Mathieu Bénézet |
(extrait) longues longues les années mouillées de vent je touchais la dernière berge la dernière bouche bouches seules comme le miracle de l'origine imbibées de sève et de ciel voix dans la chapelle un dieu reposait derrière la lourde porte labourait le jour ô cicatrices je viens pour m'arrêter sur des sables adorés parmi des visages reconnus dévoration des derniers dieux chancelants de la Crète deux bouches et deux tombeaux je viens pour alléger la mémoire d'une morte sables qui forment les sables ô nuit qui laves l'âme infinie tels qu'épaule contre épaule nous nous éveillons en de si vieux vaisseaux pauvre cour chagrin baigné de pluie ainsi les choses infinies furent et au creux d'un mur vois je mets nues mes mains sur des tombes humaines univers en son abîme si proche des pavots noirs où je crie sont dieux plus nombreux que dans l'histoire ce sont les pas du soir dans la plus grande église désert des hommes ô berge où je repris ma marche peux-tu me reconnaître sous l'averse ah je disais mésanges mouettes mésanges orph elines est-ce vivre mais quelle histoire à suivre les ailes d'anges douces-amères des pleurs collent l'âme sur les lèvres ô clapotis des rencontres un pardon marque l'humain au flanc creusé ô navire murmurant pour les âmes secondes les yeux redisent un fragile savoir dans de vagues jouets je vis un simulacre de larmes au front richesse ancienne de la rumeur d'une peine mais à la prochaine heure sera une autre peine sera un autre cri et une larve du vide comme un séjour dans le cercle j'ai demandé le souvenir et c'est plein de mutismes tout peut être éloigné par le vent en un cour errant esi-ce mourir quand on arrache l'ombre d'un visage dans une rue d'où émane un gaz automnal est-ce mourir au-dessus des tombes des enfants il est une barque blanche dans la nuit sainte qui vogue yeux des morts ah yeux brisés chanson des yeux brisés repose voix de sour qui doucement chut en neige de signes ombres des noyés ils n'ont plus de vêtements diurnes sur le chemin de vieux jardins de vieux mouchoirs ferment leurs bouches et ma solitude fit un pas dit Rilke et plus encore avec la longue corniche des années chaque jour sur les yeux d'enfants s'abattent des éclats d'obus viens ai-je murmuré toi qui semblés étouffer quelqu'un ô poignée d'ombre moi seul ne peux t'oublier j'ai appris à reconnaître les pleurs d'un enfant parmi tous les autres quand bien même ils pleurent tous ensemble quand bien même nous pleurons tous ensemble j'entends une différence de solitude ah c'est une fin profonde en soi ô moi que je crie fleurs que je cueillis quelque pierre qui me blesse encore en moi est le goût du sang comme on a le goût du gouffre mes bras fous ô ma tête existe-t-il un chant qui ne soit pas chant de la mort des enfants existe-t-il une prière qui ne soit pas une barque vide est-ce là le goût exact de la chose terre écoute tout fut massacré jusqu'à l'au-delà de la mer une immense fosse qu'emplissent des papiers froissés |
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Mathieu Bénézet (1946 - ?) |
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Portrait de Mathieu Bénézet | |||||||||
BibliographieDits et Récits du mortel, ménippée, Éd. Flammarion, 1976 La guerre commence..., Orange Export Ltd, 1977 L'Imitation de Mathieu Bénézet, mélodrame, Éd. Flammarion, 1978 La Fin de l'homme, roman inachevé, Éd. Flammarion, 1979 Ceci est mon corps, 1, mélange, Éd. Flammarion, 1979 Pantin, canal de l'Ourcq, roman, Éd. Flammarion, 1981 Le Travail d'amour, p |
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