Essais littéraire |
L'école frénétique L'influence de Byron ne s'est pas exercée seulement dans le domaine de la poésie. En 1819, une nouvelle traduite de l'anglais. Le Vampire, lui est faussement attribuée et déclenche une mode : l'année suivante, Nodier publie un roman. Lord Ruthwen ou les Vampires. Nodier explore le champ du rêve : fantasmes et délires sont aussi vrais que la réalité. Son inspiration s'exprime dans des Contes : Jean Sbogar (1818), influencé par Schiller; Smarra ou les démons de la nuit (1819), influencé par le « roman noir » dont Le Moine ( 1796), de Monk Lewis (1775-1818), avait fourni l'exemple; Trilby ou le lutin d'Argail (1822), sans doute influencé par Walter Scott. Trilby trouble Jeannie, à la fois attirée et effrayé par ce lutin. Le conte explore ici la frontière indécidable qui sépare le rêve et la réalité, l'innocence et le sentiment de culpabilité. On a appelé « frénétique » (du grec phrenêtikos, « furieux ») cette école qui pratique l'exploration des puissances du rêve, mais aussi du mal, et qui allait avoir tellement de succès auprès des jeunes admirateurs du romantisme. Hugo a donné un premier aperçu de son talent de romancier avec Bug-Jargal, qu'il a écrit à 16 ans à peine et publié dans Le Conservateur littéraire (mai-juin 1820) avant d'en donner une version plus longue, publiée en janvier 1826 (l'histoire lui en a été inspirée par la révolte des esclaves de Saint-Domingue en 1791). Il rejoint l'école frénétique avec Han d'Islande, rédigé alors qu'il n'a pas 19 ans et publié en février 1823. Scène de la morgue chez le bourreau, évocation des ruines dans l'antre de Han, monstre qui boit du sang dans des crânes : rien ne manque de l'attirail du «roman noir». Hugo, qui recevra pour Han d'Islande des éloges de Nodier et de Vigny, laisse entrevoir dans ce récit, que dans certains cas on considérera comme franchement parodique, l'envers de ce qui fera ensuite son génie de visionnaire.Les forces du Bien et du Mal s'y opposent de manière un peu caricaturale. Préfaçant une nouvelle édition du roman en 1833, Hugo jugera qu'il ne contient «qu'une chose sentie, l'amour du jeune homme [Ordener]; qu'une chose observée, l'amour de la jeune fille [Éthel] ». L'influence de Walter Scott Hugo a joué un rôle capital dans l'influence qu'auront en France les romans historiques de Walter Scott. Il consacre en effet, dans le premier numéro de La Muse française (1823), un important article à Quentin Durward, qui venait d'être publié en traduction française. « Peu d'historiens sont aussi fidèles que ce romancier », écrit-il, saluant ce « genre inconnu », « dont les compositions allient à la minutieuse exactitude des chroniques, la majestueuse grandeur de l'histoire et l'intérêt prenant du roman ». Dans ce genre, Hugo voit le reflet de ce « drame bizarre » qu'est la vie, « où se mêlent le bon et le mauvais, le beau et le laid, le haut et le bas », bref de la « lutte de l'ombre et de la lumière ». Ce drame où se reflètent les contraires et qu'il donnera, dans la Préface de Cromwell, mission à la scène de représenter, on voit qu'en 1823, c'est dans le roman qu'il en lit, grâce à Walter Scott, la meilleure figuration. Au roman narratif, dans lequel l'auteur, s'imposant à ses personnages, tombe facilement dans la monotonie, au roman épistolaire, dans lequel il s'éclipse au contraire pour ne laisser voir qu'eux, mais où il s'interdit du même coup toute «véhémence» et toute «rapidité», Scott a substitué le roman dramatique, « dans lequel l'action imaginaire se déroule en tableaux vrais et variés, comme se déroulent les événements réels de la vie ». Le romancier écossais, qui a confié à un compatriote, l'imaginaire Quentin Durward, le premier rôle de son récit, aurait certes pu mieux choisir, dans l'histoire de France, que le règne de Louis XI : en fidèle monarchiste, Hugo énumère les souverains qui eussent donné une meilleure image de notre pays. On pourrait en outre, note Hugo, faire grief à Scott de quelques inexactitudes; mais, conclut-il, « un romancier n'est pas un chroniqueur ». Les traductions françaises de celui qui signa d'abord « l'auteur de Waverley » (titre de son premier romaN) se multiplient. Certaines ouvres comme Richard Cour de Lion ou Ivanhoe flattent le goût du public, particulièrement des jeunes romantiques, pour le Moyen Âge; d'autres comme Rob Roy, se situant dans un passé plus récent (xvinc s.), favorisent l'interprétation de l'évolution historique à la lumière des mutations économiques et sociales et non plus seulement des grands règnes ou des grandes batailles. Peintre de l'Histoire, Scott approfondit aussi l'interprétation des mécanismes moins spectaculaires de la société précapitaliste moderne. Le roman historique français «Nous sommes dans un temps où l'on veut connaître et où l'on cherche la source de tous les fleuves », écrit Vigny au début de Réflexions sur la vérité dans l'art (1827). Ce temps est celui qui succède aux grands bouleversements de la Révolution et de l'Empire : l'explication rationnelle peut contribuer à soulager du traumatisme et en prévenir un autre de même nature. Pour Vigny, l'Histoire retient les « vastes destinées de l'Humanité », le drame « le sort particulier de l'Homme». Maisà la religion, à la philosophie, à la poésie pure, «il appartient d'aller plus loin que la vie, au-delà des temps, jusqu'à l'Éternité». Au « vrai du fait », Vigny préfète la « vérité de l'art », qui donne aux hommes une idée de leur Histoire. L'art, en effet, « ne doit jamais être considéré que dans ses rapports avec sa beauté idéale ». Quand Vigny parle de «drame», à l'instar de Hugo rendant compte de Quentin Durward, il fait référence au roman aussi bien qu'au théâtre et conclut en invoquant pêle-mêle, comme si leurs destinées nous étaient connues grâce à un même genre littérale, les exemples d'Othello et de Richard III, de Lovelace, de Clarissa Harlowe et de Paul et Virginie. Les Réflexions serviront du reste de préface à Cinq-Mars, roman que Vigny a publié l'année précédente et dont l'intrigue est empruntée à un événement historique. Cinq-Mars était un gentilhomme, favori de Louis XIII, qui complota avec son ami de Thou pour assassiner Richelieu; tous deux furent condamnés et décapités. Chez Vigny, Cinq-Mars fait figure, face au pouvoir centralisateur incarné par Richelieu, de défenseur de la tradition de la monarchie féodale (la théorie suivant laquelle la Révolution de 1789 fut non une rupture dans l'histoire de notre pays, mais une accentuation du lent déclin du pouvoir aristocratique sera reprise au XIXe siècle, notamment par TocquevillE). Cinq-Mars mêle, comme les romans de Walter Scott, des figures imaginaires aux personnages historiques; mais tandis que Scott plaçait souvent des inconnus au premier plan de ses intrigues (conception bourgeoise de l'HistoirE), Vigny défend une conception aristocratique en donnant la primauté à des personnages célèbres. On suppose d'ordinaire que Hugo contribua, par son article de La Muse française, à éveiller l'intérêt d'Honoré de Balzac (1799-1850) pour Walter Scott. Balzac publie en 1829 un roman intitulé Le Dernier Chouan ou la Bretagne en 1800, qu'il appellera Les Chouans ou la Bretagne en 1799 lors de sa réédition en 1834. Les personnages historiques (par exemple Fouché, ministre de la Police, à qui revient l'idée de la machination qui formera l'intriguE) y sont cités, mais non point inclus dans des scènes. Ne figurent dans l'action que des personnages imaginaires, en premier lieu le marquis de Montauran, «dernier Chouan », et Marie de Verneuil, demi-noble espionne à la solde de la République, qui tombera amoureuse du marquis à qui elle était censée tendre un guet-apens et avec qui elle connaîtra une fin tragique. L'Histoire s'efface, pour finir, devant le romanesque; c'est qu'en ces tout derniers mois du XVIII siècle, surtout quand Bonaparte arrive au pouvoir, les idéologies se sont brouillées pour céder la place aux aventures individuelles. Balzac avait encore des opinions libérales quand il composa son roman. Monarchiste légitimiste après 1830, il en retouche des détails en vue de sa réédition, mais n'en change pas le sens : il ne reconnaît pas, dans les derniers soubresauts de la Chouannerie, la grande idée qui avait soulevé l'ouest de la France. Un épilogue lui permettra d'établir un lien entre Les Chouans et le reste de La Comédie humaine en inscrivant dans un présent tout prosaïque (celui du narrateuR) les seuls survivants de l'aventure. En 1829 paraît aussi la première édition de 1572, chronique du temps de Charles IX, par l'auteur de Clara Gazul. Mérimée l'intitulera ensuite Chronique du règne de Charles IX. L'influence de Walter Scott y est plus nette encore que chez Balzac. « Chronique » signifie pourtant que l'auteur se plie à la chronologie des événements au lieu de les organiser, comme il convient d'ordinaire au romancier. Plutôt qu'un drame, le roman de Mérimée présente une succession de faits tirés de Brantôme, L'Estoile, d'Aubigné et quelques autres, avec une apparence de détachement qui tourne au jeu littéraire dans ce chapitre Vin où l'auteur engage un dialogue avec le lecteur en feignant de ne pouvoir répondre à ce qu'on attend d'un roman historique : description des protagonistes, de leur costume, paroles convenues pour compléter leur portrait et fixer leur rôle dans l'Histoire... Au demeurant, on se souvient que Hugo excusait Walter Scott pour quelques erreurs historiques de Quentin Durward, arguant qu'«un romancier n'est pas un chroniqueur». Le chroniqueur serait-il donc tenu à la même exactitude que l'historien? Mérimée s'en défend : «Je voudrais bien avoir le talent d'écrire une histoire de France», déclare l'« auteur ». La « chronique » mime la succession des événements de l'Histoire, elle ne prétend pas atteindre à la vérité historique. On retrouve le génie ludique dont Mérimée faisait déjà preuve derrière le masque de Clara Gazul. Hugo lui-même songe à profiter des leçons du maître qu'il a célébré. En 1828, il signe un contrat avec un éditeur pour écrire un roman « à la mode de Walter Scott». Quand ce roman verra le jour, en 1831, sous le titre de Notre-Dame de Paris, les Trois Glorieuses auront renversé le régime et Hugo lui-même sera en train de poursuivre l'évolution qui l'avait mené du légitimisme au libéralisme. On trouvera, dans son roman, un reflet de cette conversion. Naissance de La Comédie humaine Les Chouans sont le premier roman que Balzac ait signé de son nom. Auparavant, il avait, seul ou en collaboration, signé d'autres romans de pseudonymes et conçu le projet d'écrire une Histoire de France pittoresque, pour laquelle il avait déjà rassemblé une copieuse documentation. Avec Scènes de la vie privée commence à prendre forme le projet qu'il aura, en 1839 seulement, l'idée d'intituler La Comédie humaine. En feront aussi partie La Physiologie du mariage, ouvrage auquel il travaille depuis 1820, dont il donne une première mouture en 1826 avant l'édition définitive de 1829, ainsi que Les Chouans. Les réflexions de La Physiologie... sur les contraintes du mariage (liées à l'état de dépendance dans lequel notre société tient la femmE), et sur la nécessité pour chaque individu de savoir gouverner son énergie (à ce titre sont condamnés la débauche et le célibaT), inspireront une grande partie des romans à venir. Quant aux Chouans, on peut les considérer comme un portique à la grande fresque qui s'ébauche. On se rappelle qu'ils s'achèvent sur une évocation du présent; pour l'essentiel (non sans qu'en soient découvertes et expliquées les racineS), c'est la société contemporaine que La Comédie humaine va explorer. Le déséquilibre d'âge entre ses deux parents (son père meurt en 1829 à l'âge de 83 anS), la naissance d'un frère illégitime qui en fut sans doute une conséquence (La Femme de trente ans transposera cette situation, en laissant deviner quelle jalousie Honoré dut éprouver pour Henri, l'«enfant de l'amour»), l'expérience de Laure de Beftiy, la «Dilecta», mariée trop jeune avant de devenir sa maîtresse, en 1822, alors qu'elle avait le double de son âge : il y avait pour Balzac matière à méditer sur les situations difficiles auxquelles expose le mariage. On le devine à la lecture de la préface qu'il donne, en 1830, à la première édition des Scènes de la vie privée, où il se vante de présenter « le tableau vrai de mours que les familles ensevelissent aujourd'hui dans l'ombre », en espéranj que des mères avisées le mettront sous les yeux de leurs filles. Les Scènes de la vie privée sont, dans leur premier état, une série de nouvelles que grossiront plus tard de vrais romans. L'une d'elles, La Vendetta, fait chronologiquement transition avec Les Chouans puisqu'elle se déroule sous l'Empire; une autre, La Dernière Revue de Napoléon, composera le premier chapitre de La Femme de trente ans. La variété des milieux étudiés (monde du commerce dans La Maison du chat qui pelote, aristocratie du faubourg Saint-Germain dans Une double famillE) préfigure la diversité de La Comédie humaine. Dans Une double famille s'aperçoit aussi l'action exercée par le cadre sur les êtres qui y habitent. Ainsi se justifieront les longues descriptions des grands romans. Les débuts de romancier de Stendhal : Armance Rome, Naples et Florence (1817) est le premier ouvrage qu'Henri Beyle ait signé du pseudonyme de Stendhal. Il le gardera comme nom d'auteur jusqu'à la fin de sa vie. Avant d'écrire son premier Racine et Shakespeare, il a donné avec De l'amour (1822) un traité qui plaçait dans l'ordre de la généralité le chagrin d'amour qu'il avait éprouvé avec Matilde Dembowski («Métilde»), énonçant notamment la fameuse théorie de la «cristallisation» : «Ce que j'appelle cristallisation, c'est l'opération de l'esprit, qui tire de tout ce qui se présente la découverte que l'objet aimé a de nouvelles perfections. » Amoureux de l'Italie, qui lui apparaissait, dès son enfance, passée à Grenoble, comme une terre promise, il y a abordé à 17 ans à la suite de l'armée de Bonaparte. De 1814 à 1821, il y connaît les plus grandes joies esthétiques (on en trouve un écho dans sa Vie de Rossini, 1824) et les pires tourments du cour. C'est pourtant comme chroniqueur de la Restauration qu'il va, six ans après être rentré en France, faire ses débuts de romancier. Son premier roman, Armance ou Quelques scènes d'un salon de Paris en 1827, ressemble à un exercice, voire à un défi, puisqu'il reprend un sujet traité par un roman de Mme de Duras, Olivier, qui se lisait en 1824-1825 dans les salons parisiens. En 1826, Henri de Latouche publie sans nom d'auteur un autre Olivier. Olivier finit par faire, comme dira Stendhal, « exposition » : dans les deux cas, il s'agit en effet d'un jeune homme victime de « la plus grande des impossibilités de l'amour», puisqu'il est impuissant. Modulant le même sujet, Stendhal abandonne avant d'avoir achevé son roman le prénom d'Olivier pour celui d'Octave et, comme pour mieux masquer son sujet, choisit pour titre le prénom de la jeune fille à laquelle le héros ne peut, sans faillir à son devoir, déclarer son amour : Armance. L'impossibilité qui paralyse Octave est une énigme pour tout lecteur qui n'aurait pas été initié. Ayant dissimulé, par crainte que son récit ne vire au comique, le handicap physique d'Octave, Stendhal lui donne l'aura d'un héros romantique qui, désespérant de l'état du monde et de soi-même, ne peut convertir sa passion en bonheur. Comme sa famille reçoit, à l'instar de toutes les familles d'aristocrates qui avaient perdu leurs biens au cours de l'émigration, une indemnité compensatrice (loi dite du « milliard des émigrés »), il devient un parti intéressant et n'en conçoit qu'une horreur encore plus vive du mariage. Il se considère lui-même comme un assisté et son impuissance figure celle de sa classe. Appartenant à une fin de race, il n'aura pas de fils. Le Rouge et le Noir Si on m'aime, qui aime-t-on en moi? Trouve-t-on, dans la France d'aujourd'hui, des possibilités d'énergie ailleurs que chez les gens du peuple? Ces questions, qui parcourent l'ouvre entière de Stendhal, inspirent particulièrement Le Rouge et le Noir. Chronique du XIX' siècle (1830). Julien Sorel, fils d'un charpentier de Verrières, petite ville imaginaire du Jura, s'est nourri durant son adolescence du Mémorial de Sainte-Hélène. Sous l'Empire, un ouvrier avait la possibilité de devenir général à 25 ans; grandi pour son malheur dans la société de la Restauration, gouvernée par une aristocratie dégénérée et par la Congrégation des jésuites, Julien va recourir à l'arme des gens en place, l'hypocrisie, pour conquérir comme des places fortes l'épouse du hobereau de province qui l'emploie comme précepteur, puis la fille du marquis parisien qui l'a engagé comme secrétaire. Quand la puissance obscure de la Congrégation ruine ses plans d'ascension sociale, il fait feu sur sa première maîtresse, que son confesseur avait utilisée pour le dénoncer, et il meurt comme un martyr de la classe des pauvres à laquelle il avait rêvé d'échapper. Écrit pour sa plus grande partie avant la révolution de juillet 1830, achevé aussitôt après, Le Rouge et le Noir dresse le constat d'une société vermoulue. Calculateur, Julien devient sous l'impulsion de son tempérament un vrai héros romanesque et atteint au sublime. Mme de Rénal, longtemps victime de ces principes d'éducation par lesquels on étouffe tout sentiment naturel chez les femmes, puis Mathilde La Mole, qui préfère un jeune homme du peuple fier et ombrageux aux plats freluquets du faubourg Saint-Germain, s'élèvent toutes deux aussi haut que Julien, l'une parce qu'elle ose devenir elle-même, l'autre parce qu'elle risque tout pour mener à sa limite un rêve romanesque. Premier des grands romans français du XIXe siècle. Le Rouge et le Noir appartient à la tradition du siècle précédent par le jeu malicieux du narrateur, qui intervient en faveur de ses personnages à la manière dont le faisait Fielding ou Diderot. Mais l'analyse de son héros, introspectif par nécessité et sensible malgré lui, conduit Stendhal à pousser plus loin que ne l'avaient fait ses devanciers un procédé qui sera constitutif du roman moderne : le monologue intérieur. À la fois héritier du xvra' siècle et précurseur du roman moderne, Stendhal, qui exprima si fortement la société de son temps, ne lui appartenait pourtant qu'à moitié. Il fut un disciple des Idéologues à l'époque où les jeunes gens de sa génération s'enflammaient pour René et le vague des passions. Théoricien du romanticisme, il place en exerjfue du Rouge et le Noir une phrase de Danton, «La vérité, l'âpre vérité», qui passera aisément pour le refus de ce « galimatias » auquel les ouvres romantiques se réduisent trop fréquemment. Si Stendhal cède plus souvent qu'à son tour à la sensibilité et à la tendresse, il déteste en effet l'emphase qui en gâte les vertus. Goethe lut Le Rouge et le Noir un an environ avant de mourir. Il trouva certains de ses caractères de femmes « un peu trop romanesques », mais apprécia le « grand esprit d'observation » et la « profonde intuition psychologique » de l'auteur (Conversations avec Ecker-mann, à la date du 17 janvier 1831). «Un roman: c'est un miroir qu'on promène le long d'un chemin», dit Stendhal en exergue du chapitre XIII du Rouge et le Noir (phrase attribuée à un romancier du xvuc siècle, Saint-RéaL). On pourrait y lire une devise de l'esthétique réaliste, mais tout dépend de la main qui promène le miroir et du regard qui contemple le chemin. A la fois soucieux d'exactitude et profondément romanesque, Stendhal est dans cette contradiction qui le fait aimer des beylistes. |
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