel, ces quelques lignes:

«J'ai été beaucoup lu, très peu compris. Que j'en ai vu passer d'équipes de compagnons d'une heure, qui me voulaient l'esclave de cette heure, et s'indignaient que mon aiguille, obéissante à la loi, continuât de faire le tour du cadran!» '

Aujourd'hui il est moins lu que de son vivant, et peut-être tout aussi incompris, car «sur son ouvre pèse le poids d'une vie qu'on a volontiers qualifiée d""héroïque".»



Romain ROLLAND (1866 - 1944)



Né à Clamecy en 1866, fils d'un notaire, issu d'une famille bourgeoise de tradition protestante et républicaine. Romain Rolland fera d'excellentes études à l'École normale supérieure de Paris. Il s'intéresse à l'histoire et à la philosophie. Il se passionnera pour les grands écrivains russes, Dosloïcvsky, Tolstoï, et pour les grands romanciers français: Stendhal, Flaubert. Devenu professeur d'histoire de l'art, il publiera les biographies de Beethoven, Michel-Ange, Tolstoï. Son Théâtre de la Révolution comprend les pièces: les Loups, le Triomphe de la raison. Danton, le Quatorze Juillet. Entre 1904 et 1912 il élabore son vaste roman Jean-Christophe, inaugurant au XX-e siècle le genre du "roman-fleuve", tandis que Colas Breugnon, écrit en 1913. ne paraîtra qu'en 1919.



Pendant la Première Guerre mondiale il se retire en Suisse où il écrira Au-dessus de la mêlée, ouvre pacifiste, véritable appel à la lucidité et à la justice, texte qui lui attirera des haines violentes et de furieuses polémiques, et qui sera considéré par ses contemporains, à cause de ses idés pacifistes, comme une véritable trahison. Malgré cela, en 1916 on lui décerne le Prix Nobel pour la paix "" . Rentré en France en 1919, vivant en dehors des milieux littéraires ou mondains, il fonde en 1922 la revue Europe, s'intéresse à la philosophie mystique de l'Inde (l'hindouisme et la non-violence de Mahatma Gandhi, voulant «concilier la pensée de l'Inde et celle de Moscou»), st publie en 1930 la Vie de Vivekanada et l'Évangile universel. Son autre roman, l'Âme enchantée sera écrit entre 1922-1934. Il consacrera les dernières années de sa vie à rédiger son autobiographie: Le Voyage intérieur. Il mourra en 1944 à Vézelay, où il s'était retiré dès 1937, attristé par la nouvelle guerre mondiale qui avait commencé en 1939.



Principales ouvres

Théâtre de la Révolution: Les Loups (1898); Le Triomphe de la raison (1899); Danton (1900), Le 14 Juillet (1902): (drameS); Vie de Beethoven (1903); Jean-Christophe (roman, 10 volumes, 1904-1912); Vie de Michel-Ange (1905); Vie de Tolstoï (1911); Colas Breugnon (roman, 1919); L'Âme enchantée (roman, 5 volumes, 1922-1933); Péguy (1944).



ANALYSE de «JEAN-CHRISTOPHE» (1904-1912)



Jean-Christophe inaugure, comme nous l'avons déjà dit, le genre du roman-fleuve, ce roman "total" auquel Romain Rolland aspirait depuis des années. C'est un monument élevé à la «divine musique», par le récit d'une expérience humaine poursuivie depuis la naissance jusqu'à la mort. Dix volumes (l'Aube, le Matin, l'Adolescent, la Révolte, la Foire sur la place, Antoinette, Dans la maison, les Amies, le Buisson ardent, la Nouvelle JournéE) composent cette description de la vie d'un homme de génie, véritable Beethoven dans le monde d'aujourd'hui. C'est "un héros aux yeux cl au cour purs" que Romain Rolland a crée dans son roman. Jean-Christophe Krafft est né dans une petite ville au bord du Rhin, dans une famille modeste. Son grand-père et son père éiaicnt des musiciens, sa mère une modeste servante. L'enfant fait preuve d'une sensibilité extraordinaire, d'un véritable tempérament d'artiste. Nature mystique, il connaîtra plus lard l'extase. Selon les propres paroles de Beethoven «La musique esi la médiatrice entre la vie des sens et la vie de l'esprit.», et, dès son âge le plus tendre. Romain Rolland a éprouvé lui-même cette fascination de la musique, la fascination de "la forêt des sons" qu'il a inculquée à son héros.



Son héros connaîtra beaucoup de difficultés dans la vie. sera obligé de s'exiler en France à la suite d'une rixe . mais partout la "joie divine" de créer l'accompagnera. En France il se liera d'amitié avec Olivier Jeannin qui deviendra pour lui un véritable frère. L'Allemand et le Français, le musicien et le professeur, incarnent, dans la vision de leur créateur, l'unique âme des deux peuples, des deux cultures et des deux civilisations, qui, quelques années plus tard, s'égorgeront mutuellement sur les champs de bataille de la Première Guerre mondiale. C'est Olivier qui révélera à l'Allemand Christophe le vrai visage de la France, cette France du travail et de la souffrance, cette élite qui transmettra aux générations suivantes l'idéal de la liberté et de la recherche, du courage et du dévouement, la France du peuple et non pas celle de la caste corrompue des politiciens et des viveurs.

Dans leur modeste appartement au cinquième étage d'une vieille maison, les deux amis qui se complétaient et s'enrichissaient réciproquement, apportaient les choses les plus précieuses: les trésors moraux, spirituels et culturels de leurs peuples respectifs. Leur amitié, à l'époque de l'affaire Dreyfus, revêt une signification symbolique. C'est l'amitié entre l'élite spirituelle, et non pas superficielle, des deux peuples, allemand et français, c'est une bénédiction pour ces deux âmes-sours, car sans Olivier. Christophe, qui ignorait tout de la vie profonde, authentique, de la France, aurait pu s'en faire une image toute fausse. Malheureusement, quelque temps plus tard Olivier sera tué. Christophe vieillira et, lentement, s'identifiera lui aussi à la grande vie universelle, au silence divin des espaces infinis.

Le nom du héros est symbolique: en grec Christophoros signifie Porte-Christ. Selon une vieille légende c'était un géant qui, un jour, sans le savoir, avait porté sur ses épaules, pour l'aider à traverser un fleuve, un enfant qui n'était autre que l'Enfant Jésus. Romain Rolland s'est emparé de cette légende et en a fait la "charpente" mystique de son roman, celle, surtout, qu'il dévoilera dans le dernier volume:

«Saint Christophe a traversé le fleuve. Toute la nuit, il a marché contre le courant. Comme un rocher, son corps aux membres athlétiques émerge au-dessus des eaux. Sur son épaule gauche est l'Enfant, frêle et lourd. Saint Christophe s'appuie sur un pin arraché, qui ploie. Son échine aussiploie.[ ...] Dans le bruit du torrent, il n'entend que la voie tranquille de l'Enfant, qui tient de son petit poing une mèche crépue sur le front du géant, et qui répète: « Marche!»...

... Soudain, l'angélus tinte, et le troupeau des cloches s'éveille en bondissant. Voici l'aurore nouvelle! Derrière la falaise, qui dresse sa noire façade, le soleil invisible monte dans un ciel d'or. Christophe, près de tomber, touche enfin à la rive. Et il dit à l'Enfant: «Nous voici arrivés! Comme tu étais lourd! Enfant, qui donc es-tu?»

Et l'Enfant dit: «Je suis le jour qui va naître.»



TEXTE

JEAN CHRISTOPHE ET LE COUVREUR



Cinq étages, une vieille maison branlante ' qui s'inclinait sur le côté, avec ses planchers qui craquaient " et ses plafonds vermoulus ' . La pluie entrait chez Christophe et Olivier qui logeaieni sous le toit; on avait dû se décider à faire venir les ouvriers, pour rafistoler tant bien que mal la toiture: Christophe les entendait travailler et causer, au-dessus de sa tôle. Il y en avait un qui l'amusait et l'agaçait: il ne s'arrêtait pas un instant de parler tout seul, rire, chanter, ci dire des balivernes . siffler des inepties ", causer avec soi-même, sans cesser de travailler; il ne pouvait rien faire sans annoncer ce qu'il faisait: «je vas " encore mettre un clou; où est-ce qu'est mon outil? J'en mets deux. Encore un coup de marteau! Là, ma vieille, ça y est...».



Lorsque Christophe jouait, il se taisait un moment, écoutait, puis sifflait de plus belle; aux passages entraînants, il marquait la mesure sur le toit, à grands coups de marteau. Christophe, exaspéré, finit par grimper sur une chaise et passa la tête par la lucarne de la mansarde pur lui dire des injures. Mais à peine l'eut-il vu, à califourchon145 sur le toit, avec sa bonne figure joviale, la joue gonflée de clous, qu'il éclata de rire, et l'homme en fit autant. Christophe, oubliant ses griefs , se mit à causer. A la fin, il se rappela pourquoi il s'était mis à la fenêtre: «Ah! à propos, dit-il, je voulais vous demander: est-ce que mon piano ne vous dérange pas?» L'autre l'assura que non; mais il le pria de jouer des airs moins lents, parce que, comme il suivait la mesure, cela le retardait dans son travail. Us se quittèrent bons amis. (En un quart d'heure, ils avaient échangé plus de paroles que le musicien n'en avait dit, en six mois, à tous ceux qui habitaient la maison.)



Romain ROLLAND, Jean Christophe.



COMMENTAIRE



A Paris, dans le quartier Montparnasse, le musicien allemand Jean-Christophe habite avec ;on ami français Olivier Jeannin une vieille maison branlante qui s'inclinait sur le côté, dont les ilanchers craquaient et dont les plafonds étaient vermoulus. La pluie entrait chez eux cl les deux unis sont obliges de faire venir des ouvriers pour rafistoler (= réparer sommairemenT) le toit. Christophe, qui les entendait travailler et causer au-dessus de sa tête, était surtout amusé et agacé )ar un de ces ouvriers qui «ne s'arrêtait pas un instant de parler tout seul, rire, chanter [et] dire les balivernes, siffler des inepties, causer avec soi-même, sans cesser de travailler; il ne pouvait ien faire sans annoncer ce qu'il faisait». Poussé à bout, le musicien, nature sensible et coléreuse, nonte à la fenêtre pour lui dire deux mots et mettre fin à ce martèlement, à ce véritable natraquage sonore. Mais à ce moment, en voyant sa figure joviale, sa bouche pleine de clous, il :e met à rire et engage une conversation avec l'ouvrier, oubliant ses griefs (- sa colèrE), ^'ouvrier, nature simple (pour s'en rendre compte il suffit de remarquer son langagE) mais lympathiquc, qui frappait sur le toit à grands coups de marteau, aimait lui aussi la musique «Lorsque Christophe jouait, il se taisait un moment, écoutait, puis sifflait de plus belle; aux mssages entraînants, il marquait la mesure sur le toit, à grands coups de marteau»), ce qui explique le changement d'attitude de Christophe. Lui, si énervé au commencement,, voudrait avoir maintenant si sa musique ne dérange pas l'autre. Ils se retrouvent maintenant, pour utiliser in terme moderne, sur la même longueur d'onde. Même si, pour Jean-Christophe, ce que ouvrier sifflait n'étaient que des inepties (n'oublions pas que le couvreur n'avait pas la même ormation musicale que le musicien allemanD), tous les deux aimaient la musique, chacun à sa açon, mais ils avaient trouvé ce langage commun, ce dénominateur commun: la musique, la «divine musique». C'est ce qui explique que l'ouvrier «marquait la mesure sur le toit, à grands coups de marteau». Bien que simple ouvrier, le couvreur était lui aussi un être sensible qui, de surcroît, aimait son travail («il le pria de jouer des airs moins lents, parce que, comme il suivait la mesure, cela le retardait dans son travail»). Ce quart d'heure de conversation avait permis à Christophe de se faire un autre ami. Lui, si isolé (car à l'exception d'Olivier il n'avait pas beaucoup d'amis à PariS), lui qui n'échangeait pas beaucoup de paroles avec ceux qui habitaient la maison, avait, en un quart d'heure de conversation avec cet homme qui, quelques minutes auparavant le dérangeait, parlé plus que pendant les six mois précédents.



LA VRAIE FRANCE

TEXTE DU MANUEL OFFICIEL



- Mon pauvre ami, dit Olivier, que sais-tu de la France?

Christophe cnuméra tous les Français qu'il avait vus dans le monde des riches: ... Belges, Luxembourgeois. Américains, voire ça et là quelques Français authentiques.

- C'est bien ce que je disais, réplique Olivier. Tu n'en as pas vu un seul ... des viveurs, des politiciens, des êtres inutiles, toute cette agitation qui passe, sans la toucher, au-dessus de la nation. Tu n'as vu que les guêpes qu'attirent les vergers abondants. Tu n'as pas remarqué les ruches laborieuses, la cité du travail, la fièvre des études.

- Pardon, dit Christophe, j'ai vu aussi votre élite intellectuelle.

- Quoi? deux ou trois douzaines d'hommes de lettres? En ce temps où la science et l'action ont pris une telle grandeur, tu n'as vu de la littérature que le théâtre de luxe. Les théâtres de Paris? Crois-tu qu'un travailleur sache seulement ce qui s'y passe? Pasteur n'y est pas allé dix fois dans sa vie! Tu n'as vu ni nos savants, ni nos artistes, ni le brasier brûlant de nos révolutionnaires. [...] Pour le peuple n'en parlons plus! [...] Où aurais-tu pu le voir? Combien de Parisiens as-tu connus qui habitaient au-dessus du second ou du troisième étage? Tu ne connais pas dans les pauvres logements, dans les mansardes, dans la province muette les cours braves et sincères, attachés pendant toute une vie à de graves pensées, à une abnégation quotidienne [...]. Tu ne connais pas le menu peuple économe, méthodique, laborieux, tranquille avec au fond du cour une flamme qui sommeille [...]. Tu t'étonnes de trouver un Français qui ne vit pas pour être heureux à tout prix, mais pour accomplir ou pour servir sa foi? Il y a des milliers de gens comme moi. et plus méritants que moi et qui jusqu'au jour de leur mort servent sans défaillance un idéal [.-]. Si tu ne les connais pas tu ne connais pas la France.



COMMENTAIRE



Habitant le quartier Montparnasse avec Olivier Jeannin, Jean-Christophe découvre la vraie France dont risque à chaque instant de le couper le conflit menaçant avec l'Allemagne. Dans de nombreuses discussions, Olivier lui révèle le vrai visage de son pays, car Jean-Christophe n'avait connu, selon les propres termes d'Olivier, que les couches les plus superficielles, seulement «des viveurs, des politiciens, des êtres inutiles, toute cette agitation qui passe, sans la toucher, au-dessus de la nation.» Il n'avait vu que les «guêpes» attirées par les vergers abondants, sans remarquer les "ruches laborieuses" où un peuple d'abeilles élabore dans le secret de la modestie ses ceuvres les plus grandioses, "la cité du travail, la fièvre des études". À la réplique de Christophe, qui prétendait avoir vu aussi l'élite intellectuelle française, Olivier lui répond que ces "deux ou trois douzaines d'hommes de lettres", le "théâtre de luxe", ce genre de spectacles destinés aux cires superficiels, ne constituent nullement la France intellectuelle, la France du travail. Christophe n'avait pas connu le menu peuple, tous ces gens modestes qui habitent au-dessus du second ou du troisème étage, il n'avait connu ni les savants français (le modèle le plus parfait est celui de Pasteur qui n'est pas allé dix fois dans sa vie dans les théâtres de luxe de Paris, car un homme qui travaille n'a pas le temps de le fairE), ni les véritables artistes, ceux qui dans l'espace de mille ans avaient donné à la France et au monde les cathédrales gothiques, ni les révolutionnaires qui avaient enrichi de leur sacrifice et de leur sang le monde.

Olivier dresse un véritable "inventaire" de tous ces êtres qui, à Paris ou dans la province modeste (= muettE), ces cours braves et sincères, attachés pendant toute une vie à de graves pensées, à une abnégation quotidienne, le menu peuple économe, méthodique, laborieux, tranquille, avec au fond du cour une flamme qui sommeille, vivent pour servir un idéal, un Dieu qui ne leur répond pas. Ce menu peuple, ces travailleurs anonymes, habitant dans de modestes mansardes, constituent la vraie France. Ce sont eux qu'il faut connaître pour connaître la France, la vraie / véritable France.



Autour du texte:

I- Présentez les aspects les plus importants de la vie de Romain Rolland.

2. Que savez-vous sur le roman Jean-Christophe?

3. Quel en est le personnage principal?

4. Sur quel symbolisme le nom du héros rcpose-t-il?

5. Où habite-t-il avec son ami français Olivier?

6. Quelle est la différence entre la France «entrevue» par Christophe et la «vraie France» telle qu'elle est décrite par Olivier?

1 . Quelles sont les classes / les castes corrompues, ajuste titre critiquées par Romain Rolland

(propos mis dans la bouche de son personnage OlivieR)? 8. Donnez quelques exemples de cette «vraie France» (France des savants, des artistes, des bâtisseurs, des gens simpleS).

Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.

Essais littéraire
A B C D E
F G H I J
K L M N O
P Q R S T
U V W X Y
Z        

mobile-img