Guillevic Sphère |
Alors il y avait la convergence De la mésange et du beau temps. L'air vers le soir Prenait le frais. Ses regards avaient des pouvoirs Sur les chemins, les interdits. Même chercher au-delà d'elle C'était aller selon sa loi, La promener Dans son royaume. Nuages, feuillages, Bouts de cailloux, bouts de brindilles, Cheminées, graminées, Le vent, le temps, et quoi? De ce qui passe, De ce qui reste Dessus, dessous, De ce qui vient, Qui ne vient pas, Ne viendra pas, Fleurs de granit, Oil de zénith, Eau mal tendue, Herbe dodue. Je suis présent, je vous attends. Je n'ai pas mal. J'ai entendu : Je crois que c'était un oiseau Et qu'il chantait. J'ai entendu : Bien sûr qu'il chantait, Que je passais par là. Je crois qu'il savait Que j'allais passer. C'était admis par les halliers, Par tous les champs, Par les chemins, le bas du ciel. Je savais que j'étais un peu De tout cela, de la confiance Que tout cela se donne En^de tels jours. Et l'oiseau, Est-ce que ce n'était pas Mon pareil, mon écho, mon autre, Peut-être moi tout simplement? Ce qui de moi n'est plus à moi, Qui s'est donné? Dans tout cet arbre Il n'y a pas de feuille Qui serait de toi plus parente Qu'une autre feuille. Toutes sont feuilles, Vivent l'air, la terre et la forme. Toutes vivront Ce que tu peux leur apporter. Ce n'est pas moi Qui creuse l'eau'de la fontaine Ou qui lui donne plénitude. Je suis près d'elle, Rien que près d'elle. Je peux y boire. Je voudrais plus. Être le soir qu'elle sera, Son épaisseur, Tout son silence. Plus que cela. Je voudrais te dormir, A toi-même t'ofïrir Quand la nuit sera noire, Te redonner à toi Quand viendront les regards Qui croient avoir des droits. Assis dans la barque, J'ai plongé mes mains dans les eaux du lac. Je voyais mes mains, Tu n'étais pas là. Je n'avançais pas, Tu n'étais pas là. Sur les paliers du vent, Se rire du dernier Que l'on vient de quitter Pour plus de ciel offert. Il y avait de la lumière dans cette nuit, Si c'était la nuit. C'était peut-être le jour, et la lumière Était celle du soleil. Ou bien la lumière Venait d'ailleurs, Du ciel ou d'un coin de la terre. Peut-être même De quelqu'un qui serait moi. Par la rose trémière Que le vent a couchée Et dont le rose blanc Invoque ce qui passe, Par la rose trémière Qui demeure debout Et tend contre le jour Du rouge mal reçu, Avance encore un peu. Je maugréais la plaine, Le nuage et le ciel, Ce qui se laisse voir Du passage du vent, Tant de choses montrées Que j'approchais de moi. Qu'est-ce que je profère Lorsque tout veut se taire? Qu'est-ce qui se profère Alors que je me tais? L'oiseau vient, on dirait, En survolant la grange, De franchir quelque chose Qui pourrait être une frontière, Un interdit, De sortir d'un espace Où crier se condamne. Il reste oiseau. Il vient vers toi. On entre dans des chambres. C'est facile. Chacun le fait. Dans des cours, dans un lit, Dans un bois, dans la grange. Il suffît de venir d'un endroit plus ouvert, D'avancer, de pousser La porte quelquefois, de se glisser. Mais entrer dans l'espace ouvert Quand il fait clair Et se sentir enveloppé par un volume Qui n'est pas dit. |
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Guillevic Sphère (1907 - 1997) |
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Portrait de Guillevic Sphère | |||||||||
La vie et l'Ouvre de guillevigGuillevic est né à Carnac (Morbihan) le 5 août 1907. BibliographieGuillevic était l'un des poètes majeurs de notre temps, avec une oeuvre dépouillée, cristalline et forte, traduite en plus de quarante langues dans 60 pays. Pour lui, la poésie permettait de maîtriser l'inquiétante étrangeté des choses. Sa langue dans de courts textes, était précise, dépouillée et travaillée au point qu'un critique avait qualifié sa poésie, d'aiguë et brillante comme un rocher bre |
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