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BOSCO - écrivains de notre époque






Il est des écrivains de notre époque, dans l'ouvre desquels apparaît, mais secrètement obscurci par un voile épais, un thème difficilement explorable, encore qu'universellement répandu, le grand thème de la nuit tellurique ou cosmique. Il est possible de le découvrir autour, au-dessous et au fond de nous, souvent sans que nous en ayons conscience, se dissimulant dans la moindre de nos rêveries, comme si la perception que nous en avons, même ja plus fugitive, entraînait toujours irrésistiblement notre pensée vers les régions les plus incertaines et, peut-être aussi, les plus redoutables de notre vie mentale. Ceci s'applique plus particulièrement à l'un des meilleurs romanciers de notre époque, Henri Bosco. Dans la plupart de ses écrits se laisse entrevoir toujours, sans qu'on puisse jamais en déterminer les limites, un paysage nocturne, celui d'une contrée anonyme, ténébreuse, couvrant, semble-t-il, l'ensemble des régions terrestres, d'abord et surtout dans ses profondeurs, mais aussi, graduellement, sur tous les points de sa sphère. Une nuit permanente y paraît régner sans partage, comme si, privée de soleil et d'étoiles, sans lumière céleste, une obscurité dense, mais faiblement tamisée, couvrait également les zones les plus hautes comme les plus basses de son univers, ou, pire encore, comme si les deux faces présentées habituellement par la réalité, la face éclairée et la face occulte, ne formaient ici qu'une seule et même nappe de noirceur ininterrompue, s'étendant dans le monde spirituel, aussi bien que dans le monde matériel : étrange univers apparemment unifié de haut en bas, mais plus exactement de bas en haut, où tout apparaîtrait dès l'abord comme fondu dans une indivisible masse indéterminée, à peine diversifiée par les remous d'indivisibles courants contraires : « Mouvements de vie, écrit Bosco, qui m'apportent les signes d'une création dont l'existence ne peut apparaître d'abord que comme inconnue. »



Univers donc plus négatif que positif, au moins dans sa source ou dans son aire originelle, car l'auteur ne laisse planer aucun doute sur le fait que c'est de sa partie proprement souterraine et inférieure que doit émaner, dès le début, dans les ténèbres, l'immense courant de vie destiné à se diffuser plus tard dans la clarté douteuse des régions supérieures : supposant ainsi que les ténèbres d'en bas, loin d'être l'effet d'une extinction ou diminution progressive de la lumière et de la vie, auraient été, au contraire, un foyer originel, vraie source, faite non de clarté mais de nuit, qui aurait engendré, à partir de la noirceur initiale, la vraie force, la vitalité première de l'univers : force, en elle-même, indéfinissable, indéterminable, parce que essentiellement négative, et qui, du fond même d'où elle émergeait, poursuivait sans fin vers le haut sa poussée ascensionnelle. Phénomène qui, toujours selon Bosco, ferait songer à des bulles d'air se détachant des eaux troubles pour monter à la surface, ou encore, poursuit-il, pouvant se comparer à « certaines marées attirées vers un espace rempli par la laiteuse clarté de la lune ».

Sans doute nous trouvons-nous ici moins en la présence d'une description purement physique que devant la transposition d'un phénomène idéal figurant quelque fait fondamental resté mystérieux, à moins qu'il ne s'agisse d'une interprétation mystique du phénomène général selon lequel l'univers se révèle à chaque aurore comme sortant des profondeurs de la nuit; mais ce qui importe ici, avant tout, c'est que, pour le poète qui en évoque les phases à partir de ses plus lointaines origines, ce passage troublant de la nuit au jour ne se trouve pas présenté dès l'abord comme un essor positif et triomphant vers un monde qui serait celui de la lumière, mais, inversement, comme le sur-gissement d'une énergie lumineuse originelle, non définissable, directement issue de la nuit elle-même, et communiquant à la surface quelque chose de « la noire force souterraine » indéterminée, émanant de celle-ci en secret.



Ainsi le jour apparaîtrait-il ici comme produit par celui qu'on reconnaîtrait comme son véritable créateur, et qui serait la nuit. Tel est le thème à demi dissimulé et à demi révélé, qui semble secrètement impliqué dans toute l'ouvre de Bosco, prolongeant ainsi, sans le dire, de très vieilles rêveries de la pensée occulte. Selon celle-ci, semble-t-il, tout aurait eu lieu et continuerait secrètement, depuis toujours, d'avoir lieu, sous l'aspect d'une force sacrée, mais non nécessairement ni sainte, ni religieusement inspirée, qui, émanant des profondeurs obscures et apportant à la surface l'ardeur conçue ou puisée par elle dans les tréfonds de la nature occulte, amènerait à la lumière du jour une autre lumière conçue ou acquise pendant la traversée de la nuit.

Ce serait d'elle enfin, ou des dieux cachés poursuivant leur travail dans ses profondeurs, que proviendraient les soulèvements des forces souterraines, les poussées obscures de la terre, la montée des plantes et des fièvres, l'activité, secrète d'abord, puis révélée au grand jour, des sèves et des lymphes, des glandes et des bourgeons, et enfin l'ascension irrésistible de toute vie profonde s'étant formée dans le mystère et faisant ensuite irruption à la surface. Partout se manifesterait l'activité vivifiante des dieux cachés, ouvrant à partir de la nuit vers le jour.



BOSCO : TEXTES



L'eau était devenue l'élément fluide le plus dense de la montagne souterraine. Son opacité et sa consistance insolites en faisaient comme une madère inconnue et chargée de phosphorescences dont n'affleuraient à la surface que de fugitives fulgurations. Signes des puissances obscures au repos dans les profondeurs, ces colorations électriques manifestaient la vie latente et la redoutable puissance de cet élément encore assoupi.



Une lente mais progressive animation s'épandait à travers mon corps et, pénétrant plus loin encore, éveillait l'être assoupi de mon âme à l'existence. J'éprouvais l'impression étrange que mes facultés, une à une, cherchaient en tâtonnant leur place habituelle dans cette conque encore creuse...



Je perdis le pouvoir de me distinguer de moi-même et je ne fus plus que ce que j'étais, la terre, les arbres, l'air calme, et la voûte même du ciel, inflexible et fatale, ayant incorporé cette faible parcelle de mon être à leur unité anonyme.



La terre communique à mon sang la vie secrète de sa minérale substance. C'est la terre qui vient à moi. Et je me console de ma solitude en essayant d'entendre l'imperceptible bruissement de ses métamorphoses.



Quelquefois la vie mystérieuse de ces fonds montait à la surface, qui s'agitait, et une ondulation soulevait les eaux hautes qui la propageaient jusqu'aux bords en bourrelets puissants... J'étais seul, immobile au centre de cette ruée liquide, qui croissait à mes pieds de minute en minute, sous la poussée des crues torrentielles. Cependant je sentais en moi la lente ascension d'une force impersonnelle, comme si la puissance et la grandeur fluviales m'eussent pénétré à leur tour de leur sauvagerie, jusqu'à faire de moi une créature du fleuve... Je faillis me perdre à moi-même...

Je descends maintenant avec Déméter dans les profondeurs de la terre. Ici les divinités telluriques entretiennent et chauffent les vapeurs qui s'élèvent du sein de la matière... Par elles seulement nos cours communiquent au dieu, le Dionysos souterrain. - De Zeus, il tient l'étincelle; de sa mère Perséphone, la puissance germinative, ténébreuse et lente poussée des semences ensevelies dans le sein tiède de la terre.



... Cette nuit-là, la puissance latente de la terre exaltée par les feux de l'été cherchait une issue à sa surabondance. Du sol, qu'électrisaient le passage et le frottement des nappes de chaleur, aux veines cachées de l'argile s'évaporait, par brûlantes bouffées, l'effluve de cette puissance de la terre. Les vapeurs montaient du cour même de l'être enseveli, et elles traînaient de longues ténèbres.



Dès mon plus jeune âge, j'ai été sensible à ces mouvements obscurs de la vie; et cette nuit-là, la puissance latente de la terre exaltée par les feux de l'été cherchait une issue à sa surabondance... Les vapeurs montaient du cour même de l'être enseveli... Mes ombres remuaient en moi à l'approche lente et sournoise des forces souterraines.



La terre fermente; du sol, la poussée s'élève et chasse les eaux; les sources cherchent la lumière; plus lents, les mouvements ascensionnels des lymphes végétales drainent la force des racines vers le monde mouvant des feuilles qui vivent d'air et de clarté. Toutes les puissances latentes de ces lieux étranges s'éveillent et se concentrent sous la terre. A chaque pas qu'on fait répond un écho souterrain.



L'être profond de la terre est attiré soudain du plus noir de ses antres, comme une marée ascendante vers l'espace où circule la laiteuse clarté de la lune.



Solitude où mon cour (...) percevait la substance vitale de la terre...



C'est alors que surgit en moi ce monde intérieur qui sommeille sous les banalités de ma vie mentale ordinaire et, si je ne sais d'où il monte, il faut bien que ce soit de l'ombre, là où s'alimente en secret, dans les mystères de mon sang, cette puissance...



On sentait la vie remonter du sol que brisaient ses puissances et passer dans toutes les sèves, le sang travaillait.



... Premier mouvement des sèves souterraines. Alors au bout de leurs racines, les plantes sentent éclater la vie sourde des germes (...) Les hommes cèdent eux aussi au mouvement ascensionnel...

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