Léon Dierx |
Je suis tel qu'un ponton sans vergues et sans mâts, Aventureux débris des trombes tropicales, Et qui flotte, roulant des lingots dans ses cales, Sur une mer sans borne et sous de froids climats. Les vents sifflaient jadis dans ses mille poulies. Vaisseau désempare qui ne gouverne plus, Il roule, vain jouet du flux et du reflux, L'ancien explorateur des vertes Australies ! Il ne lui reste plus un seul des matelots Qui chantaient sur la hune en dépliant la toile. Aucun phare n'allume au loin sa rouge étoile ; Il tangue, abandonné tout seul sur les grands flots. La mer autour de lui se soulève et le roule, Et chaque lame arrache une poutre à ses flancs ; Et les monstres marins suivent de leurs yeux blancs Les mirages confus du cuivre sous la houle. Il flotte, épave inerte, au gré des flots houleux, Dédaigné des croiseurs aux bonnettes tendues, La coque lourde encor de richesses perdues, De trésors dérobés aux pays fabuleux. Tel je suis. Vers quels ports, quels récifs, quels abîmes, Dois-tu les charrier, les secrets de mon cour ? Qu'importe ? Viens à moi, Caron, vieux remorqueur, Ecumeur taciturne aux avirons sublimes ! |
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Léon Dierx (1838 - 1912) |
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Portrait de Léon Dierx | |||||||||