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Paul Eluard |
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Un matin de sureau Elle est restée dans ce champ Qu'a-t-elle laissé d'elle en s'en allant Tout ce que j'ai voulu Et d'abord une armure choisie dans les décombres De la plus ciselée des aubes Une armure sous un arbre Un bel arbre Ses branches sont des ruisseaux Sous les feuilles Ils boivent aux sources du soleil Leurs poissons chantent comme des perles Un bel arbre les jours d'ennui Est un appareil visionnaire Comme un autre Par cet arbre de tous les jours Je suis le maître de mes quatre volontés Puis une femme au col de roses rouges De roses rouges qu'on ouvre comme des coquillages Qu'on brise comme des oufs Qu'on brûle comme de l'alcool Toujours sous l'arbre Comme un aimant irrésistible Désespérant La flamme traquée par la sève Tantôt fragile tantôt puissante Ma bienfaitrice de talent Et son délire Et son amour à mes pieds Et les nacelles de ses yeux dont je ne tomberai pas Ma bienfaitrice souriante Belle limpide sous sa cuirasse Ignorante du fer de l'arbre et des roses rouges Moulant tous mes désirs Elle rêve De qui rêve-t-elle De moi Dans les draps de ses yeux qui rêve Moi Ses mains sont vives De vraies mains de sarcleuse Tissées d'épées Rompues à force d'indiquer l'heure matinale sempiternelle atroce du travail Des mains à tenir amoureusement un bouquet de roses rouges sans épines Et ce galop de buffles Mes quatre volontés Cette femme au soleil Cette forêt qui éclate Ce front qui se déride Cette apparition au corsage brodé d'épaves De mille épaves sur des vagues de poussière De mille oiseaux muets dans la nuit d'un arbre Il ferait beau penser à d'autres fêtes Même les parades déshabillées défigurées ensanglantées par des grimaces de masques atteignent malgré tout à une sérénité condamnable Et quel passant hors jeu juste au carrefour d'un sourire de politesse ne s'arrêterait pas pour saluer d'un éclair de la main le ventre impoli du printemps Un panier de linge à la volée se calme tendrement Sa blanche corolle s'incline vers ses genoux brisés Aucune roture de couleur n'a barre sur lui Et par la déchirure d'une dentelle Il disparaît Sur une route de chair Boire Un grand bol de sommeil noir Jusqu'à la dernière goutte. |
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Paul Eluard (1895 - 1952) |
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Portrait de Paul Eluard | |||||||||
Biographie / OuvresEugène Grindel, dit Paul Eluard est né en 1895 à Saint-Denis. En décembre 1912, il doit interrompre ses études , et se rend en Suisse, pour soigner une tuberculose. Il y fait la connaissance d'une jeune fille russe, Helena Dmitrievna Diakonava, dont il tombe amoureux. Il la surnomme Gala et l'épouse en 1916. |
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