wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 

Julien Gracq



Le grand jeu - Poéme


Poéme / Poémes d'Julien Gracq





Ce je ne sais quoi d'inconsistant qui flotte sur les quartiers proches des gares

- la fécondité des grands nuages blancs de juin sur les prairies vertes, tout mangés d'azur sur les bords comme des veines bleues qui deviennent lait dans une mamelle

- ce tendre glacis d'eau sur les yeux, sur les lèvres, cet ombilic de Vénus anadyomène par où baignera toujours pour moi dans quelle eau-mère la plus touchante des femmes

- le hérissement soudain des eaux et des feuilles dans la lumière poudreuse d'un matin d'été brumeux le long des prairies couchées et des saules des grands fleuves

- ce choc au cour devant les paysages solennels de clairières, plus émouvantes entre les lisières de forêts rangées que le champ de bataille encore vierge, le concert prodigieux de silence qui sépare deux armées avant le chant de la trompette

- ce tendre rose de fleur, cette effusion de pétales qui s'éveille au cour du métal chauffé et rougit pour moi seul les grands drapeaux de tôle, l'estampage immaculé des arums et des lis,

- le crépuscule soudain, la petite mort mélancolique des cloches dans les après-midi écrasés de soleil des dimanches - les grands sphinx qui s'allongent au crépuscule sur les étangs brumeux des stades

- le front à perte de vue sur les plaines d'un bois de légende comme le mur d'une cataracte de silence

- aux douze coups de minuit le fantasme interdit d'un théâtre d'or et de pourpre, glacé, nacré, cloisonné, lamelle comme un coquillage, déserté comme une termitière après l'égorgement rituel, dans un maëlstrom de pinces et de griffes, du couple royal

- les délirantes géométries euclidiennes des gares de triage

- les majestueuses processions de meubles d'un autre âge, les grands charrois de lits-clos des trains de marchandises,

- le visage souverain, clos et scellé comme un marbre, d'un coureur de demi-fond suspendu au-dessus d'un virage, comme un homme qui plonge à cheval dans la mer

- le mancenillier abondant des lustres de Venise

- le charme des forêts désaffectées des environs de Paris, où parfois un seul château d'eau veille sur d'immenses solitudes

- j'ai parfois songé à retourner ces vignettes obsédantes, ces tarots d'un jeu de cartes fourbe

- à chercher pour qui ces figures à jamais en moi singulières pouvaient n'avoir qu'un même envers.

Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.

Julien Gracq
(1910 - 2007)
 
  Julien Gracq - Portrait  
 
Portrait de Julien Gracq

Biographie / Ouvres

1910
- Naissance de Louis Poirier le 27 juillet à Saint-Florent-le-Vieil dans le Maine-et-Loire, région des Mauges, dans la maison du grand-père paternel.

mobile-img