Essais littéraire |
Le Second Empire est une fête, du moins pour ceux qui en profitent, et les opérettes d'Offenbach en sont le symbole. Offenbach a ses fournisseurs : Henri Meilhac (1831-1897) et Ludovic Halévy (1834-1908). Le premier avait débuté par le vaudeville quand il rencontra Halévy, qui avait déjà fourni à Offenbach l'argument de Ba-ta-Clan (1855). Les livrets de La Belle Hélène, de La Vie parisienne, de La Périchole et d'autres encore résultent de la collaboration des deux auteurs. Tandis qu'Alexandre Dumas père continue de triompher grâce à ses romans, mais aussi sur la scène, Alexandre Dumas fils (1824-1895), son fils naturel, prouve qu'il a de qui tenir; La Dame aux camélias ( 1848) s'est arrachée en librairie avant de tirer des larmes aux spectateurs et de leur donner à penser par sa dernière réplique : « Dors en paix, Marguerite, il te sera beaucoup pardonné parce que tu as beaucoup aimé. » Les meilleurs livrets d'opéra n'étant pas forcément les plus subtils. Verdi donnera à ce drame d'une courtisane amoureuse sa plus belle expression artistique avec La Traviata (1853). Dans Le Demi-Monde (1855). du même Alexandre Dumas fils, se reconnaît une classe montante de la société impériale, dont les basses ambitions sont (sur la scènE) heureusement contrariées. Le souci des bonnes mours se conjuguant chez lui avec une sûre intuition des goûts du public, Alexandre Dumas fils connaîtra d'autres succès. Le même souci moralisateur n'épargne pas Emile Augier (1820-1899), dont le nom reste attaché à une pièce. Le Gendre de M. Poirier (1854), écrite en collaboration avec Jules Sandeau. où est caricaturé, dans une intrigue située sous la monarchie de Juillet, une sorte de M. Jourdain moderne. Hormis Meilhac et Halévy, qui doivent à Offenbach leur fortune littéraire, parmi les succès du Second Empire, on ne joue plus guère aujourd'hui que les comédies d'Eugène Labiche (1815-1888). Embrassons-nous, Folleville (1850), Un chapeau de paille d'Italie ( 1851 ), Le Voyage de M. Perrichon ( 1860) témoignent de l'art de Labiche à tirer les ficelles d'une intrigue compliquée, de son instinct du comique de situation et de caractère et - au bon sens du terme - d'un vrai talent de moraliste. «Les hommes ne s'attachent point à nous en raison des services que nous leur rendons, mais en raison de ceux qu'ils nous rendent » : telle est la principale leçon du Voyage de M. Perrichon. Type du bourgeois parvenu, jamais en peine pour servir des lieux communs, M. Perrichon préfère donner la main de sa fille à celui dont il croit avoir sauvé la vie plutôt qu'à celui qui l'a réellement sauvé. La morale ne sera rétablie qu'au prix d'un subterfuge dramatique. M. Perrichon ressemble à M. Prudhomme, type imaginé par Henri Monnier (1799-1877) à l'occasion d'une pièce intitulée Grandeur et décadence de M. Joseph Prudhomme (1852), mise en roman dans Mémoires de M.Joseph Prudhomme (1857). «Vous avez beau faire et beau dire, tout est bourgeois aujourd'hui. L'aristocratie n'existe plus, la démocratie n'existe pas encore, il n'y a que la bourgeoisie», prévient Henri Monnier au premier chapitre des Mémoires. Les pièces les plus représentatives de la période d'après 1870 n'ayant guère trouvé d'expression à la scène (voir infra, p. 166), on peut le dire d'un trait : depuis le naufrage du drame romantique en 1843 (échec des BurgraveS) jusqu'aux premiers drames de Paul Claudel à l'extrême fin du siècle, le théâtre français a reflété la société de l'époque, il a fait rire, il va devenir pendant la période du naturalisme un terrain d'expériences intéressantes, mais un demi-siècle durant, il a singulièrement manqué de grandeur. |
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