Vient près de moi mon amie
Ne parle pas tant, il est tard
Viens près de moi mon amie
Restons en paix attendons la nuit
Non, non ! Chut ! Ne parle pas,
Ne parlons pas tant très chère
Il y a trop de choses à dire
Et si peu de mots pour le dire
Et puis les souvenirs
Ces lourds nuages dans nos cours
Ils nous rappellent trop les orages d'hier
Et puis d'ailleurs, une fois écoulées inlassablement
Les vagues des jours, de marées en marée rognant
Nos fragiles mémoires,
Une fois passé le lourd rabot du temps
On ne se souvient guère vraiment
De la tournure des choses longtemps enfouies !
De nos joies ou de nos déboires, n'est-il pas bien vrai
Qu'on ne garde que l'écume fugace ?
Je ne me souviens pas, je ne souviens plus tant
Et je ne le veux point, et c'est bien ainsi
À quoi bon agacer les cicatrices ?
À quoi bon raviver les plaies mortes ?
Le volcan en furie a vomi ses laves affreuses
Et le village joyeux et ses gens ambitieux
Ont goûté à l'âpreté de la cendre chaude
Les laves aveugles ont englouti des vies
Le village fut là, il n'est plus
Maintenant, sur les flans du géant apaisé
Une verte frondaison a poussé
Une forêt dense et joyeuse
Où chantent à nouveaux les oiseaux
Je viens souvent en ces lieux paisibles
Là où hier surgissaient les cris aigres
Viens près de moi mon ami
Tu es là, je suis là, que nous faut-il de plus ?
Asseyons-nous sur cette roche volcanique
Nous y sommes si souvent venus
Depuis ce jour béni ou nous nous sommes connus
C'est notre pierre n'est-ce pas
Jadis rugueuse et inconfortable
Elle s'est adoucie, polie par le temps
Polie aussi sans doute par nos visites
Nos longues et profondes méditations
Et nous aussi nous nous sommes adoucies
Polis l'un l'autre par notre mutuelle compassion
La vie est une lave brûlante, c'est vrai
Après l'épreuve de la cendre incandescente
Voilà que tout reverdit prodigieusement.
Viens près de moi mon amie
Blottis-toi contre moi !
Et restons-la c'est tout
Cela seul suffit !
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