Hédi Kaddour |
L'une avait des cheveux blonds Et ne les penchait guère Que sur les redoutables héros de ses livres. Quand ils se battent pour une captive Aux jambes encore entravées; l'autre Portait un corsage couleur de lièvre Sans rien d'éperdu dans sa forme Et s'essayait au tremblé de la voix Pour faire vrai quand elle disait qu'aucun air N'innocente un monde à faux proverbes Et meurtres cachés. Elles avaient appris À se connaître en aimant Hamlet Et les hommes hésitants, à Stratford, Comme il convient. Dans la fumée, Les cris du pub, l'acteur démaquillé Avait aussi lampe des bières sans fin, Tandis qu'Ophélie riait chaque nuit De plus en plus haut, en gagnant Contre de vrais gaillards Des parties de fléchettes rouge et or. Les gens parfois chantaient O mistress mine.. Et certains finissaient par se prendre la main. Il y eut même un soir une vraie foudre : Edmund, Bâtard de Lear, et le silence chargé d'armes Soudain, de craquements de planches, De mots obscènes contre les héritiers : Toi, Nature, Ô ma déesse... Elles rentraient tard, Sous un vertige d'étoiles, festin de rythmes Filant par-delà les questions vers l'ombre bleue, Buissons, flocons et lèvres de la rivière. Cherchant l'issue, cherchant les impensables Fleurs lucides, et s'arrêtant ensemble Au rebord de jardins ensauvagés pour mieux S'imaginer chaque syllabe sans cesse À bout de branche, à bout d'idée Nouvelle et de dépense avide : comment Échapper au legs, comment devenir Quelqu'un d'autre, à sa juste distance. Et moyen pour les yeux de ne jamais Durcir ce qu'ils regardent, même quand La vie va prendre cette forme unique : À l'avenir présentez-vous dans les délais. Quelque chose était là malgré tout dans les haies Parmi les liserons ; il faudrait vingt ans D'oubli pour en retrouver la douceur. |
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Hédi Kaddour (1945 - ?) |
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Portrait de Hédi Kaddour | |||||||||