François de Vigny |
« Où donc est la beauté que rêve le poète ? Aucun d'entre les arts n'est son digne interprète, Et souvent il voudrait, par son rêve égaré, Confondre ce que Dieu pour l'homme a séparé. Il voudrait ajouter les sens à la peinture. A son gré si la Muse imitait la Nature, Les formes, la pensée et tous les bruits épars Viendraient se rencontrer dans le prisme des arts, Centre où de l'univers les beautés réunies Apporteraient au cour toutes les harmonies, Les bruits et les couleurs de la terre et des deux, Le charme de l'oreille et le charme des yeux, Le réveil des oiseaux, la chanson virginale, La perle et les rayons de l'aube matinale, La gémissante voix des soupirs de la nuit, Le nuage égaré sur le torrent conduit, L'éclair tombant du ciel et sillonnant l'espace Comme un glaive de Dieu qui passe et qui repasse, Les cris du voyageur dans la forêt perdu, L'appel de la clochette en pleurant entendu, Les mots d'amour mêlés au vent sifflant sur l'onde, Et des chastes douleurs l'émotion profonde. On entendrait ensemble, on verrait d'un coup d'oil Dans les vapeurs du nord la faiblesse et l'orgueil, L'orgueil farouche et noir des héros du nuage, Et les blondes beautés qui pleurent dans l'orage; Leurs chants s'élèveraient dans les plaines de l'air, Le boucher divin tinterait sous le fer, La harpe et les soupirs des vagues élégies Se mêleraient aux cris des sanglantes orgies, Et les hymnes plaintifs des filles du vainqueur Au rire du guerrier qui sent percer son cour. La tragédie en pleurs parlerait dans la nue, L'homme entendrait les sons d'une langue inconnue, Semblable aux chants divins des astres de Platon, Belle plus que les voix d'Homère et de Milton. Les Dieux s'entretiendraient des malheurs de la terre. Dans la nuit des forêts le rayon solitaire, Aux lèvres du chasseur en tremblant descendu, Aurait un doux soupir sous la feuille entendu, Des mots qui nous diraient tout bas avec mollesse Ce qu'est l'amour de l'homme au cour de la déesse. Devant l'autel ému d'un miracle nouveau, Sous le feu du génie échappé du ciseau Le marbre palpitant nous dirait si la vie Est un plus beau festin lorsqu'on nous y convie A l'âge qui rougit des pudeurs de l'amour, Qu'à l'âge qui gémit de ne pas voir le jour; Et si pour aborder l'existence et sa flamme, Il vaut mieux en naissant avoir toute son âme. Mais quels vastes concerts, quels mots, quelles couleurs D'un monde châtié traceront les douleurs Et graveront pour nous sur le flot du déluge La grandeur du coupable et celle de son juge ? A ce dessin sublime et sur un mont jeté Manquent le mouvement, les bruits, l'immensité; Le concert où serait cette scène tracée Regretterait encor la forme et la pensée, Et si la poésie essayait ces tableaux Pour suivre le ravage et la marche des eaux, Seule et sans les couleurs, les voix mélodieuses, Elle demanderait ses sours harmonieuses. Descends donc, triple lyre, instrument inconnu, O toi ! qui parmi nous n'es pas encore venu Et qu'en se consumant invoque le génie ; Sans toi point de beauté, sans toi point d'harmonie; Musique, poésie, art pur de Raphaël, Vous deviendrez un Dieu..., mais sur un seul autel! » Ainsi je lui parlais... |
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François de Vigny (1570 - ?) |
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Portrait de François de Vigny | |||||||||
Biografie / cronologieConformément aux préoccupations constamment manifestées par l'écrivain, nous avons étendu cette chronologie dans la direction du passé, à la recherche de la noblesse des ancêtres, et dans celle de l'avenir, à l'écoute des échos de l'ouvre renvoyés par la postérité. Bibliographie |
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