Joseph Marie Loaisel de Tréogate |
Mon oil est fatigué de ce jour homicide... Le temps s'appesantit dans sa course rapide ; Il semble sur ces lieux voler plus lentement. Et pour voir mes douleurs, s'arrêter un moment. Tel souvent, le vautour dans sa vorace joie, Plane et semble immobile en déchirant sa proie ; Tel le temps destructeur de mes frêles plaisirs, Sur moi pèse, entouré de mortels souvenits. Ô soleil! va porter dans un autre hémisphère Ton flambeau trop ptopice aux crimes de la terre. Tu vis ces bienfaiteurs du vulgaite admirés, Jetet avec éclat leurs dons déshonorés. Répandre en même temps, par une affreuse injure, Le baume et le venin dans la même blessure. Outrager l'infortune en lui tendant les bras. Et s'étonner encor de trouver des ingrats. Tu vis la terre ouverte en d'immenses abîmes, Frémir de dévorer des mondes de victimes : Et ces monstres heurtant les bouts de l'univers. Revenir furieux l'écraser sous ses fers. La tendre humanité, sous leurs pieds renversée. Dans son sein refoula sa plainte méprisée. Tu le vis, ô soleil, et ton front radieux. Tranquille, a poursuivi sa marche dans les Cieux. O nuit ! Viens me couvrir de tes noires ténèbres ! Tu servis les forfaits et leurs trames funèbres ; Mais le juste effrayé des attentats du jour, Se sauve dans ton ombre, heureux de ton retour. C'est là qu'il se retrouve et vit avec lui-même. C'est de là qu'emporté vers la voûte suprême, Et laissant sous ses pieds ce globe malheureux, Pour les faibles humains il va prier les dieux. Vous qui, nés sous la pourpre, au milieu des grandeurs. Folâtrez sans plaisir sur des touffes de fleurs, Qui jamais de pleurer ne connûtes les charmes. Je vois déjà vos ris insulter à mes larmes ; Vos âmes sans retour promises au néant. Ne pourraient tressaillir au cri du sentiment. Vos froides passions qu'aucun attrait n'aiguise. Le chagrin, le plaisir, rien ne vous électrise. Je n'ai point vos palais, mais je possède un cour. Il s'épura longtemps au creuset du malheur ; Dans mes maux, je lui dus la force et la confiance, Par lui j'ai quelquefois adoré l'existence. Foyer toujours ardent, jouissant de ses feux, Il eut des voluptés que n'ont pas les heureux. |
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Joseph Marie Loaisel de Tréogate (1752 - 1812) |
Portrait de Joseph Marie Loaisel de Tréogate |