Jean Orizet |
Midi qui roule à gauche entraîne le voyageur sur des océans d'ale ou de bitter, et toute cette bière en parapluies, prisonnière des gentlemen, monte, sans baisser la tête, dans les taxis noirs, les autobus rouges, les métros argentés, descend avec majesté la Tamise, jusqu'à l'heure du whisky pur malt et du sherry. L'aube. Remontant Queen's Gâte au petit trot, crépitent les chevaux de la Reine. Dans les hôtels à colonnes, les vieilles Anglaises vont bientôt prendre leur porridge arrosé de thé. Elles se déplacent difficilement, presque mortes déjà, leurs visages plissés-poudres disent tout le regret d'avoir perdu leurs canaris et puis l'Empire. De sa gloire passée, tous les témoins sont là, sous turbans et keffiehs, à se faire soigner les dents, les yeux, le cour, tapis au fond des limousines. Le long des trottoirs, l'ordure sous plastique ourle les murs de brique: la fin de semaine a commencé. Dix heures; quai numéro huit en gare de Victoria. Une Française rousse pleure sur l'épaule de l'amant qu'elle va quitter. Douze heures trente ; la brume efface la craie sur les falaises de Folkestone. L'Angleterre est une île. |
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Jean Orizet (1937 - ?) |
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Portrait de Jean Orizet | |||||||||
OuvresAprès avoir pratiqué le métier de journaliste, Jean Orizet devient le cofondateur, en 1969, de la revue Poésie 1 et travaille comme éditeur aux éditions du Cherche-midi. Ecrivain, voyageur et humaniste, ses textes, dont 'L' Attrapeur de rêves' ou 'La Cendre et l'étoile', lui permettent de figurer au rang des poètes les plus importants de sa génération. |
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