Jean Tardieu |
Quand nous aurons déjoué les pièges rassurants les apparences paisibles nous connaîtrons le sens de tout le Strié le Pointillé le Déchiré ce qui commence à ouvrir la paupière et ce qui est à demi effacé le calme qui fait peur le mouvement fou qui s'accélère. Nous saurons que le mort est un grand oiseau triste en forme de feuille et quel drôle de petit troll gambade dans le vide si on pense à autre chose. Nous serons les familiers du parallélépipède en faux col de la table à tête de corbeau du Kobold et de la Bretonne qui font rouler la terre un train d'enfer en sautant dessus comme sur un tonneau de la dame noire en tronçons, du serpent mondain aux pattes molles des Messieurs allumettes joueurs de castagnettes de l'ouf enragé qui bondit sur le lézard mort du vrai fouillis de je ne sais quoi qui est là pour confondre tout le monde dans la conversation de la patronne prétentieuse en chignon qui charme un grand cerceau de cirque de l'oiseau toujours l'oiseau des poutres le bec et l'ongle prêts au bord du gouffre incertain je veux dire mesquin je veux dire malin effrayant et risible c'est tout un. Voilà pourquoi les lacets de mes souliers dansent la bourrée d'Auvergne (le second fonce de la tête comme un marlou). Voilà pourquoi j'apprivoise une tapisserie-hibou à deux têtes un quidam végétal, manchot et drapé, qui se fâche un utérus qui fait le poisson le grand Comique de la géométrie linéaire (il en a un oil le petit triangle !) le vrombissement du mollusque qui survole le désert plissé de l'empreinte digitale. Voilà pourquoi en frottant mes rêves sur le réel rugueux j'ai su qu'il y a du clownesque dans l'inquiétant, une bêtise des monstres, une perfidie de l'obtus. Tout ce joli monde apparaît dans les interstices et me montre du doigt en pouffant quand je me réveille avec des sueurs froides dans la nuit la plus transparente. Mais moi la main dans la main avec la menace et le danger, je dompte l'inconnu qui est partout c'est à mon tour de rire et de provoquer l'impuisable Surprise l'ennemi se replie en désordre je respire un nouvel espace plus vaste et plus solitaire que l'autre. |
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Jean Tardieu (1903 - 1995) |
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Portrait de Jean Tardieu | |||||||||
Biographie / OuvresNé en 1903 à Samt-Gerrnain-de-Joux (Jura), d'un père peintre (Victor Tardieu. 1870-1937) et dune mère musicienne. Étude.a Paris : Ivcée Condorcet. puis Sorbonne. Suit, dès 1923. les > Entretiens d'été » de Pontigny, où ses premiers écrits poétiques sont remarqués par Paul Desjardins, André Gide, Roger Martin du Gard. Premiers poèmes publiés par Jean Paulhan. en 1927. dans La Nouvelle Revue |
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