Philippe Delaveau |
I Nous l'apercevons parfois comme en songe, dorée. Tremblant De ses toitures dans le jour éternel, ceinte de murs Et de lauriers-roses. Dans la mandorle de ses rues pourpres, les éternels, Marchent portant des palmes de douceur, Branches parmi les branches qui oscillent, Lorsque paraît, vêtu de son feuillage étincelant, Au-dessus des générations d'étoiles et de mers, Le chêne issu de la ténèbre de Jessé. II Au-dessus des bougainvilliers pourpres et des lauriers-roses; A l'horizon que refrène l'élan des regards, Surgit parfois ton diadème, nimbé de brumes, Jérusalem, dans la Pâque du jour. Lorsque le ciel essaime sa lumière : Silence des espaces nocturnes sur les sens; Silence au temple de l'intelligence : chair Visitée par le Souffle, quand s'amenuit le songe; Nuit musicale qui nous vêt, ta demeure. Et les abeilles butinent nos ténèbres, En quête de secrets pollens et de consentements. III Ses murs célestes sont Clairs et transparents. Ses rues, Ses places tremblent comme Les routes éloignées de la chaleur : Nuit pour nos yeux, silence pour l'ouïe, Lorsque Juillet appesantit Sa conquête d'or sur les chaumes. Toitures plus dorées que le pain brûlant, Rue qu'ensanglante le vin du soir. Est-ce l'éclat que dardent les bougainvilliers, La dorure des tuiles dans l'épuisement du jour? Jérusalem dans la liesse de l'azur noir; Jérusalem dans la joie liquide des canicules. Tes anges te célèbrent, tes cigales, L'eucalyptus aux palmes bleues d'argile, sur la terre brûlée. Aux confins du poème, des pierres, Tes syllabes rutilent : Jérusalem. Les couturières de la nuit tissent ta robe dans l'azur, Puisque s'approche la fête qu'annoncent Les fleuves dont les mains battent, les arbres Des forêts en faisant rire leurs feuillages. IV Vêtue du feu du soir, elle rit Parmi les crépuscules qui se succèdent; Elle danse avec sa robe de justice, Au milieu des générations qui passent. Jeune toujours avec ses seins légers et doux. Biche sur la clarté nocturne; Elle invite à la danse et dispose les tables, Avec le tremblement des lys qui croissent dans la nuit, Les pauvres oubliés dans le désert des villes. Le jour pour elle est comme un millénaire, Et pour elle la nuit s'illumine de jour. V Elle brille sur le tain d'or des fleuves, Au-dessus de la vase., des herbes, Telle une lampe immobile dans le velours de l'ombre; Et nos yeux peut-être l'ont vue poindre. Jérusalem, revêtue de sa robe de fête, Laissant choir de la traîne lorsqu'elle franchit l'aube, La poussière d'argent qui succède aux étoiles, Lorsque l'éternité frémit dans la nuit de l'été. Jérusalem, dressée au-dessus des mers, Proche, invisible parmi les astres; Dès ici-bas, dans le silence, le mensonge, Jérusalem, joie bleue de l'air qui nous suscite, nous aspire. Oublie l'exil et les journées de deuil, Lave ta robe souillée de poussière. Tes pieds ne fouleront plus la terre des deuils : Tu es de ce pays gagné déjà par la justice, A condition d'aimer toujours et davantage. |
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Philippe Delaveau (1950 - ?) |
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