François de Vigny |
Suivi du Suicide impie, A travers les pâles cités. Le Malheur rôde, il nous épie, Près de nos seuils épouvantés. Alors il demande sa proie; La jeunesse, au sein de la joie, L'entend, soupire et se flétrit; Comme au temps où la feuille tombe, Le vieillard descend dans la tombe, Privé du feu qui le nourrit. Où fuir ? Sur le seuil de ma porte Le Malheur, un jour, s'est assis; Et depuis ce jour je l'emporte A travers mes jours obscurcis. Au soleil et dans les ténèbres, En tous lieux ses ailes funèbres Me couvrent comme un noir manteau De mes douleurs ses bras avides M'enlacent; et ses mains livides Sur mon cour tiennent le couteau. J'ai jeté ma vie aux délices, Je souris à la volupté; Et les insensés, mes complices Admirent ma félicité. Moi-même, crédule à ma joie, J'enivre mon cour, je me noie Aux torrents d'un riant orgueil; Mais le Malheur devant ma face A passé : le rire s'efface, Et mon front a repris son deuil. En vain je redemande aux fêtes Leurs premiers éblouissements, De mon cour les molles défaites Et les vagues enchantements : Le spectre se mêle à la danse; Retombant avec la cadence, Il tache le sol de ses pleurs, Et de mes yeux trompant l'attente, Passe sa tête dégoûtante Parmi les fronts ornés de fleurs. Il me parle dans le silence, Et mes nuits entendent sa voix; Dans les arbres il se balance Quand je cherche la paix des bois. Près de mon oreille il soupire; On dirait qu'un mortel expire : Mon cour se serre épouvanté. Vers les astres mon oil se lève, Mais il y voit pendre le glaive De l'antique fatalité. Sur mes mains ma tête penchée Croit trouver l'innocent sommeil. Mais, hélas ! elle m'est cachée, Sa fleur au calice vermeil. Pour toujours elle m'est ravie, La douce absence de la vie; Ce bain qui rafraîchit les jours; Cette mort de l'âme affligée, Chaque nuit à tous partagée, Le sommeil m'a fui pour toujours. Ah ! puisqu'une éternelle veille Brûle mes yeux toujours ouverts, Viens, ô Gloire! ai-je dit; réveille Ma sombre vie au bruit des vers. Fais qu'au moins mon pied périssable Laisse une empreinte sur le sable. La Gloire a dit : « Fils de douleur, « Où veux-tu que je te conduise ? « Tremble; si je t'immortalise, « J'immortalise le Malheur. » Malheur! oh! quel jour favorable De ta rage sera vainqueur ? Quelle main forte et secourable Pourra t'arracher de mon cour, Et dans cette fournaise ardente^ Pour moi noblement imprudente N'hésitant pas à se plonger, Osera chercher dans la flamme, Avec force y saisir mon âme, ' Et l'emporter loin du danger ? |
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François de Vigny (1570 - ?) |
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Portrait de François de Vigny | |||||||||
Biografie / cronologieConformément aux préoccupations constamment manifestées par l'écrivain, nous avons étendu cette chronologie dans la direction du passé, à la recherche de la noblesse des ancêtres, et dans celle de l'avenir, à l'écoute des échos de l'ouvre renvoyés par la postérité. Bibliographie |
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