Louis Aragon |
Léger Léger marchons légère Léger marchons légèrement Les gens rencontrés à la guerre Léger te ressemblaient beaucoup C'étaient des Français de naguère Un cache-nez autour du cou Grands ou petits blonds bruns ou roux Qu'y faire Ils s'organisaient dans l'enfer Ces grands enfants de n'importe où Avec leurs gamelles de fer Nés autrement que dans les choux Affaire affaire d'atmosphère Quatorze ou quarante c'est tout Comme Tiens ça ne rime plus ces vers Les toits sont rouges les champs verts Léger Léger marchons légère Léger marchons légèrement Ce monde est un immense camouflage où la couleur et l'ombre Cachent l'homme et le découvrent tour à tour Comme s'il glissait entre des panneaux ou des cartes Il ne faut pas trop se presser pour abattre son jeu Car même pris la main dans le sac Ou dans quelque flagrant délit de rêve Même dans les phares inventés pour trouver la nuit devant les voitures Même sur un de ces sacrés plateaux de gadoue et de craie Qui sont comme le dos de la main et encore à cause des poils la comparaison Pèche Dans ces bleds si désespérément plats que c'est vraiment trop commode D'y tirer l'homme ou le lièvre sans qu'il y trouve une ride ou un trou Pour faire son plongeon Même sur le billard avec le ventre ouvert Il y a toujours moyen de se sentir confortable comme dans une forêt Avec des feuillages pour toutes les sortes de pudeur Le camouflage croyez m'en ça c'est du grand art dans la vie Le génie après tout c'est savoir se déguiser en courant d'air Quarante villes croient avoir mis Homère au monde et lui pardon Pas si aveugle que tout ça Vous voyez ce que je veux dire Non Eh bien Richard Wagner Va toujours le chercher entre ses Walkyries Heïotoho Heïotoho tout juste un profil sous son béret de velours Mais si tu tombes dans la peinture alors pour le courant d'air On peut s'en payer une pinte II y a Le courant d'air Durer et le courant d'air Botticelli Par exemple Suivant que tu fais dans la frisette ou le cuir repoussé Quant à l'impressionnisme en matière de camouflage il se pose la Mais voilà nous autres le tout venant pour se faire oublier Il faut dire ce qui est mon vieux on manque de technique C'est tout le temps comme si nous on se baladait en bannière Et puis je vais t'avouer quelque chose Moi je n'ai jamais tout à fait pu me faire aux feuillées Pas tant la gêne du public que bicose le désinfectant Un champ le peintre il y est à son centre Toutefois Il ne faut pas confondre gogues et Van Gogh Et tant pis si cette plaisanterie un tantinet scatologique Échappe légèrement au fantassin de deuxième classe Tout cela à propos de cagnas parce qu'on ne peut pas passer toute sa vie À fignoler des bagues en aluminium Et pour ce genre-là de conversation mon ami Guillaume Apollinaire Eh bien il en connaît un bout Il a même inventé quelque chose qui ressemble à du camouflage parlé Il appelle cela des calligrammes et c'est vrai que c'est joli à voir Pourquoi c'est vrai Parfois Fernand Tu dis des mots dont on ne voit pas pourquoi Comme cette idée à toi de m'appeler Professeur moi qui n'ai pas mon Certificat d'Études Tu parles si tu peignais pareil tu parles C'est alors que ce serait du joli J'ai dit C'est vrai parce que c'est vrai que c'est joli Et puis calligrammes c'est comme quand tu as de belles fesses Professeur On dit voyez-vous le Professeur il est salement callipyge Tu piges Non II faut avouer qu'il n'y a pas beaucoup de quoi rêver chez toi côté fesse Et puis tu ne m'amuses pas Professeur va-t-en voir s'il pleut Que je me camoufle dans la solitude À l'état d'esquisse une silhouette sous ues halos bruns et jaunes Du léopard du véritable léopard Comment tu ne sais pas ce que c'est que le léopard On n'en voit pas dans ton village Professeur Et les roses malabars à moustaches qui font des haltères le; jours de marché C'est une culotte de quoi qu'ils ont si tu n'as jamais vu de léopard À vrai dire la peinture c'est toujours un peu du léopard Nous seulement on fait des poids avec autre chose Et si tu n'as jamais vu de léopard tu as vu de la peinture Alors tu en as un petit aperçu du léopard On se langue à dire ce qu'on a dans la tête Eugène passe-moi le mirliton Léger Léger il pleut bergère Le monde est en dérangement Qu'importe si je mens ou j'erre La guerre n'est pas passagère Et l'homme y fait son logement Marchons marchons marchons légère Sans bousculer les étagères Sans casser la crosse aux fougères Car c'est toujours le régiment Léger Léger marchons légère Léger marchons légèrement Pardonnez pardonnez-moi ce langage Tout est à réinventer les mots comme les gens Mais je vous dis que Fernand Léger ressemblait à s'y méprendre À vous et moi peut-être dans le format au-dessus voilà tout Et quand nous étions couleur d'horizon J'ai connu des types qui disaient encore J'avons Comme s'ils sortaient tout droit de Molière Ce ne serait plus possible maintenant Que tout le monde parle comme la radio même dans les betteraves Avec Jean-Sébastien Bach à l'accompagnement Des gens qui ne croyaient à rien prêts pourtant à tout croire Tous à la même enseigne et je voudrais vous les montrer Parce que la poésie à l'inverse de la peinture est faite Pour montrer l'homme et non point le camoufler Aussi croyez-moi c'est une chose très dangereuse en temps de guerre Je voudrais vous montrer Fernand Léger Ce grand gaillard avec des taches de rousseur et la moustache en brosse La bouche amère quand il ne rit pas mais il rit souvent Il se gratte la tête devant le monde et tout le jette dans la perplexité Il y avait des jours qui n'en finissaient plus Et depuis longtemps on n'avait plus rien à apprendre les uns des autres Ni comment se planquer ni sur les molletières C'est cela les tranchées Pourtant il renaît peu à peu des différences Le caractère et les façons de chacun Il y a ceux qui chantent la romance et ceux qui ne la chantent pas Il y a les farceurs et de temps en temps il y a les morts Un homme on commence à le voir au milieu des autres Quand il est tout seul ce n'est pas un homme c'est un portrait Je voudrais vous faire voir Léger au milieu des autres Pour les différences car sans cela La tête sur les épaules deux bras deux jambes Cela peut faire un bonhomme pour un écolier mais à mon goût C'est trop astrait ça n'a ni la voix Ni l'odeur de l'homme Je ne fais pas le portrait de Fernand Léger J'en parle Je le prends par la guerre comme par la main ou par le pied Parce que dans la suite des temps quand on a bêtement cru que c'était fini Lui sa vie elle était toujours un peu comme s'il y avait encore la guerre Et tous les gens autour de lui qu'il prenait pour des copains Sauf qu'il s'arrangeait beaucoup moins bien qu'eux dans l'existence Et que le camouflage se faisait maintenant sur des toiles de trente Il y avait des gens pour en vivre fort bien pas lui Peut-être étaient-ce ceux-là mieux que lui qui poussaient la romance Et lui quand il s'arrêtait de peindre Il ne crachait pas non plus sur un air d'accordéon Dans un petit bal quelque part pas loin des fortifications C'était hier mais on n'allait pas encore dans la lune Sur les bouteilles les bouchons étaient encore en bouchon Et Paris avait des fort ifs avec de l'herbe et des boîtes de conserve On ne se faisait aucune idée de la Télévision Le monde en général ressemblait au Douanier Rousseau Je ne raconte pas la vie de Fernand Léger J'en parle A ma manière et je ne ressens pas le besoin par le menu d'écrire Son atelier rue Notre-Dame-desChamps En général moi non plus je n'aime pas les cancans Et dans le civil moi non plus je ne me suis jamais fait aux fcuillées On ne tirera pas un film de mon poème On ne fera pas De Fernand Léger d'après moi le héros d'un Montparnasse aux lumières Il ne dansera pas la java Rue de Lappe il ne rencontrera pas au Dôme Ou à la Rotonde Modigliani Je ne soufflerai pas mot de sa cravate Et s'il portail une flanelle il y aura bien quelqu'un pour le dire à ma place Ou le tabac qui lui plaisait Je parle d'un homme qui peignait tout le long du jour Et qui rêvait du divorce de la couleur et du dessin Je parle d'un homme qui le premier au monde a peint des fumées Je parle d'un homme de chair et de sang dans une grande pièce vitrée Qui va et vient lit un peu s'assied sur une chaise Et puis reprend ses pinceaux et de grandes couleurs propres préparées Et regarde sa toile par lui promise uniquement à figurer La beauté de ce temps qui est à la fois le sien et le nôtre Un grand corps très maladroit dans cette vie Qui donnait tout ce qu'il avait à n'importe qui Sans se rendre bien compte des saisons qui passent Un homme émerveillé par la nouveauté de tous les jours Un manège à la foire Une machine à sous Un trousseau de clefs Et qui peint un monde sans ombre un monde vertigineux d'acrobates De nageuses et d'ouvriers Ce n'est pas moi qui décrirais cet homme-là par l'anecdote 11 est plus facile de parler d'un poète Que de décrire l'homme qui peint sans doute A cause de cette crainte qu'on a du jargon de la peinture De cette poésie à la noix dans tous les catalogues d'exposition Et Léger n'a guère été non plus épargné dans ce sens-là Je prendrai ma ceinture et j'en ferai un fouet Pour chasser les grands mots savants la philosophie Le cosmos et le bazar d'images devant moi comme des mouches Tous les passeports verbaux de ce qui ne relève que de l'oeil Pour parler de Léger je ne prendrai dans mes doigts que Les matériaux de tous les jours Les mots qui sont chez eux dans la bouche Les objets qu'on peut toucher sur la table ou chez l'épicier du coin Il y a plus de prodige dans un moulin à café que dans tous les séraphins du ciel Et pour lire l'avenir au lieu d'une boule de cristal ou des tarots Donnez-moi de vulgaires mains mutilées par le travail Il est plus facile de parler en vers des grands voyageurs maudits Ou des chefs d'armée Il est plus facile de parler en vers d'une tasse de porcelaine Ou des Iles Borromées II est plus facile de parler en vers de la nuit des choses inaccoutumées Il est plus facile de parler en vers de la chasse à la baleine Plus facile de parler du crime et des abîmes de l'âme Que d'un peintre dans ce parfum d'huile et de térébenthine Qui met ses figures à l'abri des lettres surhumaines de la réclame Et d'abord il prend à la disproportion des choses réelles Les traits du présent pour l'avenir mais bientôt C'est le paysage qui va l'imiter dans sa démarche et sa pensée Le décor du monde aura l'air de suivre une mode par lui lancée Naturellement on a déjà vu les appareils photographiques Se mettre à faire avec un peu de retard du Renoir ou du Seurat Tandis que les peintres de l'école moderne déclaraient Qu'on ne peut pour la ressemblance Concurrencer la photographie Mais avec Léger ce n'est pas de cela maintenant qu'il s'agit - C'est la vie elle-même qui s'est mise à le copier à le plagier Si bien qu'on pourrait devant les tribunaux la poursuivre Assigner la Seine-et-Oise pour faux et usage de faux Tout entière et ce ne serait pas assez Et voilà qu'il a beau être mort Léger continue Il a gagné les nouveaux immeubles qui se bâtissent Comme une épidémie en couleur Sa signature est sur le visage des banlieues detLusines Il n'y a pas un aéroport qui ne soit tributaire de sa source Et je ne suis pas sûr n'y ayant pas été qu'il n'y ait pas Son gros trait noir au Cap Canaveral C'est toujours ce jeune homme venu de Normandie Un beau jour avec tout le troupeau conduit à la tuerie Comme son père menait les boufs des environs de Lisieux à Paris Aux Abattoirs On n'expliquera jamais de façon satisfaisante l'histoire De comment il a pu passer d'un métier à l'autre bâti comme il était Toujours est-il au début du siècle qu'il avait fait le portrait de son oncle Et toute sorte de petits jardins très ressemblants dans le genre de Claude Monet Mais comment les choses changèrent Les choses changèrent comment Marchons Léger marchons légère Ce fut assez étrangement Marchons Léger légèrement La Seine-et-Oise j'y reviens Elle s'est mise à ressembler furieusement à la peinture de Léger Un certain rapport des toits de tuiles des oiseaux des fils télégraphiques Une enseigne sur un bout de jardin sans parler des postes à essence La disproportion des postes à essence et des pavillons qu'on habite à côté Cette espèce de comédie quotidienne de la couleur pour vous arrêter sur les routes Une gesticulation humaine dans la petite nature où passent les autos Les gens sont de la grisaille avec de la couleur en dehors On sent Paris pas loin qui commence à tout bouffer de son mâchefer Mais entre les édifices déjà fleurant la banlieue Il pousse toujours un peu de printemps provisoire Du printemps qui ne se reproduira bientôt plus ici pour peu qu'on lotisse Un printemps précaire qui porte gaiement son propre deuil de lilas Ou de glycines C'est ce moment entre la ville et la campagne ce moment D'herbe et de tuile creuse qui caractérise si bien Cette charnière du siècle ce passage Entre Corot et comment s'appellera-t-il le peintre de l'urbanisation totale C'est ce moment qui est Léger Ce moment rêveur comme une bouteille de lait devant la porte Un vélo par la roue accroché dans un arbre Le métro qui s'amène jusqu'à Orsay avec des airs de chemin de fer Les petits viaducs et les nuages sur mesure au paysage Tout cela neuf et déjà sur le point de disparaître Du carreau de plâtre et du contre-plaqué Un jour on la regardera cette Seine-et-Oise avec un certain attendrissement Ce sera des Léger comme des Watteau les Fêtes Galantes Dans ces parcs depuis longtemps morcelés ce monde incompréhensible À notre époque de radars et de scooters Les grands peintres sont ceux qui ont fixé les choses périssables Les canotiers sur la Marne ou Madame Samary Un petit coup de soleil avec un petit coup de blanc Un jour on la regardera cette Seine-et-Oise Et on se dira quelle drôle de chose c'était Comme une écharpe toute rapiécée de travers autour de Paris On ne peut plus comprendre ce que cela pouvait être comme patriotisme La Seine-et-Oise Argenteuil en même temps et les Vaux-de-Cernay La culture maraîchère et la chasse à courre Et Léger au bord de la route au Gros-Till»ul le bras sur les épaules de Nadia La Seine-et-Oise Un entracte au temps des guerres et des révolutions Et un enfant bossu qui habite en face Et qui de temps en temps vient regarder ce grand type en train de peindre Des choses incompréhensibles mais gaies Or on en a bien besoin quand on est un petit bossu de Gif-sur-Yvette Et de ces grandes fleurs en céramique sur le pas de la porte Qui font un pas en avant comme une personne humaine Et ne se flétrissent pas l'hiver Petit bossu tu ris petit bossu tu nous ressembles Tu ne te poses pas de question sur la Seine-et-Oise Tu y vis Et alors qu'est-ce qu'il passe comme voitures le dimanche Il y en a qui se cassent dans les tournants II faut aller voir ça Bien que cela fasse un peu constructiviste comme nature morte Mais il y a toujours des éléments à prendre dans les accidents Des idées de superposition qu'on n'inventerait pas tout seul Ah ce chemin qu'on a fait depuis les Primitifs Le premier qui a peint un dé-à-coudre 11 n'imaginait pas les pylônes à haute tension Avec les balises vertes rouges ou bleues pour les aviateurs imprudents Et même tenez Michel-Ange eh bien je parie Qu'il n'aurait pas imaginé la Seine-et-Oise Ça non Et moi je te vous en foutrai des JUGEMENT DERNIER Pour une petite ballade en teuf-teuf avec des pull-overs à raies et des bras nus Sans oublier que la route c'est bien le diable Si elle n'est pas toujours longée de fossés jaunes avec des travailleurs algériens Qui mettent la canalisation Tandis que le jardinier repique ses pensées Et des demoiselles à lunettes passent avec un slip et un soutien-gorge Un pain dans leur sac à ouvrage Tiens un avion tout le monde lève le nez en l'air Et lui fait de grands froufrous blancs dans le ciel Avec tout ça vous n'allez pas prendre des airs lugubres Ce n'était pas le genre du défunt D'ailleurs Le voilà sur la Centrale gazière d'Alfortville Une drôle de flamme je vous dis qui lui sort du réchaud sur le grand mur blanc Et toutes les couleurs qui sont si loin de la mort et qui s'organisent Ce n'est encore qu'un petit essai de résurrection Une façon de voir comment ça serait pris Si le troisième jour il sortait de son tombeau s'asseyait sur la pierre Et disait aux gardes endormis Alors quoi les gars on roupille Tout cela sans l'ombre d'un ange dans le décor Peut-être bien une Marie-Madeleine qui passait par là Mais par hasard et la tête à tout autre chose Ce qu'il te faut Fernand ce n'est pas Alfortville Ni la Seine-et-Oise à cette heure Tu n'as plus de temps à perdre avec la pluie Il te faut un éternel soleil Une peinture du ciel comme un coup de poing en pleine figure Tu poses ton blanc sur le bleu sur un bleu Imprenable Tu vas te tailler un habit qui aille à ta carrure d'immortalité Parce que les épaules ça tu en as à ton art Je te demande un peu ce que tu pourrais faire d'un tombeau avec ces épaules-là Abandonne la Seine-et-Oise et ce petit cimetière de rien du tout Viens chez nous là-bas devant la mer et le ciel Dans ce sacré pays d'oeillets et de serres On ne fait plus d'assez grandes églises pour le Bon Dieu de nos jours Fais-leur honte avec ton bâtiment et la gloire de ta peinture On y jouera pour toujours au ballon il y aura Des cyclistes pour toujours et le soleil qui tape là-dedans que ça brille Juste assez pour qu'on s'y reconnaisse et des formes tout autour Qui ne sont rien de bien précis mais seulement ta volonté Exigeante un signe impérieux de ta présence La preuve par neuf à jamais que tu as vécu Que tu vis Fernand là-bas au-dessus de la Côte Et de tout ce tohu-bohu qui dévale dans la première quinzaine d'août Et tout ce qu'ils peuvent bien inventer tous nus dans la grande lumière Des filles des garçons brûlés des vieux messieurs en shantung Et ça chante et ça se saoule et ça fait un chahut du diable Mais quand le matin se lève au-dessus de ce monde vanné Alors il y a ce grand fronton colorié sur l'azur Comme un paraphe délibéré traversant l'espace Une espèce de pureté comme on croyait qu'il n'y en aurait plus Après cette affaire d'Adam et Eve Un papillotement des yeux dans la chaleur Un grand rire au-dessus du tout Une façon de crier à tous Vous voyez je suis vivant Je brûle je brille j'éclate je m'étale je vous parle Je parais Optimiste va c'était donc ça ton camouflage Il a fallu deux guerres pour en arriver là Et tu ressembles Léger ô Normand à la face de couleur Dans la lumière de Provence Assis là comme une exagération de ta carrure Au milieu des arbres qu'on a pour toi plantés ici déjà géants Parce que des petits auraient eu honte Te voilà comme Ramsès à l'entrée du désert Comme Chartres sur ses champs de blé Comme un soldat qui en a fini pour de bon cette fois de la guerre Et qui s'assied devant tout le monde enlève ses godasses Et contemple ses pieds nus avec une délectation non dissimulée Tu es là comme une grande paix blanche et joyeuse Pour toujours Ô Léger qui mesures tout à ta démesure Comme toujours au milieu des hommes à la fois Pareil et dissemblable à eux Tu as beaucoup appris beaucoup compris depuis quatorze Mais tu n'en fais pas beaucoup de foin Tu te contentes d'être dans le soleil et de briller |
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Louis Aragon (1897 - 1982) |
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Portrait de Louis Aragon | |||||||||
BiographieLouis Aragon, que son père, un haut fonctionnaire et député, n'a jamais voulu reconnaître, montre très jeune un don pour l'écriture. Il est étudiant en médecine lorsqu'il rencontre André Breton en 1916 avec lequel il se lie d'amitié. En 1918, il publie ses premiers poèmes, puis part, en tant que médecin auxiliaire, au front des Ardennes. Son courage lui vaut d'être décoré de la Croix de Guerre. Principales oeuvresPOÈMES ET POÉSIES Citations de louis aragon |
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