Marc Alyn |
L'imaginaire était une tête brûlée de Baphomet guettée par le bourreau, L'exil, le noyau dur d'une comète sans espace, épouvantail favori des corbeaux. Je me souviens de natures mortes en attente du coup de grâce Où gisait une poule faisane au milieu d'une conjuration de cristaux, de raisin, de cuivres, d'étincelles. Le temps, en ce temps-là, ne faisait pas d'usage. J'en jetais par poignées aux musiciens errants, L'aveugle avec son chien dépeçait mon présent. Dieu débordait, vin fou, du pressoir des orages. Je me faufilais à grandes aiguillées en direction du Centre, point d'ancrage De l'âme en perpétuelle invention d'elle-même. Le verbe sur le gouffre osait des passerelles Si vertigineuses que le siècle pourtant porté sur la déprime Refusait d'avancer en dépit des menaces, des promesses, des banderilles. En marge, ayant vécu ici ou là par défaut Dans le refus des filiations et des paternités, Le dos au mur à l'extrémité de l'impasse, Je contemplais l'inexistence sans limites, Déporté volontaire au goulag du poème Avec les droits communs de l'immortalité. Au marché noir, la mort vendait des yeux en solde, Des bagues où nageaient des poisons délurés, Sur le sable, l'Histoire jouait aux osselets, buvant pour oublier. D'autres neiges, d'autres indéchiffrables bruits de pas M'accompagnaient au sein d'une cohorte de mages, de soufis, de sibylles, de lunatiques (Car je n'eus jamais d'amis qu'hérétiques) Vers les confins qu'illuminait le suicide des dieux immolés par le feu. Le non-dit trouverait-il ailleurs son origine ? L'ouvre consistait à traduire en poésie, langue étrangère au sein de toute langue, Qu'elle magnifie et corrompt. Les dernières paroles du Millénaire agonisant. Les mots prenaient les mots en otage. Les exorcistes rentraient tard. Quelque part le sang coulait, inutilement rouge dans le noir. |
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Marc Alyn (1937 - ?) |
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