Francis Vielé-Griffin |
Derrière chez mon père, un oiseau chantait. Sur un chêne au bois, - Autrefois - Un rayon de soleil courait sur les blés lourds ; Un papillon flottait sur l'azur des lents jours Que la brise éventait ; L'avenir s'érigeait en mirages de tours, Qu'enlaçait un fleuve aux rets de ses détours ; C'était le château des fidèles amours - L'oiseau me le contait. Derrière chez mon père, un oiseau chantait La chanson de mon rêve ; Et, voix de la plaine, et voix de la grève, Et voix des bois qu'Avril énerve. L'écho de l'avenir en riant mentait : Du jeune cour, l'âme est la folle serve, Et tous deux ont chanté Du Printemps à l'Eté. Derrière chez mon père, sur un chêne au bois. Un oiseau chantait d'espérance et de joie, Chantait la vie et ses tournois Et la lance qu'on brise et la lance qui ploie ; Le rire de la dame qui guette Le vainqueur dont elle est la conquête ; La dame est assise en sa gone de soie Et serre sur son cour une amulette. Derrière chez mon père, un oiseau chantait. De l'aube jusqu'en la nuit ; Et dans les soir de solitaire ennui Sa chanson me hantait ; Si bien qu'au hasard de paroles très douces Je me remémorais ses gammes, Apprises parmi les fougères et les mousses, Et les redisais à de vagues dames, Des dames blondes ou brunes ou rousses, Des dames vaporeuses et sans âmes. Derrière chez mon père, sur un chêne au bois. Un oiseau chantait la chanson de l'orgueil ; Et dans les soirs nerveux d'émois Je l'écoutais du seuil ; Ils sont morts, les vieux jours de fiers massacres ; Mes orgueils, écumant du haut frein de mon veuil. Se sont cabrés aux triomphes des sacres, Ils ont fleuré les fleurs du cercueil. Arômes des catafalques - doux et acres - Mes vanités sont au cercueil. Derrière chez mon père, un oiseau chantait Qui chante dans mon âme et dans mon cour, ce soir ; Je hume vers la nuit où fume un encensoir, O jardins rutilants qui m'avez enfanté, Et je revis chaque heure et toutes vos saisons : Joie en rire de feuilles claires par la rive, Joie en sourires bleus de lac aux horizons, Joie en prostrations de la plaine passive, Joie éclose en frissons ; Les jeunes délices qui furent dans nos yeux - Aurores et couchants - les étoiles des cieux Et le portail de Vie ouvert et spacieux Vers les jeunes moissons. Derrière chez mon père, sur un chêne au bois. Derrière chez mon père, un oiseau chantait En musique de flûte alacre et de hautbois, En musique qui te vantait, Toi, mon Rêve et mon Choix ; Sais-tu combien aux soirs s'alanguissait ma vie ; Sais-tu de quels lointains mon âme t'a suivie, Et comme ton ombre la tentait Vers le Château d'Amour que l'oiseau chantait Sur un chêne au bois ? - Autrefois. - |
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Francis Vielé-Griffin (1864 - 1937) |
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Portrait de Francis Vielé-Griffin | |||||||||
Biographie / chronologie1863 - Le 26 mai, naissance à Norfolk en Virginie, d'Egbert Ludovicus Vielé, « Bertie », quatrième enfani de Térésa Griffin et du Général Egbcrt Vielé, gouverneur militaire de la Virginie pendant la Guerre de Sécession. Bibliographie / OuvresORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE |
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