Jaufré Rudel |
Quand la source du ruisseau S'éblouit de soleil neuf Quand naît la fleur d'églantier Quand au bois le rossignol Module, affine, répète Sa chanson qu'il veut parfaite, Je reprends le mien refrain. Amour de terre lointaine Pour vous j'ai le cour dolent. À mon mal point de remède Si l'amie tant désirée Par attrait, par soif d'union, Ne m'appelle à l'unisson En chambre close ou verger. Si mon cour reste impuissant Puis-je m'étonncr qu'il brûle ? Dieu n'a pas voulu qu'on vît Jamais plus belle chrétienne. Ni Juive, ni Sarrasine ! Pour qui goûte à son amour C'est festin tombé du ciel. Étemelle soif du cour ! À elle seule j'aspire. Mais si me prend convoitise Mon désir sera douleur Car plus piquant que l'épine (Allons, je ne m'en plains pas !) Est ce mal que Joie guérit. Sans lettre ni parchemin J'envoie ces vers à chanter En simple langue romane À Uc le Brun, par Filhol, Et que les gens du Poitou, Berry, Guyenne et Bretagne Aient plaisir à les ouïr. Chanson Quand les jours s'allongent en mai Me plaît un chant d'oiseaux lointain Et de ce doux lieu éloigné Me revient un amour lointain. Je vais pensif les yeux baissés, Chant dans l'arbre et fleur d'églantier Me sont comme gelée d'hiver. J'ai foi en Dieu le Seigneur vrai. Je verrai donc l'amour lointain. Mais pour un bien qui m'en échoit J'ai deux maux, tant il m'est lointain. Si j'étais au loin pèlerin Ses beaux yeux peut-être verraient Mon bourdon et ma couverture ! Quel plaisir de lui demander, Au nom de Dieu, abri lointain ! Et s'il lui plaît je logerai Tout près d'elle, moi le lointain. Quels mots charmants nous nous dirons. Et quelle paix nous en aurons. Ami lointain si proche d'elle ! Triste et joyeux je quitterai (si je la vois) l'amour lointain. Je ne sais quand la reverrai. Car nos pays sont trop lointains. Si nombreux sont chemins et routes ! Comment savoir ce qui viendra ? Qu'il en soit comme Dieu voudra ! Jamais d'amour ne jouirai Si je n'ai cet amour lointain. Je n'en sais plus doux ni meilleur. D'aucune part, proche ou lointain. Son mérite est d'un si grand prix Que je voudrais me trouver pris Au loin en terre sarrasine. Dieu qui fit toutes choses vives Et créa cet amour lointain Qu'il veuille ce que veut mon cour Voir un jour cet amour lointain En vente, ou que ce soit Moindre chambre ou moindre jardin Me seraient toujours un palais ! Quelqu'un m'appelle et c'est bien vrai L'homme au désir d'amour lointain Car nulle autre joie ne me plaît Comme jouir d'amour lointain Mais mon désir m'est ennemi Mon parrain me l'avait promis Je suis amant sans être aimé Mais mon désir m'est ennemi Que maudit soit qui a voue Mon cour à n'être point aimé ! |
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Jaufré Rudel (1113 - 1170) |
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