Roland Dubillard |
La baignoire s'est endormie Avant ce baigneur de minuit. Lui, les yeux grands ouverts. Il écoute, dans la lumière, Un bruit qui ressemble à celui Que ferait un nuage en visite, La nuit, dans un couloir d'un magasin de meubles. Et quand la vidange a fini d'effacer l'eau du bain, Qu'elle reste la bouche ouverte et respire Comme un visage d'ange, Le baigneur nu, lentement, cesse d'entendre Ce que n'entendent pas les dormeurs; Il écoute maintenant quelque chose d'autre et de lointain... Est-ce encore un nuage qui parle ? C'est une foule à peine distante qui murmure ; Ou plutôt une voix étrangère dans cette foule, Une voix qui ne sait pas parler ; mais lui De toutes ses oreilles, nu dans son absence d'eau, Par l'oreille du trop-plein Il entend des mots d'amour Qui s'adressent à lui seul Depuis l'autre côté de la nuit; Les mots qu'il sait bien qui sont les seuls vrais mots d'amour et qu'il ne connaissait pas. |
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Roland Dubillard (1923 - 2011) |
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Portrait de Roland Dubillard | |||||||||