Paul Fort |
Cette gerbe est pour vous Manon des jours heureux, Pour vous cette autre, eh ! oui, Jeanne des soirs troublants. Plus souple vers l'azur et déchiré des Sylphes, Voilà tout un bouquet de roses pour Thérèse. Où donc est-il son fin petit nez qui renifle ? Au paradis ? eh ! non, cendre au Père-Lachaise. Plus haut, cet arbre d'eau qui rechute pleureur, En saule d'Orphélie, est pour vous, Amélie. Et pour vous ma douceur, ma douleur, ma folie ! Germaine Tourangelle, ô vous la plus jolie. Le fluide arc-en-ciel s'égrenant sur mon coeur. A Mireille dit " Petit Verglas " Ne tremblez pas, mais je dois le dire elle fut assassinée au couteau par un fichu mauvais garçon, dans sa chambre, là-bas derrière le Panthéon, rue Descartes, où mourut Paul Verlaine. O ! oui, je l'ai bien aimée ma petite " Petit Verglas " à moi si bonne et si douce et si triste. Pourquoi sa tristesse ? Je ne l'avais pas deviné, je ne pouvais pas le deviner. Non, je l'ai su après tu me l'avais caché que ton père était mort sur l'échafaud, Petit Verglas ! J'aurais bien dû le comprendre à tes sourires. J'aurais dû le deviner à tes petits yeux, battus de sang, à ton bleu regard indéfinissable, papillotant et plein de retenue. Et moi qui avais toujours l'air de te dire " Mademoiselle, voulez-vous partager ma statue ? " Ah ! J'aurais dû comprendre à tes sourires, tes yeux bleus battus et plein de retenue. Et je t'appelais comme ça, le Petit Verglas, que c'est bête un poète ! O petite chair transie ! Moi, je l'ai su après que ton père était mort ainsi... Pardonne-moi, Petit Verglas. Volez, les anges ! |
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Paul Fort (1872 - 1960) |
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Portrait de Paul Fort | |||||||||