Tristan L'Hermite |
Je vous pourrais montrer, si vous veniez un jour En un parc qu'ici près depuis peu j'ai fait clore, Mille amants transformés, qui des lois de l'Amour Sont passés sous celles de Flore : Ils ont pour aliment les larmes de l'Aurore. Dieux! que ne suis-je entre ces fleurs Si vous devez un jour m'arroser de vos pleurs ! Vous y verriez Clytie, aux sentiments jaloux, Qui n'a pu jusqu'ici guérir de sa jaunisse, Et la fleur de ce Grec dont le bouillant courroux Ne put souffrir une injustice; Vous y verriez encore Adonis et Narcisse, Dont l'un fut aimé de Cypris % L'autre fut de son ombre aveuglément épris. Je vous ferais savoir tout ce que l'on en dit, Vous contant leurs vertus et leurs métamorphoses ; Quelle fleur vint du lait que Junon répandit Et quel sang" fit rougir les roses Qui grossissent d'orgueil dès qu'elles sont écloses, Voyant leur portrait si bien peint Dans la vive blancheur des lys de votre teint. Piqué secrètement de leur éclat vermeil, Un folâtre Zéphire à l'entour se promène Et, pour les garantir de l'ardeur du soleil, Les évente de son haleine; Mais lorsqu'il les émeut ", il irrite ma peine, Car aimant en un plus haut point, Je vois que mes soupirs ne vous émeuvent point. Là, mille arbres chargés des plus riches présents, Dont la terre à son gré les mortels favorise Et sur qui d'un poinçon je grave tous les ans Votre chiffre et votre devise, Font en mille bouquets éclater la cerise, La prune au jus rafraîchissant Et le jaune abricot au goût si ravissant. Là, parmi des jasmins plantés confusément Et dont le doux esprit à toute heure s'exhale, Cependant que partout le chaud est véhément, On se peut garantir du hâle Et se perdre aisément dans ce plaisant dédale Comme entre mille aimables nouds Mon âme se perdit parmi vos beaux cheveux. |
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Tristan L'Hermite (1601 - 1655) |
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Portrait de Tristan L'Hermite | |||||||||