Jean Claude Renard |
Chaque amitié fut docile Dans les pins de ma presqu'île. Son sable tendre aux talons Louait le thé, le houblon. Une estime s'échangeait Entre le sang et le lait. Même la neige apparue Avait saveur de laitue. Cependant tout se dépouille Qui fit la flamme - et se souille. Les oufs pourrissent. Le beurre A le rance de nos demeures. Ô feu patient dans les puits Ta mort, ton néant, ta nuit, Le vendredi solitaire Qui creuse assez toute terre Éveillent seuls ce silence Qui nomme en moi ta présence! Un sol désert et brûlé Doit faire naître les prés. Mise au vent la cosse vide Il faut que l'âme s'oxyde. Il faut que l'être se lave Dans ton absence et ta lave Avant que l'or insulté N'en régénère l'été. Ce sang perdu comme un pas N'a densité que d'en bas. - Des basses eaux, de la cendre Où l'arme aussi doit descendre. Les statues marchent, s'attardent Dans une mort tiède et fade. J'ai mon amour ennemi. Ses sables m'ont endormi. Qui charmera d'un chevreuil Les longues salles de deuil? Ma bouche bourbeuse, vide Crie par morsure d'acide Sur le silence aggravé. Un feu survient du névé! Pommier mûr - hutte d'ermites L'âme mangée de termites! L'âme tentée et moulue Déjà le fleuve l'influe. Ô rubis dans la sciure Ce délire qu'elle endure ! Ce vou dur comme l'épeautre D'écarter ce ciel et l'autre Pour n'aimer que ton amour Je n'en sais que les détours. Je n'en ai dans ma maison Que le crin et les tessons. Feu nourri ou feu perdu - Sous le givre est ma tribu ! Où que mon amour halène La mer chaude comme un renne Le gel me lient à l'aboi Dans la difficile foi. Ce vide en moi qui désigne La profusion et ses signes, Ces cailloux profonds, ces pères Dont le secret persévère, La part de sang à payer. Suffit-il, pour s'exempter. De les faire inexister En epierrant chaque place Que le vendredi angoisse? Ni le malheur ni la mort N'ont l'apanage du tort. Perdre est simple - non garder. Tout porte assez de tisons Pour consumer ses chardons. Mais il n'est pas de colère Qui délivre du mystère ! Un dieu soudain ne se donne Dans la douleur de l'automne Que comme un dieu qui n'est pas! Septembre fut sur les prêles D'oiseaux fugaces, de grêles. Sans ce berger, près du gué. Je n'aurais pas navigué. Un ongle nu sur le plomb Mit la figure - le nom. Par fracture d'un galet J'eus don de cidre et de lait. Plus rien n'était légendaire Dans les grands cercles de pierre. La lunaison accomplie Brûlait la mélancolie. Il suffisait au festin De ce fromage, ce pain. Ô transparence des choses Quand la lumière n'y manque - Comme dans l'eau des calanques L'éclat des daurades roses! S'il n'y a plus de merveilles Sous les platanes détruits C'est pour qu'enfin je m'éveille Sans rien qui force ma nuit. J'hérite d'être du sang De ce corps neuf et sacré Qui croît déjà dans le temps. La mort, alors, sera juste. |
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Jean Claude Renard (1922 - 2002) |
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Portrait de Jean Claude Renard | |||||||||
BibliographieJean-Claude Renard (1922 - 2002) est un poète et écrivain prolifique français né à Toulon. Son ouvre, empreinte de mystères et de spiritualité, lui valut le Grand Prix de poésie de l'Académie française en 1988 et le Prix Goncourt de la poésie en 1991. Il fut l'un des collaborateurs des Éditions du Seuil et des Éditions Casterman. Il est également l'auteur de plusieurs essais. Il entra dans le mond Biographie |
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