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François Coppée



Le rêve du poète - Poéme


Poéme / Poémes d'François Coppée





Ce serait sur les bords de la
Seine.
Je vois

Notre chalet, voilé par un bouquet de bois.

Un hamac au jardin, un bateau sur le fleuve.

Pas d'autre compagnon qu'un chien de
Terre-Neuve

Qu'elle aimerait et dont je serais bien jaloux.

Des faïences à fleurs pendraient après des clous ;

Puis beaucoup de chapeaux de paille et des ombrelles.

Sous leurs papiers chinois les murs seraient si frêles

Que même, en travaillant à travers la cloison

Je l'entendrais toujours errer par la maison

Et traîner dans l'étroit escalier sa pantoufle.

Les miroirs de ma chambre auraient senti son souffle

Et souvent réfléchi son visage, charmés.

Elle aurait effleuré tout de ses doigts aimés.

Et ces bruits, ces reflets, ces parfums, venant d'elle,

Ne me permettraient pas d'être une heure infidèle.

Enfin, quand, poursuivant un vers capricieux,

Je serais là, pensif et la main sur les yeux,

Elle viendrait, sachant pourtant que c'est un crime,

Pour lire mon poème et me souffler ma rime,

Derrière moi, sans bruit, sur la pointe des pieds.

Moi, qui ne veux pas voir mes secrets épiés,

Je me retournerais avec un air farouche ;

Mais son gentil baiser me fermerait la bouche.

-
Et dans les bois voisins, inondés de rayons,

Précédés du gros chien, nous nous promènerions,

Moi, vêtu de coutil, elle, en toilette blanche,

Et j'envelopperais sa taille, et sous sa manche

Ma main caresserait la rondeur de son bras.

On ferait des bouquets, et, quand nous serions las

On rejoindrait, toujours suivis du chien qui jappe,

La table mise, avec des roses sur la nappe,

Près du bosquet criblé par le soleil couchant ;

Et, tout en s'envoyant des baisers en mangeant,

Tout en s'interrompant pour se dire :
Je t'aime !

On assaisonnerait des fraises à la crème,

Et l'on bavarderait comme des étourdis

Jusqu'à ce que la nuit descende...



-
O
Paradis !

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François Coppée
(1842 - 1908)
 
  François Coppée - Portrait  
 
Portrait de François Coppée
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