Francis Ponge |
Si incroyable que le fait, un jour (et déjà), doive paraître, l'on a pu constater une certaine corrélation entre la reprise de Coriolan au Théâtre-Français et l'émeute de 6 février. Alors qu'à propos de cette reprise l'on entend dire partout que cette pièce est une apologie du pouvoir personnel (et déjà il y a plusieurs années M. Léon Blum avait cru devoir chercher des excuses aux opinions anti-démocratiques de Shakespeare) il est sans doute bon de rappeler les phrases suivantes, mises dans la bouche de Cassius dans Jules César (acte I, scène n) : « De quels aliments se nourrit donc ce César, pour être devenu si grand? Quelle honte pour notre époque! Quelle est la génération depuis le déluge universel qui n'a eu qu'un seul homme dont elle pût s'enorgueillir? C'est pour le coup que nous pouvons appeler Rome un désert puisqu'un seul homme l'habite. » Et de Coriolan même celles-ci, qui éclairent toute l'ouvre dont le ton est, entre Trollus et Cressida et Jules César, celui de la tragi-comédie : « D'homme qu'il était il est devenu dragon; il a des ailes, il ne touche plus terre. L'aigreur empreinte sur son visage suffirait pour faire tourner une vendange... Sa voix ressemble au sor d'une cloche funèbre, et son murmure au bruit d'une batterie. » Pour nous séduire à la dictature il faudra trouver autre chose. L'on s'en doutait. |
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Francis Ponge (1899 - 1988) |
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Portrait de Francis Ponge | |||||||||