Léo Ferré |
Sans latitude sans un sou le cul cloué A cheval sur l'atlas où ma fille besogne J'ai l'oil morne du voyageur qui s'est gouré Et qui rentre au bordel pour vider sa vergogne Le slip barricadé et la pantoufle au vert Des cover-girls vissée(s) au mur qui se lamente Une Bible qui bâille un psaume de travers Et ma feuille d'impôts qui me ronge la rente Il pleure dans ma cour des chats de Tahiti Des clitoris germains des lèvres sous-marines Et ma sirène m'accompagne dans le lit Au son du pot-au-feu qui meurt dans la cuisine Dans ses yeux Niagara je noie l'alexandrin Dans sa gaine je sens pourrir toute l'Afrique Mon sexe géographe et la carte à la main Je la viole à New York et m'endors en Attique J'ai fait l'amour avec Saturne au Bal à Jo L'accordéon crissait des javas hérétiques Sur le Mont de Vénus et ma croix sur le dos Je suis mort cette nuit en fumant des Celtiques Neuilly Honolulu mon sperme s'est caillé J'ai shunté ma goualante aux îles Caroline Et porte ce matin mes sens dépareillés Au lav' heure du coin où sèche Proserpine Les fleurs de Nouméa se fanent à Paris Les robinets suintants musiquent des tropiques Je suis là et mon âme est coincée à demi Entre un vieux pull-over et des couilles laïques J'ai un railway dans l'âme et je tourne de l'oil Vomissant alentour mes reliefs migratoires La voie lactée a fait pipi dans son fauteuil Et je me suis cassé la gueule dans le square Miserere de l'avenue aux pieds rivés Des albatros venus d'on ne sait où jouissent Des rimes de nylon au cul du vieil été Qui se meurt dans le ciel en vieilles cicatrices Il y'a des astres retraités chez Ripolin Qui cherchent un emploi en dorure sur tranche Et des étoiles d'or qui sont dans le pétrin Ça pue l'éternité sur les façades blanches Ah l'avion qui là-haut métallisé l'azur Les coliques de Dieu dégueulent du pétrole Je crois en toi Seigneur et j'ai mal au Futur Aux quat' cent vingt et un j'ai paumé l'Acropole Le soleil s'est couché ce soir avec ton gars Le fils de l'homme avait du spleen dans sa musette Un vieux compte à régler avec la lune en bas Qui se soûlait la gueule avec un faux poète |
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Léo Ferré (1916 - 1993) |
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Portrait de Léo Ferré | |||||||||
biographiePoète... vos papiers !, poèmes (La Table ronde, 1956) La Nuit, feuilleton lyrique (La Table ronde, 1956) Mon programme, plaquette auto-éditée (1968) Benoît Misère, récit (Robert Laffont, 1970) Il est six heures ici et midi à New York, plaquette auto-éditée (Gufo del Tramonto, 1974) Je parle à n'importe qui, plaquette auto-éditée (Gufo del Tramonto, 1979) |
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