Jacques Dupin |
Comme il est appelé au soir en un lieu tel que les portes battant sans fin facilitent ou dénouent le tête-à-tête hors de la crypte forestière il la traîne au grand jour, ou plutôt il lui parle il la dénude parmi les rafales de vent ou plutôt il commence à se taire avec une telle fureur dans les rayons ae la lumière verticale une lelle émission de silence comme un jet de sang qu'elle se montre nue dans sa parole même et c'est un corps de femme qui se fend Par une allée d'iris et de boue écarlate descendant à la fontaine la tarir... mais toute l'humidité antérieure revêtait la roche comme si nos lèvres s'étaient connues jadis sans le feu de la rosée qui monte, sa dot, l'innombrable et l'évanouie.. transparence têtue elle flambe elle environne de ses tresses un pays qui reprend souffle et feu N'être plus avec toi dès que tu balbuties la sécheresse nous déborde le cercle de tes bras ne s'entrouvre que pour mieux ne rien dire selon l'heure et le parfum et quel parfum se déchire vers le nord, l'issue dérobée... peut-être ton visage contre le mien, quand bien même tu me mènerais, encapuchonné, sur ton poing, comme aux premières chasses de l'enfer Au-delà du crissement d'une sandale dans l'allée soustraite au silence elle a glissé elle aussi à cet oubli de soi qui culmine et s'inverse en un massif de roses calcinées aveuglante énumération de ses haltes et de ses périls réciprocité de dentelles entre son visage et la nuit j'extrais demain l'oubli persistant d'une rose de la muraille éboulée et du cour sans gisement Plus lourde d'être nue ses vocalises meurtrières son rire au fond de mes os notre buisson quotidien les balafres de la lumière A se tendre à se détendre sur les traces secourues omis se dégager femme tout à fait du bestiaire indistinct qui la presse parmi tant de pieux incantatoires fichés dans le matin roule et grossit le soliloque de la noue fade usurpatrice elle dort et me hait j'ai négligé son dénuement elle se tient un peu plus haut ombre démesurée d'une roue de charrette sur le mur lourdement vivant Nulle écorce pour fixer le tremblement de la lumière dont la nudité nous blesse, nous affame, imminente et toujours différée, selon la ligne presque droite d'un labour, l'humide éclat de la terre ouverte... étouffant dans ses serres l'angoisse du survol le vieux busard le renégat incrimine la transparence vire et s'écrase à tes pieds et la svelte fumée d'un feu de pêcheurs brise un horizon absolu Sinon l'enveloppe déjà déchirée avec son précieux chargement le heurt sous un angle stérile de la hanche qui luit comme si l'étrave en était lisse sous la ligne de flottaison mais Je mouvement de la barque rendit plus assurés l'écriture l'amour tels un signe tracé par les oscillations du mât au lieu des étoiles qui sombrent entre le rideau bruyant et l'odeur de ses mains sur la mer Sous le couvert la nuit venue mon territoire ta pâleur de grands arbres se mouvant comme-un feu plus noir et le dernier serpent qui veille en travers du dernier chemin fraîcheur pourtant de la parole et de l'herbe comme un souille la vie durant Ce qu'une autre m'écrivait comme avec une herbe longue et suppliciante toi, toute, en mon absence, là, dans le pur égarement d'un geste hostile au gerbier du sang, tu t'en délivres tel un amour qui vire sur son ancre, chargé de l'ombre nécessaire, ici, mais plus bas, et criant d'allégresse comme au premier jour et toute la douleur de la terre se contracte et se voûte et surgit en une chaîne imprévisible crêtée de foudre et ruisselante de vigueur Musique éclatée ciel sifflant dans un verre fraîcheur du soleil sous la brûlure de la peau le même sifflement mais modulé jusqu'au silence qui sourd de tes plissements de granit, scintillante écriture le même sifflement lance le tablier du pont sur ses piles de feu où tombera-t-il noir le fruit méridien si je franchis le bras de mer une pierre l'étreint et s'efface le livre ouvert sur tes reins se consume avant d'être lu Agrafes de l'idylle déjà exténuée pour que ce qui fut immergé respire à sa place, dans l'herbe, à nouveau, et de la terre, toute, presque anéantie ou comblée bord à bord par l'enracinement de la foudre sauf la respiration de cette pierre nocturne, le théâtre tel que je me vois, l'anticipation d'un brasier sans son cadavre retourné un autre traversera la passe dans la mémoire de grandes étendues de neige brillent entre chaque massacre Sorbes de la nuit d'été étoiles enfantines syllabes muettes du futur amour quand les flammes progressent de poutre en poutre sous nos toits exiguë la définition du ciel Nous dégageant, nous, de l'ancienne terreur ou de cet enrouement par quoi les racines mêmes s'expriment,- s'allégeant... que ce soit le silence ce qui était présent, là, trop exposé depuis l'aube, sur le sol fraîchement retourné, l'ingratitude ou la légèreté des hommes, avec le vent, je me dresse dans l'étendue, seul, contre cette lumière qui décline, le bâillon rejeté ... que ce soit le silence lentement déployé qui règne déjà nécessaire, déjà opprimant Par la déclivité du soir le secret mal gardé je la blesse au défaut de sa lecture le vent répare les accrocs enclume ou catafalque d'étincelles avec ce qui naît et meurt au bord de sa lèvre acide ciel pourpre et montagne nue elle se penche et je vois au-delà de la ligne de son épaule mon enfance troglodyte dans la paroi violette où le soleil couchant se brise comme un pain. elle se penche je vois... |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Jacques Dupin (1927 - ?) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Jacques Dupin | |||||||||