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Jaufré Rudel



L'amour de loin - Poéme


Poéme / Poémes d'Jaufré Rudel





Lorsque les jours sont longs en mai,

Doux me sont chants d'oiseaux lointains,

Et quand ai fini d'écouter,

Me souviens d'un amour lointain.

Je vais courbé par le désir,

Sans que chants ni fleurs d'aubépine

Me plaisent plus que l'hiver glacé.



Que le
Seigneur, certes je crois,
Me fera voir l'amour lointain.



Mais pour un bien qui m'en échoit
J'ai deux maux, tant il m'est lointain.
Ah, qu'il me fasse pèlerin
Pour que ma cape et mon bâton
Par ses beaux yeux soient contemplés !

Que de joie à lui demander,
Par amour
Dieu, l'abri lointain,
Et s'il lui plaît je logerai
Près d'elle, moi qui suis lointain.
Quel doux parler on entendra
Quand le lointain on verra bien,
A quels beaux dits on se plaira !



Triste et joyeux, m'en reviendrai

Si je le vois, l'amour lointain.

Mais qui sait quand je la verrai,

Car trop sont nos pays lointains.

Que de chemins et de passages,

Et pour savoir ne suis devin...

Mais que tout soit comme à
Dieu plaît.



Jamais d'amour je n'aurai joie,
Sinon de cet amour lointain,
Car plus gente ni meilleure ne sais
En nul endroit proche ou lointain.
Elle est si belle et franche et pure
Que voudrais être aux
Sarrasins
Pour avoir droit de l'acclamer.



Dieu qui fit tout ce que l'on voit
Et forma cet amour lointain,
Me fasse don, que n'ai au cour,
Que je vois cet amour lointain,
Réellement, en tel asile,
Que la chambre et que le jardin
Me semblent toujours un palais.



Il dit vrai celui qui m'accuse
De désirer amour lointain.
Car autre joie tant ne me plaît
Comme jouir d'amour lointain.
Mais mon désir est repoussé.
Mon parrain m'a jeté le sort
Que j'aime et que ne sois aimé.

Mais mon désir est repoussé :
Qu'il soit donc maudit le parrain
A qui je dois de n'être aimé !

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Jaufré Rudel
(1113 - 1170)
 
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