François-Marie Arouet Voltaire |
Hé quoi ! vous êtes étonnée Qu'au bout de quatre-vingts hivers, Ma Muse faible et surannée Puisse encor fredonner des vers? Quelquefois un peu de verdure Rit sous les glaçons de nos champs ; Elle console la nature, Mais elle sèche en peu de temps. Un oiseau peut se faire entendre Après la saison des beaux jours; Mais sa voix n'a plus rien de tendre, Il ne chante plus ses amours. Ainsi je touche encor ma lyre Qui n'obéit plus à mes doigts; Ainsi j'essaie encor ma voix Au moment même qu'elle expire. « Je veux dans mes derniers adieux, Disait Tibulle à son amante, Attacher mes yeux sur tes yeux, Te presser de ma main mourante. » Mais quand on sent qu'on va passer, Quand l'âme fuit avec la vie, A-t-on des yeux pour voir Délie, Et des mains pour la caresser? Dans ce moment chacun oublie Tout ce qu'il a fait en santé. Quel mortel s'est jamais flatté D'un rendez-vous à l'agonie? Délie elle-même, à son tour, S'en va dans la nuit éternelle, En oubliant qu'elle fut belle, Et qu'elle a vécu pour l'amour. Nous naissons, nous vivons, bergère, Nous mourons sans savoir comment; Chacun est parti du néant : Où va-t-il?... Dieu le sait, ma chère. |
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François-Marie Arouet Voltaire (1694 - 1778) |
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Portrait de François-Marie Arouet Voltaire | |||||||||
Voltaire, entre la légende et l'histoireLa vie de voltaire |
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