Jean-Pierre Claris de Florian |
Un arabe à Marseille autrefois m'a conté Qu'un pacha turc dans sa patrie Vint porter certain jour un coffret cacheté Au plus sage dervis qui fût en Arabie. Ce coffret, lui dit-il, renferme des rubis, Des diamants d'un très grand prix : C'est un présent que je veux faire À l'homme que tu jugeras Être le plus fou de la terre. Cherche bien, tu le trouveras. Muni de son coffret, notre bon solitaire S'en va courir le monde. Avait-il donc besoin D'aller loin ? L'embarras de choisir était sa grande affaire : Des fous toujours plus fous venaient de toutes parts Se présenter à ses regards. Notre pauvre dépositaire Pour l'offrir à chacun saisissait le coffret : Mais un pressentiment secret Lui conseillait de n'en rien faire, L'assurait qu'il trouverait mieux. Errant ainsi de lieux en lieux, Embarrassé de son message, Enfin, après un long voyage, Notre homme et le coffret arrivent un matin Dans la ville de Constantin. Il trouve tout le peuple en joie : Que s'est-il donc passé ? Rien, lui dit un iman ; C'est notre grand vizir que le sultan envoie, Au moyen d'un lacet de soie, Porter au prophète un firman. Le peuple rit toujours de ces sortes d'affaires ; Et, comme ce sont des misères, Notre empereur souvent lui donne ce plaisir. - Souvent ? - oui. - c'est fort bien ; votre nouveau vizir Est-il nommé ? - sans doute : et le voilà qui passe. Le dervis, à ces mots, court, traverse la place, Arrive, et reconnaît le pacha son ami. Bon ! Te voilà ! Dit celui-ci : Et le coffret ? - seigneur, j'ai parcouru l'Asie ; J'ai vu des fous parfaits, mais sans oser choisir : Aujourd'hui ma course est finie ; Daignez l'accepter, grand vizir. |
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Jean-Pierre Claris de Florian (1755 - 1794) |
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Portrait de Jean-Pierre Claris de Florian | |||||||||
Biographie / OuvresJean-Pierre Claris de Florian est né à Florian près de Sauve, dans les Cévennes, le 6 mars 1755, perd sa mère très jeune, probablement à l'âge de deux ans. Familier du château de Sceaux et protégé de Voltaire (son oncle). Lauréat de l'Académie, le 6 mars 1788, Florian atteignit le sommet de sa gloire en y entrant , remplaçant le cardinal de Luynes. Banni de Paris pendant |
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