Pierre Reverdy |
La nuit polaire A bord les hublots sont ouverts Les trappes bâillent Assis sur le balcon qui se détache Le voilà sur fond bleu Les nuages seront peut-être les gagnants de la course On ne voit plus que lui et eux Ils disparaissent un moment derrière la colline où quelqu'un se promène Ils meurent Les chevaux ne sont plus que des bruits de grelots En même temps que les feuilles tremblent En même temps que les étoiles regardent En même temps que le train passe en crachant des injures Et la fumée Un bout de cigare refroidi reste Et ce tronc d'arbre au bord de la forêt L'acre odeur de l'herbe roussie tout autour La main énorme qui s'avance. On ne voit pas le corps se pencher La bouche avide Il faudrait sauter la forêt comme une haie Comme le monde entier est un obstacle à franchir Il n'y a rien derrière pour se retenir ou leur casser les pattes Pas même de l'eau Pas même de l'air Le vide épais On entendait grincer les jointures d'acier Les cloisons étanches Un réverbère brûlait la crinière et la queue Fil de fer Toile d'araignée sur les yeux On passe La cavalcade roule sur les toits La terre à traverser dans un instant Les chevaux dirigeaient la vapeur de leurs naseaux contre les avions rencontrés au passage Le passage à niveau de Mars Il aurait fallu s'arrêter pour apprendre quelque chose Et la longue avenue des étoiles s'ouvrait Les trottoirs les maisons les rues avoisinantes s'écartaient La plus grande place du ciel illuminait ses phares Les fenêtres pâlissaient l'ombre de leur clarté Et les cavaliers levaient leurs lances Les chevaux battaient leur ventre des fers lunaires de leurs pieds Les croissants de leurs pieds gardaient la couleur de la lune où ils étaient passés En bas tout le monde levait la tête et regardait On ouvrait les portes de derrière avec fracas Les jardins se remplissaient d'enfants mal réveillés Et sur les fenêtres où les balcons manquaient des gens en chemise grelottaient Il y a des lueurs sur le fond noir du ciel Il y a des lumières qui courent entre les étoiles Il y a des yeux qui s'ouvrent à la lueur des étoiles Et son cour battait plus fort à cause d'une main qui se posait près d'elle A ce moment tous les yeux se tournèrent vers l'ouest d'où venait le vent Il y avait aussi des hirondelles blanches qui venaient de la mer Il y avait encore des paroles qu'on n'entendait pas Elles venaient de plus loin que la mer Et les cavaliers lumineux dont les chevaux battaient le ciel de leurs sabots lunaires descendirent en bloc vers le poteau qui indiquait le but La dernière chute éclaboussa le mur où se posaient les taches claires de la nuit Tout le reste était dans l'ombre Et l'on ne vit plus rien en dehors de la tunique sombre du vainqueur On n'entendit plus rien que le grincement métallique qui accompagnait chaque mouvement du cheval gagnant et du jockey vainqueur |
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Pierre Reverdy (1889 - 1960) |
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Portrait de Pierre Reverdy | |||||||||
La vie et l'Ouvre de pierre reverdyPierre Reverdy est né à Narbonne le 13 septembre 1889 à midi. Il vécut à Paris et à Solesmes; il est mort à Solesmes en 1960. Il grandit au pied de la Montagne Noire dans la maison de son père, qui lui transmet le lire et l'écrire. Plusieurs de ses proches ancêtres avaient été sculpteurs, travaillant la pierre d'église et le bois. Il fait ses études au petit lycée de Toulouse et au collège de Narb |
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