Jean de La Fontaine |
Pour M. F auquel Remplissez l'air de cris en vos grottes profondes ; Pleurez, Nymphes de Vaux, faites croître vos ondes, Et que l'Anqueuil enflé ravage les trésors Dont les regards de Flore ont embelli ses bords On ne blâmera point vos larmes innocentes ; Vous pouvez donner cours à vos douleurs pressantes : Chacun attend de vous ce devoir généreux ; Les Destins sont contents : Oronte est malheureux. Vous l'avez vu naguère au bord de vos fontaines, Qui, sans craindre du Sort les faveurs incertaines, Plein d'éclat, plein de gloire, adoré des mortels, Recevait des honneurs qu'on ne doit qu'aux autels. Hélas ! qu'il est déchu de ce bonheur suprême ! Que vous le trouveriez différent de lui-même ! Pour lui les plus beaux jours sont de secondes nuits : Les soucis dévorants, les regrets, les ennuis, Hôtes infortunés de sa triste demeure, En des gouffres de maux le plongent à toute heure. Voici le précipice où l'ont enfin jeté Les attraits enchanteurs de la prospérité ! Dans les palais des rois cette plainte est commune, On n'y connaît que trop les jeux de la Fortune, Ses trompeuses faveurs, ses appâts inconstants ; Mais on ne les connaît que quand il n'est plus temps. Lorsque sur cette mer on vogue à pleines voiles, Qu'on croit avoir pour soi les vents et les étoiles, Il est bien malaisé de régler ses désirs ; Le plus sage s'endort sur la foi des Zéphyrs. Jamais un favori ne borne sa carrière ; Il ne regarde pas ce qu'il laisse en arrière ; Et tout ce vain amour des grandeurs et du bruit Ne le saurait quitter qu'après l'avoir détruit. Tant d'exemples fameux que l'histoire en raconte Ne suffisaient-ils pas, sans la perte d'Oronte ? Ah ! si ce faux éclat n'eût point fait ses plaisirs, Si le séjour de Vaux eût borné ses désirs, Qu'il pouvait doucement laisser couler son âge ! Vous n'avez pas chez vous ce brillant équipage, Cette foule de gens qui s'en vont chaque jour Saluer à longs flots le soleil de la Cour : Mais la faveur du Ciel vous donne en récompense Du repos, du loisir, de l'ombre, et du silence, Un tranquille sommeil, d'innocents entretiens ; Et jamais à la Cour on ne trouve ces biens. Mais quittons ces pensers : Oronte nous appelle. Vous, dont il a rendu la demeure si belle, Nymphes, qui lui devez vos plus charmants appâts, Si le long de vos bords Louis porte ses pas, Tâchez de l'adoucir, fléchissez son courage '. Il aime ses sujets, il est juste, il est sage ; Du titre de clément rendez-le ambitieux : C'est par là que les rois sont semblables aux dieux. Du magnanime Henri qu'il contemple la vie : Dès qu'il put se venger il en perdit l'envie. Inspirez à Louis cette même douceur : La plus belle victoire est de vaincre son cour. Oronte est à présent un objet de clémence ; S'il a cru les conseils d'une aveugle puissance, Il est assez puni par son sort rigoureux ; Et c'est être innocent que d'être malheureux. |
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Jean de La Fontaine (1621 - 1695) |
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Portrait de Jean de La Fontaine | |||||||||
Bibliographie8 juillet 1621. Naissance et baptême de Jean de La Fontaine. (Paroisse de Château-Thierry.) Son père est Charles de La Fontaine, conseiller du roi et maître des eaux et forêts, fils de bourgeois champenois. Sa mère est Françoise Pidoux de bonne maison poitevine, veuve remariée. Biographie / OuvresJean de La Fontaine passe ses premières années à Château-Thierry dans l'hôtel particulier que ses parents, Charles de La Fontaine, Maître des Eaux et Forêts et Capitaine des Chasses du duché de Château-Thierry, et Françoise Pidoux, fille du bailli de Coulommiers, ont acheté en 1617 au moment de leur mariage. Le poète gardera cette maison jusqu'en 1676. Classée monument historique en 1886, la demeu |
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