Francis Jammes |
On m'éreinte dans le Musée des familles, moi qui chante les anciens magazines et les rires charmants des jeunes filles qui le lisaient à l'ombre des charmilles. Une d'elles, rêveuse, et ses yeux bleus au ciel, le coude à son genou et la main au menton, songeait à ce cousin : Eudore des Courcels, qui montait à cheval parfaitement (disait-on). Plus d'une fois, dans son pupitre, au Sacré-Cour, près des pensées mortes de son jardin mélancolique, elle ouvrait le Musée, en cachette, pour lire la suite du Diable au fumoir ( ?) ou de Fors l'honneur ( ?). Mais, dans un numéro, à la cinquième page, une illustration représentait un page qui, dans la langueur des jardins d'Espagne, parlait d'amour à une douce et longue dame. Et ce page ressemblait à ce cousin. Et c'est pourquoi la maîtresse générale, Madame de Grieul, voyant l'enfant songeuse l'avait en grand soin et lui donnait de la mélisse ou du tilleul. Puis un jour le roman du Musée des familles finissait, ainsi qu'un baiser dans un beau soir. Et puis, un autre jour, la mère de Camille faisait mander sa chère enfant dans le parloir : Mon enfant, j'ai une nouvelle heureuse à t'appandr. Nous serons tous de noce à la fin de l'automne... Céline m'a appris le mariage d'Eudore... il épouse Cora... ils vivront à la Butte-Grande... ... A propos, ajoutait la mère : ton cousin va s'absenter et a peur que Cora ne s'ennuie... Où as-tu laissé ce Musée des familles qui t'intéressait tant, celui de 45? Alors l'enfant ne pouvait plus se retenir. Son sein gonflé d'orage éclatait en sanglots... Et elle répondait, en hoquetant, ces mots : l'année 45, elle est dans mon pupitre. |
Contact - Membres - Conditions d'utilisation
© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.
Francis Jammes (1868 - 1938) |
|||||||||
|
|||||||||
Portrait de Francis Jammes | |||||||||
OuvresFrancis Jammes (1868-1938). Célèbre, et lu, parmi les plus grands, sans presque quitter Orthez, son « village », Jammes le fut et devrait l'être encore. Ami de Claudel, de Larbaud, de Gide (avec lequel il se fâche), il ne ressemble qu'à lui-même, Tibulle chrétien, ou croyant païen, et mène la poésie à son allure pas toujours naïve. Car il faut quelque savante magie pour rendre édénique ce qui, déj La vie et l'Ouvre de francis jammesAprès avoir fait ses études au lycée de Pau, puis à Bordeaux, Francis Jammes se passionne pour les livres de Jules Verne. En 1886, il échoue au bac et se réfugie dans l'écriture. Il rédige alors quatre-vingt-neuf poèmes. A Orthez, il devient trois ans plus tard avoué chez un notaire mais ce travail l'ennuie. Il envoie ses essais poétiques à des revues littéraires dans lesquelles il est remarqué pa |
|||||||||