François Villon |
Je meurs de seuf auprès de la fontaine, Chault comme feu, et tremble dent a dent, En mon pais suis en terre loingtaine; Lez ung brasier frissonne tout ardent; Nu comme ung ver, vestu en président, Je ris en pleurs et attens sans espoir; Confort reprens en triste desespoir ; Je m'esjouys et n'ay plaisir aucun; Puissant je suis sans force et sans povoir, Bien recueully, débouté de chascun. Rien ne m'est seur que la chose incertaine Obscur, fors ce qui est tout évident; Doubte ne fais, fors en chose certaine ; Science tiens a soudain accident; Je gaigne tout, et demeure perdent; Au point du jour, dis : « Dieu vous doint bon soir ! » Gisant envers, j'ay grant paour de cheoir; J'ay bien de quoy, et si n'en ay pas un; Eschoicte attens, et d'homme ne suis hoir; Bien recueully, débouté de chascun. De riens n'ay soing, si mectz toute ma paine D'acquérir biens, et n'y suis prétendant; Qui mieulx me dit, c'est cil qui plus m'attaine, Et qui plus vray, lors plus me va bourdent; Mon ami est qui me fait entendent D'ung cigne blanc que c'est ung corbeau noir; Et qui me nuyst croy qu'il m'aide a povoir. Vérité, bourde, aujourd'uy m'est tout un. Je retiens tout, riens ne sçay concepvoir; Bien recueully, débouté de chascun. ENVOI Prince clément, or vous plaise savoir Que j'entends moult, et n'ay sens ne sçavoir; Parcial suis, a toutes lois commun. Que sais je plus? Quoy? Les gaiges ravoir, Bien recueully, débouté de chascun. |
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François Villon (1431 - 1463) |
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Portrait de François Villon | |||||||||