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L'ATTAQUE DU MOULIN - EMILE ZOLA - RÉSUMÉ - ANALYSE






Zola romancier était aussi ethnographe. Pour préparer chacun de ses volumes des "Rougon-Macquart", il a accumulé les repérages et les reportages détaillés sur le terrain. Mais ce que l'on ignore généralement, c'est le luxe / l'abondance des détails et l'immensité du travail d'enquête et de documentation sur le terrain. Fidèle à notre méthode, nous citerons ces lignes consacrées à la méthode d'Emile Zola, celui qui a voulu être le chef de l'école naturaliste.



«Très marqué par le , ZOLA admire DARWIN, TAINE, CLAUDE BERNARD et son Introduction à la médecine expérimentale (1865), le docteur LUCAS et ses travaux sur l'hérédité, et il conçoit pour la littérature des ambitions scientifiques: à partir de 1868, il entreprend de faire d'histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire>, Les Rougon-Macquart, dont les membres sont marqués par une hérédité fatale. Observateur impitoyable de toutes les réalités, prétendant à la lucidité clinique du médecin et y joignant les préoccupations sociales de l'enquêteur, il désire traiter le roman comme le terrain d'une expérience scientifiquement conduite.»



EMILE ZOLA (1840 -1902)



Ne à Paris en 1840. fils d'un ingénieur d'origine italienne et d'une mère française, il vit une grande partie de sa jeunesse dans le Midi de la France, à Aix-en-Provencc. Après la mort de son père (survenue en 1847), la famille traverse une période de graves difficultés matérielles cl plus tard s'installe à Paris où il achève ses études secondaires et où il devient employé à la librairie Hachette au service des relations avec la presse. En 1867 sa préface de «Thérèse Raquin» est un véritable manifeste du naturalisme, qu'il définira par la suite dans «le Roman expérimental» (1880): «La science entre dans notre domaine, celui des romanciers, qui sommes à cette heure des analystes de l'homme, dans son action individuelle et sociale. Nous continuons, par nos observations et nos expériences, la besogne du physiologiste, qui a continué celle du physicien et du chimiste. Nous faisons en quelque sorte de la psychologie scientifique, pour compléter la physiologie scientifique: et nous n'avons, pour compléter l'évolution, qu'à apporter dans nos études de la nature et de l'homme l'outil décisif de la méthode expérimentale. ». Selon Zola, «Le romancier est fait d'un observateur et d'un expérimentateur». Consciencieux, se documentant abondamment avant d'écrire, enquêtant sur le terrain (le dossier "Germinal" comptera 400 pages manuscriteS) et s'appuyant sur les théories scientifiques de l'hérédité («L'hérédité, a-t-il écrit, a ses lois comme la pesanteur») pour imaginer et expliquer le comportement de ses personnages, il entreprend en 1869 la rédaction du premier des 20 romans qui constitueront la vaste série des «Rougon-Macquart, histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire», «représentant le débordement des appétits et le soulèvement de notre âge qui se rue aux jouissances», notamment: la Fortune des Rougon (1871), la Faute de l'abbé Mouret (1875), l'Assommoir (1877), Nana (1880), Au Bonheur des Dames (1883), Germinal (1885), la Terre (1887), la Bête humaine (1890), la Débâcle (1892).

Les critiques contemporains reprochèrent à Zola une forme peu «académique» («H a un talent vulgaire et robuste, où domine l'imagination. Ses romans sont des poèmes, de lourds et grossiers poèmes, mais des poèmes» - LansoN), ainsi que ses tendances socialisantes. Chez lui, l'observation réaliste du milieu social se double d'une vision épique symbolique, qui évoque le conflit entre les forces génératrices de vie et de mort.

Emile Zola fut également attaqué par les nationalistes français lors de la fameuse affaire Dreyfus (qui avait divisé la France en deux campS), lorsqu'il avait publié son célèbre réquisitoire «J'accuse» (paru dans l'Aurore de 1898): poursuivi en justice, condamné à un an de prison et à une amende de 3000 francs, il se réfugie (s'exilE) en Angleterre. Sa mort en 1902, par asphyxie, est peut-être d'origine criminelle *.

Zola est un des plus féconds et des plus puissants romanciers de France au XlX-e siècle. La grande qualité de Zola, de l'avis de tous les critiques, est de faire vivre les foules. En observateur attentif et clairvoyant, Zola a observé et décrit les ouvriers des villes et des usines, les mineurs, les paysans. Il ne s'est pas seulement contenté de regarder leur labeur et leurs souffrances: devant les injustices de la vie. son cour s'est ému, et ses derniers romans expriment un profond seniiment de pitié.



L'ATTAQUE DU MOULIN

RÉSUMÉ - ANALYSE



«L'attaque du moulin» est une magistrale nouvelle inspirée par la guerre franco-prussienne de 1870-1871. L'action se déroule dans un petit village de Lorraine, Rocreuse, décrit par Zola dans les termes suivants:

«Ce moulin du père Mériter était une vraie gaîté. Il se trouvait juste au milieu de Rocreuse, a 'endroit où la grand'route fait un coude. Le village n'a qu'une rue, deux files de masures, une file à chaque bord de la route; mais là, au coude, des prés s'élargissent, de grands arbres, qui suivent le cours de la Marelle, couvrent le fond de la vallée d'ombrages magnifiques. Il n'y a pas. dans toute la Lorraine, un coin de nature plus adorable. À droite et à gauche, des bois épais, des futaies séculaires montent des pentes douces, emplissent l'horizon d'une mer de verdure; tandis que. vers le midi, la plaine s'étend, d'une fertilité merveilleuse, déroulant à l'infini des pièces de terre coupées de haies vives. Mais ce qui fait surtout le charme de Rocreuse, c'est la fraîcheur de ce trou de verdure , aux journées les plus chaudes de juillet et d'août. La Morelle descend des bois de Gagny. et il semble qu'elle prenne le froid des feuillages sous lesquels elle coule pendant des lieues; elle apporte les bruits murmurants, l'ombre glacée et recueillie des forêts. Et elle n'est point la seule fraîcheur: toutes sortes d'eaux courantes chantent sous les bois; à chaque pas, des sources jaillissent; on sent, lorsqu'on suit les étroits sentiers, comme des lacs souterrains qui percent sous la mousse et profitent des moindres fentes, au pied des arbres, entre les roches, pour s'épancher en fontaines cristallines. Les voix chuchotantes de ces ruisseaux s'élèvent si nombreuses et si hautes, qu'elles couvrent le chant des bouvreuils. On se croirait dans quelque parc enchanté, avec des cascades tombant de toutes parts.»



Les personnages principaux en sont le père Merlier. veuf, meunier de son état, maire du village. Françoise, sa fille de 18 ans, et le fiancé de celle-ci. Dominique Penquer. Belge établi dans le pays, braconnier et beau garçon. La nouvelle débute par les fiançailles de Françoise et de Dominique. Mais l'espoir et le bonheur de Françoise Mcrlier sont vite ruinés par la guerre qui éclate et bouleverse sa vie. Après un combat contre un détachement français, les Prussiens s'emparent du village et du moulin du père Merlier.



Le jeune Dominique, bien que Belge, accusé par les Prussiens d'avoir tiré des coups de fusils sur eux (il avait combattu à côté des soldats du détachement français et avait été fait prisonnieR), considéré par ceux-ci comme «franc-tireur», n'appartenant donc pas à l'armée régulière, est condamné à être fusillé.

«C'était une règle posée par l'état-major allemand: tout Français n'appartenant pas à l'armée régulière et pris les armes à la main, devait être fusillé. Les compagnies franches elles-mêmes n'étaient pas reconnues comme belligérantes. En faisant ainsi de terribles exemples sur les paysans qui défendaient leurs foyers, les Allemands voulaient empêcher la levée en masse, qu'ils redoutaient.»

Enferme dans une pièce du moulin du père Merlier, il s'évade pendant la nuit, grâce à la complicité de Françoise et tue un Allemand, mais il est obligé de se rendre pour sauver la vie du père Merlier que les Allemands voulaient fusiller.

MalgTé les insistances de l'officier allemand qui voulait se servir de lui comme guide pour arriver sans encombre dans un village voisin, Dominique, quoique Belge, mais vivant depuis dix ans dans le village, préfère mourir, plutôt que de collaborer avec l'occupant et de lui servir de guide.

À ce moment les Français font leur apparition à la lisière du bois et veulent s'emparer de nouveau du village et surtout du moulin qui, du point de vue tactique, représentait une véritable forteresse. Au moment où l'officier prussien apprend la nouvelle, il ordonne lui-même au peloton d'exécution de tirer sur Dominique. Dans la confusion générale provoquée par la bataille, le père Merlier sera lui aussi tué par une balle perdue. Les Français donnent l'assaut, les Prussiens seront mus massacrés, mais le moulin sera lui aussi détruit par l'artillerie française.

Au milieu de ce désastre provoqué par la guerre, la jeune et belle Françoise, auparavant si gaie et si heureuse, contemple, affolée, incapable de parler, les cadavres de son père et de son fiancé.

La nouvelle de Zola, vérilable chef-d'ouvre du genre, est. de cette façon, un véritable réquisitoire contre la guerre, contre les massacres, contre l'absurdité de la mort qui ruine, détruit le bonheur des gens.

La jeune Françoise voit le désastre envahir sa vie et assiste, impuissante, au massacre des siens. Toute sa vie. si calme autrefois, prend une tournure folle, tragique. Aspirant de toute son âme, comme toute jeune fille de son âge. au mariage, au bonheur familial, elle constate, avec stupeur et angoisse, que la vie sur terre est faite de douleurs, de souffrances cl de massacres. Les sacrifices sanglants qu'exige le dieu de la guerre n'épargnent pas son fiancé et son père, n'épargnent pas sa propre âme, si peu préparée à ce genre de tortures. Son univers familial, si paisible avant le commencement de la guerre, dans ce beau coin de Lorraine, s'écroule comme les murailles du moulin de son père, comme un véritable château de cartes de jeu. Née pour l'amour et la vie, rêvant de toutes les fibres de son âme d'une vie de famille à côté de son futur mari, elle connaîtra la mort et la souffrance, au milieu des hurlements d'un monde en proie à la folie-, à la démence. Ce n'est pas la petite blessure provoquée par une balle allemande qui la fera saigner, souffrir, mais son cour, brisé par la double perte des deux hommes qu'elle aimait le plus au monde: le père et le fiancé. Jeune, à dix-huit ans, elle connaîtra la mort indirecte, celle, plus tragique encore, plus douloureuse, plus éprouvante pour son âme. des êtres aimés, adorés même, justement parce que cette mort, absurde, ne sert à rien et à personne.

Grâce à ces pages de Zola. Françoise, son héroïne, rejoindra la vaste galerie, la tragique famille, le tragique cortège des héroïnes grecques et troyennes dont la vie et le bonheur ont été sacrifiés sur l'autel d'Ares, le dieu sanguinaire de la guerre, celles qui, comme elle, avaient perdu un mari, un frère, un père: Antigone, Andromaque, Cassandre, Hécube, Electre, héroïnes devenues immortelles par leur souffrance, par les sacrifices auxquels elles ont dû consentir. Bien vivantes encore dans la mémoire du XX-e siècle, ces héroïnes ont traversé les siècles et leurs souffrances nous impressionnent aujourd'hui encore. Beaucoup d'autres femmes, tout le long de l'histoire, ont traversé de pareils cauchemars.

Malgré sa jeunesse, malgré la sève de jouvence qui coule dans son corps et dans son âme, elle ne pourra pas ressusciter les cadavres de son père et de son fiancé. Tout comme les héroïnes troyennes, elle ne pourra que pleurer sur leurs corps et crier vengeance, face à un destin inéluctable, absurde, qui, sans discernement, fauche, massacre vieillards et jeunes, sème la souffrance et le deuil, ruine des édifices et des vies, emporte dans son tourbillon effréné et effrayant les espoirs de vie des hommes comme il emporte les palettes du moulin du père Merlicr. Face à tout ce désastre, le geste de l'officier français, qui brandit son épée en criant 'Victoire", semble d'autant plus ridicule, plus dépourvu de signification, que le seul 'personnage" qui puisse réellement pousser ce cri de "victoire", revendiquer, s'attribuer ce 'succès" absurde, n'est autre que la "Mort" qui, elle aussi, brandit sa faux comme il brandit son irme, faite uniquement pour provoquer des larmes!

Pour Zola "le Vengeur", le "semeur d'orages", c'est une occasion de plus (supplémentairE) ie présenter ces orages de la vie, ces désastres qui, pareils à des typhons, s'abattent sur la vie des rens modestes et démolissent leurs espoirs de vie et de bonheur. La vallée de Rocreuse, ce coin troU) de verdure, ce petit paradis où coule la Morelle, devient véritablement pour Françoise une 'vallée des larmes" et "des armes" qui emporte, pareil à une épave, le petit navire de ses :spérances maintenant évanouies. Le "naufrage" du moulin du père Merlicr, ce "navire" qui. ;râce à ses palettes, nourrissait de pain, d'espoir et de joie de vivre les habitants du village, a ombré lui aussi dans les vagues noires du Styx. le fleuve de la mort. L'orage de la guerre ne l'a >as épargné. Les nuages de la guerre qui s'amoncelaient au-dessus de la campagne ont faiT )leuvoir leur charge de mort et de destruction. Les boulets français n'ont épargné ni les 'russsiens, ni les Français, ils n'ont épargné ni le moulin. Ses palettes, autrefois mues par l'eau de a Morelle, ne seront plus mues que par le "vent mauvais", le vent dément, absurde, de la mort.



L'ATTAQUE DU MOULIN

Texte



Il était trois heures. De grands nuages avaient lentement empli le ciel, la queue de quelque rage voisin. Ce ciel jaune, ces haillons cuivrés changeaient la vallée de Rocreuse, si gaie au oleil, en un coupe-gorge plein d'une ombre louche. L'officier prussien s'était contenté de faire nfermer Dominique, sans se prononcer sur le sort qu'il lui réservait. Depuis midi, Françoise igonisait dans une angoisse abominable. Elle ne voulait pas quitter la cour, malgré les insistances le son père. Elle attendait les Français. Mais les heures s'écoulaient, la nuit allait venir, et elle ouffrait d'autant plus que tout ce temps gagné ne paraissait pas changer l'affreux dénouement.



Cependant, vers trois heures, les Prussiens firent leurs préparatifs de départ. Depuis un nstant, l'officier s'était, comme la veille, enfermé avec Dominique. Françoise avait compris que a vie du jeune homme se décidait. Alors, elle joignit les mains, elle pria. Le père Merlier, à côté la rivière emportait des débris de toutes sortes, et l'on voyait, par une brèche, la chambre de Françoise, avec son lit, dont les rideaux blancs étaient soigneusement tirés. Coup sur coup, la vieille roue reçut deux boulets, et elle eut un gémissement suprême: les palettes furent charriées dans le courant, la carcasse s'écrasa. C'était l'âme du gai moulin qui venait de s'exhaler.

Puis les Français donnèrent l'assaut. II y eut un furieux combat à l'arme blanche. Sous le ciel couleur de rouille, le coupe-gorge de la vallée s'emplissait de morts. Les larges prairies semblaient farouches, avec leurs grands arbres isolés, leurs rideaux de peupliers qui les tachaient d'ombre. A droite et à gauche, les forêts étaient comme les murailles d'un cirque qui enfermaient les combattants, tandis que les sources, les fontaines et les eaux courantes prenaient des bruits de sanglots, dans la panique de la campagne.

Sous le hangar, Françoise n'avait pas bougé, accroupie en face du corps de Dominique. Le père Merlier venait d'être tué raide par une balle perdue. Alors, comme les Prussiens étaient exterminés et que le moulin brûlait, le capitaine français entra le premier dans la cour. Depuis le commencement de la campagne, c'était l'unique succès qu'il remportait. Aussi, tout enflammé, grandissant sa haute taille, riait-il de son air aimable de beau cavalier. Et, apercevant Françoise imbécile entre les cadavres de son mari et de son père, au milieu des ruines fumantes du moulin, il la salua galamment de son épée, en criant:

-Victoire! victoire!



L'attaque du moulin, 1880

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