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Paul Eluard



L'univers-solitude - Poéme


Poéme / Poémes d'Paul Eluard





Les fruits du jour couvés par la terre
Une femme une seule ne dort pas
Les fenêtres sont couchées.



Une femme chaque nuit
Voyage en grand secret.



Villages de la lassitude
Où les filles ont les bras nus
Comme des jets d'eau
La jeunesse grandit en elles
Et rit sur la pointe des pieds.



Villages de la lassitude

Où tous les êtres sont paiejls.



Pour voir les yeux où l'on s'enferme
Et les rires où l'on prend place.



Des insectes entrent ici
Ombres grésillantes du feu
Une flamme toute rouillée Éclabousse le sommeil
Son lit de chair et ses vertus.



La montagne la mer et la belle baigneuse
Dans la maison des pauvres
Sur le ciel fané qui leur tient lieu d'ombrage
Se dissimulent molle et mille lampes sombres.

Un champ de reflets joint les larmes
Ferme les yeux
Tout est comblé.

A la suite des images

La masse de la lumière roule vers d'autres rêves.



Le corps et les honneurs profanes

Incroyable conspiration

Des angles doux comme des ailes

-
Mais la main qui me caresse
C'est mon rire qui l'ouvre
C'est ma gorge qui la retient
Qui la supprime.

Incroyable conspiration

Des découvertes et des surprises.



Fantôme de ta nudité
Fantôme enfant de ta simplicité
Dompteur puéril sommeil charnel
De libertés imaginaires.



Plume d'eau claire pluie fragile
Fraîcheur voilée de caresses
De regards et de paroles
Amour qui voile ce que j'aime.



A ce souffle à ce soleil d'hier

Qui joint tes lèvres

Cette caresse toute fraîche

Pour courir les mers légères de ta pudeur

Pour en façonner dans l'ombre

Les miroirs de jasmin

Le problème du calme.



Une chanson de porcelaine bat des mains

Puis en morceaux mendie et meurt

Tu te souviendras d'elle pauvre et nue

Matin des loups et leur morsure est un tunnel

D'où tu sors en robe de sang

A rougir de la nuit

.Que de vivants à retrouver

Que de lumières à éteindre

Je t'appellerai
Visuelle

Et multiplierai ton image.



Désarmée

Elle ne se connaît plus d'ennemis.



Rôdeuse au front de verre

Son cour s'inscrit dans une étoile noire

Ses yeux montrent sa tête



Ses yeux sont la fraîcheur de l'été

La chaleur de l'hiver

Ses yeux s'ajourent rient très fort

Ses yeux joueurs gagnent leur part de clarté.



Elle s'allonge
Pour se sentir moins seule.



Il fait clair je me suis couvert
Comme pour sortir du jour

Colère sous le signe atroce
De la jalousie l'injustice
La plus savante

Fais fuir ce ciel sombre

Casse ses vitres

Donne-les à manger aux pierres

Ce faux ciel sombre
Impur et lourd.



J'admirais descendant vers toi
L'espace occupé par le temps
Nos souvenirs me transportaient

Il te manque beaucoup de place
Pour être toujours avec moi.



Déchirant ses baisers et ses peurs

Elle s'éveille la nuit

Pour s'étonner de tout ce qui l'a remplacée.



Au quai de ces ramures

Les navigateurs ne prospèrent pas

Paupières abattues par l'éclat l'écho du feu

Au quai des jambes nues

Perçant le corps dans l'ombre sourde

La trace des tentations s'est perdue.



Les fleuves ne se perdent qu'au pays de l'eau
La mer s'est effondrée sous son ciel de loisirs
Assise tu refuses de me suivre
Que risques-tu
J'amour fait rire la douleur
Et crier sur les toits l'impuissance du monde.

La solitude est fraîche à ta gorge immobile
J'ai regardé tes mains elles sont semblables
Et tu peux les croiser
Tu peux f attacher à toi-même

C'est bien - puisque tu es la seule je suis seul.



Une prison découronnée

En plein ciel

Une fenêtre enflammée

Où la foudre montre ses seins

Une nuit toute verte

Nul ne sourit dans cette solitude

Ici le feu dort tout debout

A travers moi.

Mais ce sinistre est inutile
Je sais sourire
Tête absurde

Dont la mort ne veut pas dessécher les désirs

Tête absolument libre

Qui gardera toujours et son regard et son sourire.



Si je vis aujourd'hui

Si je ne suis pas seul

Si quelqu'un vient à la fenêtre

Et si je suis cette fenêtre

Si quelqu'un vient

Ces yeux nouveaux ne me voient

Ne savent pas ce que je pense

Refusent d'être mes complices

Et pour aimer séparent.



A la clarté du droit de mort
Fuite à visage d'innocent

Au long d'une brume aux branches filantes
Au long des étoiles fixes
Les éphémères régnent.

Le temps la laine^e l'ivoire
Roulant sur une route de ciré.



Derrière moi mes yeux se sont fermés
La lumière est brûlée la nuit décapitée



Des oiseaux plus grands que les vents
Ne savent plus où se poser.

Dans les tourments infirmes dans lès rides des rires

Je ne cherche plus mon semblable

La vie s'est affaissée mes images sont sourdes

Tous les refus du monde ont dit leur dernier mot

Ils ne se rencontrent plus ils s'ignorent

Je suis seul je suis seul tout seul

Je n'ai jamais changé.

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Paul Eluard
(1895 - 1952)
 
  Paul Eluard - Portrait  
 
Portrait de Paul Eluard

Biographie / Ouvres

Eugène Grindel, dit Paul Eluard est né en 1895 à Saint-Denis. En décembre 1912, il doit interrompre ses études , et se rend en Suisse, pour soigner une tuberculose. Il y fait la connaissance d'une jeune fille russe, Helena Dmitrievna Diakonava, dont il tombe amoureux. Il la surnomme Gala et l'épouse en 1916.

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