Léo Ferré |
J'ai tant pleuré que je n'ai plus Le souvenir de mes alarmes Car j'ai versé jusqu'à la larme Qui me donnait l'air ingénu Et si mon cour n'est pas plus pur Que la source où boivent mes rêves C'est qu'il est transpercé de glaives Et qu'il reste criblé d'azur Si j'avais les yeux du Bon Dieu Je me les crèverais Et pour amuser les curieux Je les leur donnerais Et par ces fenêtres nouvelles Ils verraient ce « qu'on a cru voir » Tous les millions de désespoirs Vomis par mille clientèles Si j'avais »es yeux du Bon Dieu Je pleurerais des larmes rouges Et jusqu'au plus profond des bouges J'apporterais la paix des cieux J'ai tant battu la vanité Que le sang me monte à la tête Moi qui croyais être à la fête Et qui vis dans l'absurdité Le grand amour que j'ai conçu Pour les humains de la déroute A terminé sa longue route Et je demeure un invendu Si j'avais les mains du Bon Dieu Je me les couperais Et pour aider les pauvres gueux Moi je les leur coudrais Sur les moignons de la misère Dans les coulisses du bonheur Ils pourraient se pétrir des cours A renverser la terre entière Si j'avais les mains du Bon Dieu Je giflerais la bourgeoisie Et trouverais des chirurgies Pour occuper ces beaux messieurs J'ai tant chante les desespoirs Que ma voix s'est humanisée Et qu'elle semble être passée Sur de sinistres abattoirs Je me fous de leur « rédemption » Et je ne crois pas aux miracles Car dans l'enfer de mes débâcles Satan n'est qu'un échantillon Si j'avais la voix du Bon Dieu Je l'humaniserais Et dans le micro des pouilleux Je l'emprisonnerais Et sur les ondes migratrices S'envolerait le chant nouveau Qui bercerait tous les salauds A la recherche des polices Si j'avais la voix du Bon Dieu Je gueulerais dans le silence De l'éternelle voûte immense QUE L'ON PRÉTEND ÊTRE LES CIEUX |
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Léo Ferré (1916 - 1993) |
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Portrait de Léo Ferré | |||||||||
biographiePoète... vos papiers !, poèmes (La Table ronde, 1956) La Nuit, feuilleton lyrique (La Table ronde, 1956) Mon programme, plaquette auto-éditée (1968) Benoît Misère, récit (Robert Laffont, 1970) Il est six heures ici et midi à New York, plaquette auto-éditée (Gufo del Tramonto, 1974) Je parle à n'importe qui, plaquette auto-éditée (Gufo del Tramonto, 1979) |
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